Buch lesen: «Raison de Tuer », Seite 9

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CHAPITRE DIX-HUIT

La maison d’arrêt de South Bay était un immense complexe marron qui s’étendait sur six blocs carrés à la limite sud de Boston. La forteresse était déployée en forme de triangle, avec peu de fenêtres et encore moins d’entrées. Plusieurs bâtiments plus petits, de hauts murs, et d’interminables portes autour de la zone faisaient de son entrée une énigme pour le visiteur ordinaire.

Avery avait été quelques fois à South Bay avant, à la fois en tant qu’avocate et que policière. Même s’il était facile pour elle de se diriger à travers Massachussetts Avenue vers les nombreuses rues adjacentes qui devaient être utilisées pour se garer sur Bradson Street et obtenir l’accès au bâtiment principal, c’était toujours un processus qui prenait du temps et était excessivement compliqué.

Les visiteurs devaient normalement donner une autorisation écrite au moins un jour à l’avance. Si aucun préavis n’était donné, ils étaient habituellement refoulés à la porte pour des raisons de sécurité, quels que soient leurs nom, position, ou excuse. Le fait qu’Avery soit de la police signifiait peu pour les responsables de South Bay. Les prisons étaient comme des îles privées, des états en soi où les employés ne rendaient des comptes qu’à leur directeur et au capitaine.

Avery, toutefois, n’était pas un visiteur typique.

Pseudo-célébrité à South Bay, elle était connue par presque tout le personnel. Le procès où elle avait fait acquitter Howard Randall pour meurtre avait été diffusé à la télévision. Ce qui avait aussi été diffusé était sa reddition sanglante seulement quelques jours après. Durant les deux épreuves, son visage avait été placardé partout, et jusqu’à sa disparition et sa réapparition ultérieure à la police de Boston, son nom était devenu synonyme d’avocats corrompus et d’un système judiciaire en grand besoin d’une refonte massive.

Au détecteur à métaux, un garde cria.

« Eh, madame Black ! Vise ça, Joey ! Regarde qui est là! Avery Black est de retour. »

« Quoi de neuf, madame Black ? »

Avery leur offrit un geste de la main peu dynamique.

« Salut les gars. »

Elle plaça ses objets sur la table et passa à travers le scanner.

Un autre garde s’inclina.

« À quoi devons-nous cet honneur, madame Black ? »

« Je suis ici pour voir Howard Randall. »

« Oh ! », roucoula un groupe de gardes.

« J’aimerais être une mouche sur ce mur », dit quelqu’un. « Attention, Black. Randall a été transféré au bloc B il y a deux mois. Il a tailladé un détenu assez gravement. Le vieil homme peut bouger ! »

Après le détecteur à métaux, elle fut fouillée et autorisée à entrer dans la salle des visiteurs.

« Nom ? », dit une femme enrobée et austère à l’intérieur d’un bureau fermé.

« Avery Black. Criminelle. Police de Boston. »

« Je ne vous vois pas sur la liste, Black. Vous devrez revenir une autre fois. »

Un garde qui passait fit une grimace.

« Nan, nan », dit-il, « laissez-là passer. Vous savez qui c’est ? Avery Black. Elle a fait acquitter ce vieux Randall pour meurtre. L’affaire la plus captivante que j’ai jamais regardée. »

« Vous porterez le chapeau ? »

« Ouais, ouais. Donnez-lui un laissez-passer. Je vais faire descendre quelqu’un pour Randall. Voir s’il est partant pour une discussion. Désolé, madame Black, mais si Randall ne veut pas vous voir, il n’y a rien que nous puissions faire. »

« Compris », dit-elle.

La pièce grillagée était grande et peinte en vert. Des interphones résonnaient continuellement derrière les grilles, ainsi que des portes qui claquaient. Plusieurs tables et chaises étaient occupées par des visiteurs patientant pour avoir une chance de voir leurs proches. Un couple de Mexicains était en train de se battre pendant que leurs trois enfants couraient autour et essayaient de parler à d’autres.

Qu’est-ce que je fais là ? s’interrogea Avery.

« Black ! C’est votre jour de chance », s’exclama un garde. « Randall dit qu’il vous attendait. Pas de salle des visites publique, par contre. Il doit rester enfermé. Au moment où il ouvre la bouche, il s’attire des ennuis. Je vais vous accompagner en bas et vous installer à l’extérieur de sa cellule. Plus d’intimité pour vous aussi, n’est-ce pas ? Et en plus, vous étiez son avocate avant. Vous n’avez pas des privilèges avocat-client ? »

La descente vers le sous-sol fut tout ce dont Avery se souvint.

Des prisonniers criaient et tambourinaient sur leurs cellules. « Faites-moi sortir de là ! Je suis innocent ! » Des gardiens criaient. « Taisez-vous ou c’est la Boîte ! » Des murmures l’atteignirent, de gardiens qui passaient tout comme de prisonniers. « Eh, ma jolie. Tu veux un rendez-vous privé ? »

Le niveau du sous-sol était plus sombre que le reste de la prison, avec un éclairage médiocre et d’épaisses portes noires contre du béton peint en gris. Des chiffres blancs étaient peints sur chaque porte. B1…B2…B3. Le garde passa devant chaque porte et en ouvrit une autre.

« Nous l’avons mis dans la salle de conférence pour vous », dit-il. « Vous devriez être plus à l’aise là-bas. Quand vous aurez fini, criez simplement. »

Une porte noire sans marque parmi d’autres fut ouverte.

Howard Randall était assis à un bout d’une longue table de métal dans une pièce extrêmement étroite. Il avait une grande tête avec des cheveux gris rasés très court. D’épaisses lunettes habillaient son visage ridé. De petits yeux regardaient fixement Avery avec excitation. Il était vêtu d’une combinaison orange. Des mains parcheminées étaient serrées sur la table et maintenues en place par des menottes. De même, ses pieds avaient été menottés et cadenassés aux pieds de la table pour éviter tout mouvement réel.

« Voilà, Howard », dit le garde. « Tu vois ce que je fais pour toi ? Ils ne voulaient pas la laisser descendre. Elle n’a pas appelé d’abord. Mais je l’ai fait rentrer. Ça doit valoir quelque chose, non ? »

Howard lui accorda un sourire et un hochement de la tête reconnaissant.

« Bien sûr, officier Roberts », dit-il avec une voix douce et assurée. « Pourquoi ne parlons-nous pas du paiement plus tard ? »

Le garde costaud, avec une barbe de trois jours, sourit en retour. « Bonne affaire », dit-il. « Souvenez-vous », rappela-t-il à Avery, « gueulez juste quand vous aurez terminé. Je serais juste à l’extérieur. Ne la taillade pas maintenant, Howard », rit-il.

La porte se ferma en claquant.

La dernière fois qu’Avery l’avait vu, c’était trois ans auparavant, un trajet sans incidents dont elle avait espéré qu’il lui fournirait quelques réponses. Tout ce que Howard avait fait avait été de dire à quel point elle aurait dû être reconnaissante, pour tout ce qu’il lui avait donné.

Il paraissait plus docile qu’il ne l’avait été au cours de sa dernière visite. Nourriture médiocre et pas exercice, pensa Avery. Mais ses yeux…ses yeux brillaient comme des étoiles.

« Comment allez-vous, Howard ? »

« Comment allez-vous, Avery ? »

« Toujours le thérapeute », dit-elle. « C’était à propos de quoi ? », demanda-t-elle avec un regard par-dessus son épaule. « Quel genre de paiement attend-il ? »

« L’officier Roberts aime être caressé », dit-il. « Il apprécie les hommes plus âgés. Je l’excite. Il voudra un peu de temps en privé plus tard. »

« Je pensais que vous étiez asexué ? »

Howard haussa les épaules.

« On se sent seul ici », expliqua-t-il. « Nous faisons ce que nous faisons pour survivre, n’est-ce pas, Avery ? »

Elle se raidit et plissa les yeux en défense.

« Qu’est-ce que c’est censé vouloir dire ? »

Un air plus léger, plus insouciant vint à Howard. Il essaya d’ouvrir ses paumes, de s’installer confortablement et de se détendre ; les chaînes le maintenaient près de la table.

« Allons allons, Avery », dit-il, « pourquoi être si circonspecte ? Vous être venue à moi. Je suis un simple prisonnier. Comment pourrais-je vous blesser plus ? »

« J’ai entendu que vous avez découpé en rondelles un détenu pour descendre ici. »

« C’était différent. » Il opina avec compréhension. « Mes actes étaient complètement justifiés au vu de la situation. S’il vous plaît, venez. Asseyez-vous. Les visites sont si rares ces jours-ci. Faites-moi confiance, je ne mordrais pas », dit-il avec un sourire séducteur et sinistre qui dévoila ses petites dents.

La nausée qu’Avery avait ressentie envers lui revint et la percuta de toutes ses forces. Elle éprouvait l’envie irrépressible de vomir. Il m’a manipulée, pensa-t-elle, m’a menti, a entrepris de détruire ma vie. Pourquoi est-ce que je suis venue ici ? Pourquoi lui ferais-je confiance ? Il ne peut pas m’aider.

Comme s’il pouvait lire dans son esprit, il dit : « Vous êtes venus pour votre affaire, n’est-ce pas ? »

« Quelle affaire ? »

« Dans le journal d’aujourd’hui, ils l’appellent le Tueur de la Confrérie, si je m’en souviens correctement. Deux victimes, toutes deux étudiantes, placées…inhabituellement, oui ? Comme des mannequins. »

« Que savez-vous à propos de ça ? »

« Asseyez-vous », dit-il de nouveau.

À contrecœur, Avery éloigna la chaise de la table et s’assit.

« C’est mieux maintenant, non ? » roucoula-t-il.

« Le garde a dit que vous m’attendiez. »

« Oui », dit-il.

« Comment saviez-vous que j’allais venir ? »

« Je ne le savais pas, Avery. Je ne lis pas dans les esprits. Mais je sais des choses », chuchota-t-il, et il se pencha en avant. « Je sais que vous avez été promue au grade d’inspectrice, dans la division criminelle, et que vous êtes en charge de cette affaire, oui ? Les journaux en disent autant. Et je sais que vous avez un grand don, Avery, et il s’agit de la ténacité de votre volonté. Vous ne vous arrêtez à rien pour gagner. Mais vous n’êtes pas vraiment de taille pour celui-là, non ? Défendre l’homme ordinaire est une chose. Traquer les membres d’un gang en est une autre ; ces gens ont des besoins et des instincts basiques, et des motivations faciles à comprendre. Mais des personnes comme moi ? » Il laissa les mots en suspens dans l’air. « Nous sommes une espèce très différente. Nos motivations, nos raisons d’être sont souvent plus difficiles à percevoir par…le commun des mortels. »

« M’appelez-vous une simple mortelle ? »

Il inclina la tête comme pour dire “oui” sans reconnaître le fait.

« Je sais que vous êtes là », dit-il, « ce qui signifie que vous devez avoir besoin de quelque chose. Je suppose que vous voulez que je vous aide à résoudre l’affaire. Une initiative audacieuse, madame Black. Je pensais que vous m’aviez en abomination, et pourtant vous voilà, venant à moi pour obtenir de l’aide. Nous sommes des associés, une fois encore. »

« Nous n’avons jamais été des associés. »

« Nous avons toujours été des associés », corrigea-t-il instantanément. « Je suis arrivé dans cet endroit pour vous, Avery, pour vous montrer la lumière, pour vous changer – pas vos vêtements mais qui vous êtes à l’intérieur. Une personne, une vie, peut changer le monde, et vous êtes la preuve – mon plus grand cadeau à l’humanité. Vous êtes différente à présent. Je peux le voir. La fanfaronne présomptueuse a disparu. L’air prétentieux a été vaincu. Vous êtes assise devant moi, une humble servante de la justice, pas de l’opulence, du pouvoir ou de la cupidité. J’aime cette nouvelle vous, Avery. Je l’approuve de tout cœur. »

La personne dont il parlait, la personne qu’il aimait apparemment, était une coquille de la femme qu’Avery avait l’impression d’avoir été, une coquille abimée, en lutte, qui était tombée si loin qu’elle ne se peignait presque jamais les cheveux ou pensait à ce qu’elle pourrait porter de jour en jour. Elle était un fantôme, un fantôme qui roulait dans sa vieille voiture et vêtu d’habits de son ancienne vie, mais était complètement morte hormis pour sa force de volonté, une volonté qui la forçait à chercher la justice partout où elle le pouvait, pour qu’un jour, elle puisse peut-être réparer les torts de son passé et être libérée.

« Je hais celle que je suis devenue », dit-elle.

« Et si vous pouviez retourner en arrière », demanda-t-il, « le feriez-vous ? »

Non, pensa Avery. Elle ne reviendrait jamais en arrière. Cette vie était terminée. Mais cette nouvelle vie…elle n’était pas encore complète. Elle était toujours en disgrâce, se débattait toujours dans les ombres. Des souvenirs de son appartement sombre et vide revinrent, de sa vie sans amis ou famille – une fille qui ne voulait rien avoir à faire avec elle. Soudain, Avery se sentit glisser d’une saillie mentale, vers un endroit où elle n’avait été qu’une fois auparavant, un endroit obscur.

« Je ne pourrais jamais revenir en arrière », dit-elle.

« Donc », réalisa Howard, « le passé est révolu, mais le futur n’est pas encore radieux. Je peux vous aider Avery. Je veux vous aider. »

Avery leva les yeux, de retour dans la pièce, assise devant Howard Randall et immergée dans une affaire qui paraissait déjà se refroidir.

« J’ai besoin de votre aide », admit-elle.

« Et j’ai besoin de quelque chose de votre part, Avery. »

Ses petits yeux marron s’écarquillèrent avec une intensité passionnée, et il se pencha aussi loin qu’il put aller puis répéta : « J’ai besoin de quelque chose de votre part. »

« De quoi avez-vous besoin ? »

Le personnage tout entier de Randall changea. Les mains frappèrent sur la table, il se pencha en avant et hurla quasiment à son visage avec des mots en rafales intenses.

« Père », dit-il. « Grover Black. Alcoolique. Violeur. Brute. Agresseur. Meurtrier. »

Les mots, comme tirés dans son cœur, renvoyèrent Avery dans le passé, et elle était de nouveau là, avec son père et sa mère dans cette maison de l’Ohio.

« Non », déclara-t-elle.

« Mère. Layla Black. Alcoolique. Toxicomane. Démente. »

Avery était allée voir des thérapeutes, beaucoup de thérapeutes, après l’incident avec Randall, mais ce n’était en rien semblable à ça. Elle avait été prudente alors, en contrôle tout le temps. Maintenant, Randall l’avait réduite à une enfant de six ans avec seulement quelques mots et une passion incroyable.

Des larmes montèrent, les larmes instinctives d’une petite fille qui voulait sauver sa mère d’un père armé qui ne connaissait aucune limite.

« Père ! Alcoolique. À faire honte. Meurtrier ! »

Désespérée, hors de ses gongs, Avery se leva et tambourina à la porte.

« Laissez-moi sortir », appela-t-elle.

Randall ferma sa bouche. Il se pencha en arrière et leva un sourcil.

« Votre tueur est un artiste, oui ? », dit-il. « Les corps sont positionnés comme des amoureux ? C’est un introverti, un rêveur. Pas quelqu’un qui choisirait des filles au hasard dans les rues. Il faut qu’il les trouve, les observe, les connaisse de quelque part. Réfléchissez, Avery. Réfléchissez… »

Le garde ouvrit la porte.

Avery se précipita à l’extérieur.

CHAPITRE DIX-NEUF

Avery était assise, penchée sur le volant de sa voiture, encore sur le parking de la prison, détruite, une épave, une coquille vide, des larmes ruisselant sur son visage. Des sanglots affreux s’échappaient de sa gorge. À un certain point, elle se releva brusquement, hurla et donna des coups sur le volant.

Des mots.

Chaque fois qu’elle entendait un de ses mots, elle pleurait plus fort.

Agresseur. Alcoolique. Meurtrier.

« Non, non, non. »

Elle se frappa la tête pour faire sortir les images : son père dans les bois, arme au poing. Le corps derrière lui. Des varices. Cheveux gris. Cette robe verte.

« Sortez, sortez, sortez », supplia Avery.

Elle avait presque oublié jusqu’à maintenant. Tant d’années passées à essayer d’oublier le passé, de sortir de l’Ohio et effacer sa terrible histoire. En seulement quelques mots, Howard Randall avait tout fait ressurgir.

Tu es juste comme eux, pleura-t-elle dans sa souffrance.

Meurtrier.

Alcoolique.

Tout comme eux…tout comme eux.

Non ! se reprit-elle mentalement. Tu n’es en rien comme eux ! Tu n’es pas une meurtrière ou une toxicomane. Tu n’es pas malade dans ta tête. Tu fais de ton mieux tous les jours. Des erreurs ? Bien sûr, mais tu essaies de tout ton possible, tout le temps.

Fais le sortir de ma tête.

Fais le sortir de ma tête.

Des poings essuyèrent ses larmes.

Les sanglots furent réprimés.

Reprends-toi, ordonna-t-elle.

Des larmes revinrent, seulement cette fois, elles étaient plus légères, plus douces – pas au sujet de son ancien passé douloureux, mais de sa nouvelle vie, son existence solitaire et tourmentée.

Elle frappa le volant.

« Reprends-toi ! »

Une clarté détaillée la pénétra à cet instant-là. Tout semblait clair et net : la bordure du pare-brise, son bras, les voitures garées autour d’elle, le ciel. Pas exactement elle-même mais complètement maître d’elle, Avery prit son téléphone pour appeler Finley.

« Yo, yo », répondit-il.

« Finley », dit-elle. « Où êtes-vous ? »

« Je suis au bureau en train de travailler comme une bête. Où êtes-vous bordel ? Je devrais obtenir une augmentation pour ça, vous savez ? Je suis pas censé avoir un jour de repos pour avoir trouvé un psychopathe ? Je viens juste d’avoir une des meilleures courses-poursuites de ma vie et maintenant je suis coincé dans un bureau. Je devrais être là dehors à prendre une bière. »

Son monologue tout entier était sorti comme un seul mot.

Avery se frotta les yeux.

« Finley, ralentissez. Qu’avez-vous trouvé jusqu’ici ? »

« Pourquoi les gens me disent-ils toujours de ralentir ? », se plaignit-il comme s’il était véritablement contrarié. « Je parle très bien. Tout le monde dans mon équipe me comprend parfaitement. Peut-être que les autres sont le problème, déjà pensé à ça ? Ma mère l’habitude du dire ça. »

« Finley ! Les nouvelles. »

« Le corps est avec le légiste », dit-il, plus calmement et lentement. « La scène de crime est bouclée. Ils ont trouvé quelques fibres mais on dirait que ce sont les mêmes que celles de Jenkins : poils de chat, quelques touches d’extrait de plante sur ses vêtements. Ces dernières heures j’ai cherché des liens, comme vous aviez demandé. Différentes disciplines : économie et comptabilité. Une en première année, une en troisième. Différentes confréries, pas de liens de famille du tout. Bla, bla, bla. J’ai parlé à Ramirez. Il a dit que les parents de Cindy ont mentionné un cours d’art qu’elle prenait à Cambridge le semestre dernier. Un endroit appelé l’Art pour la Vie. Situé au croisement de Cambridge Street et de la Septième. J’ai appelé les amis de Tabitha pour une connexion. J’attends de recevoir une réponse. »

Artiste, pensa Avery. Il a dit que le tueur est un artiste.

« Qui enseigne là-bas ? », demanda-t-elle. « Qui possède le studio ? »

« Comment je pourrais savoir bordel ? Est-ce que j’ai mille mains, maintenant ? », aboya-t-il. « Vous m’avez donné, genre, cent boulots. Je n’ai aucune idée de qui enseigne ce putain de cours. Je vous l’ai dit, j’attends de recevoir des réponses. »

Elle ferma les yeux.

« Ok », dit-elle. « Merci. »

« Vous revenez pour m’aider ou quoi ? », se plaignit Finley.

« Il faut que je règle quelques derniers détails », dit-elle. « Vous avez l’adresse de Cindy ? Et celle de Tabitha ? Je veux faire un saut à leur résidence universitaire et voir ce que je peux trouver. »

« Je suis déjà allé dans la résidence de Tabitha. Juste une chambre de fille. Des vêtements chics et des posters stupides. Rien là-bas. »

« Laissez-moi être juge de ça. »

* * *

Cindy avait vécu dans une maison non loin de la suite de Kappa Kappa Gamma, ou de chez son petit-ami. Le bâtiment Tudor blanc, à deux étages avec des moulures bleues, hébergeait deux personnes. Cindy louait le premier étage, le second était occupé par un autre étudiant en troisième année de Harvard.

Avery appela avant pour s’assurer que les officiels de Harvard la laisseraient entrer à l’intérieur.

Un trousseau de clefs de secours se trouvait sous un caillou près du perron.

L’appartement de Cindy sentait le renfermé. Il y avait quatre pièces principales : séjour, chambre, une pièce supplémentaire qu’elle avait convertie en bureau, et la cuisine. Quelques œuvres d’art moderne ornaient les murs.

Le bureau était rempli d’un tas de manuels provenant de bibliothèques, ainsi que de nombreux romans à l’eau de rose en livres de poche. Des papiers étaient empilés sur le bureau.

Avery examina les dossiers. Des factures médicales, des classeurs de cours, des lettres de motivation, des CV. Tout était soigné et ordonné. Avery prit des notes sur son portable : le médecin de Cindy, chaque professeur qu’elle avait eu, les endroits où elle avait passé un entretien d’embauche, et son employeur actuel : Devante Accounting Firm. La lettre de son acceptation en tant que comptable junior dans leur entreprise était fièrement affichée sur le bureau.

Aucune mention du cours d’art ne pouvait être trouvée, mais il y avait une peinture faite à la main et encadrée sur le mur qui présentait la signature de Cindy en bas. L’œuvre était un bol de fruits. Avery la retourna. Au dos se trouvait un tampon : Art pour la Vie, leur adresse, et le logo d’une main représentée comme une palette de peintre. Avery remit tout où elle l’avait trouvé, se dirigea vers l’extérieur, et sauta dans sa voiture.

Le MIT fut appelé en avance pour s’assurer qu’ils lui permettraient d’entrer dans la chambre de Tabitha. L’assistant du doyen dit qu’il se chargerait de tout.

Dès qu’elle eut raccroché, le téléphone sonna.

« C’est Jones », dit une voix à l’accent jamaïcain.

« Dites-moi quelque chose », dit Avery.

« Rien ici, mec. Le chalet est vide. »

« Bon sang qu’avez-vous fait toute la journée ? »

« Des recherches, mec », se lamenta Jones, « enquêter. Ça a pris un moment pour arriver là-haut. Fallait obtenir les clefs, pas vrai ? Ensuite Thompson voulait conduire et il n’a absolument aucun sens de l’orientation. Le GPS nous a tous rendus marteau. Mais », il l’admit avec une autre gorgée de sa bière, « nous sommes arrivés ici et avons retourné l’endroit. Rien. Vous êtes sûre que le gamin est resté là ? »

« Vous avez perdu une journée entière », dit Avery.

« Vous n’écoutez pas, Black ! On a travaillé dur ! »

« Deux filles sont mortes », dit Avery. « Où peut-être l’avez-vous oublié ? Nous avons un tueur en série en liberté et vous vous payez ma tête dans un chalet au bord d’un lac. Retournez à la surveillance de Cambridge. Et cette fois », dit-elle sèchement, « je veux un rapport détaillé sur mon bureau d’ici demain après-midi. Je veux savoir exactement comment vous avez passé chaque heure. Vous m’entendez ? »

« Oh, allez ! Black. Je vous en supplie », s’écria Jones. « Ce boulot est dingue. Y a pas moyen de pister une voiture sur des kilomètres et des kilomètres comme ça. C’est impossible. J’ai besoin de genre, dix autres personnes. »

« Prenez Thompson. »

« Thompson ? », rit Jones. « IL est pire que Finley. »

« Souvenez-vous », insista Avery. « Un rapport détaillé sur mon bureau demain après-midi. Assurez-vous que Thompson comprenne. Foirez ça et j’appelle Connelly. »

Elle raccrocha.

Comment suis-je censée faire quoi que ce soit à la Criminelle si la moitié de mon équipe ne respecte même pas mon autorité ? fulmina-t-elle.

Le temps qu’elle atteigne sa destination suivante, le ciel était noir.

Tabitha avait vécu au cœur du MIT, tout près de Vassar Street. Sa camarade de chambre répondit à la porte ; c’était une fille petite et timide avec de longs cheveux noirs, des lunettes, et un visage recouvert de boutons. La pièce était grande : un séjour principal, une cuisine ouverte, et deux chambres.

« Salut », dit la fille, « vous devez être Avery. »

« Ouais, merci de me laisser entrer. »

« C’est sa chambre, là », montra-t-elle du doigt.

La fille paraissait être sombre et malheureuse.

« Vous étiez amies toutes les deux ? », l’interrogea Avery.

« Pas vraiment », dit-elle, et elle s’éloigna. « Tabitha était populaire. »

La chambre de Tabitha était extrêmement encombrée.

Le meuble de rangement était plus un endroit où entasser des feuilles de papier. Une rapide fouille mit au jour de tout, depuis des tickets de caisse à un CV et un papier d’emballage de sandwich malodorant. Le point le plus révélateur était le nombre de photographies qui s’alignaient sur les murs, toutes apparemment réalisées par Tabitha elle-même : des scènes de fermes, la silhouette du MIT, un bol de fruits.

Avery regarda au dos d’une des photographies encadrées.

Un tampon indiquait : Art pour la Vie.

Altersbeschränkung:
16+
Veröffentlichungsdatum auf Litres:
10 Oktober 2019
Umfang:
261 S. 2 Illustrationen
ISBN:
9781632919625
Download-Format:
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