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Tous Les Moyens Nécessaires

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Aus der Reihe: Un Thriller Luke Stone #1
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Tous Les Moyens Nécessaires
Tous Les Moyens Nécessaires
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Wird gelesen Olivier Lovero
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Elle fronça les sourcils mais avant qu'elle ne puisse ajouter autre chose, un poing s'abattit lourdement sur la porte en bois.

“Luke? Tu es là?” C'était la voix de Newsam. “Tu devrais sortir et venir jeter un coup d'oeil à ce que Swann a trouvé.”

Ils se regardèrent fixement. Luke se sentait coupable à mort à la pensée de sa femme, bien qu'il n'ait rien fait de mal. Il s'était retiré avant que quelque chose n'arrive mais il ne pouvait pas s'empêcher de se demander comment cela affecterait leur relation de travail.

Mais surtout, le pire de tout, c'est qu'il ne pouvait pas s'empêcher de penser qu'au fin fond de lui-même, il n'avait aucune envie de sortir de cette pièce.

*

Swann était assis à une longue table avec trois moniteurs vidéos étalés devant lui. Luke se dit qu'avec ses cheveux clairsemés et ses lunettes, il lui faisait penser à un physicien de la NASA dans la salle de contrôle. Luke se tenait derrière lui, accompagné de Newsam et de Trudy. Tous les trois jetaient un oeil par-dessus les épaules étroites de Swann.

“Ça, c'est le compte courant de Ken Bryant,” dit Swann, en bougeant son curseur sur l'écran du milieu. Luke enregistra les détails: dépôts, retraits, solde total, sur une période de temps du 28 avril au 27 mai.

“Cette connexion est sécurisée?” demanda Luke. Il jeta un oeil à travers la pièce et vers la porte d'entrée. La pièce principale du centre de commandement était au bout du couloir.

“Cette connexion?” dit Swann. Il haussa les épaules. “Elle est complètement indépendante du centre de commandement. Je suis connecté à nos propres tours et à nos propres satellites. C'est une connexion cryptée par nos hommes. J'imagine que la CIA ou la NSA pourrait charger quelqu'un du décryptage mais pourquoi tant d'efforts? Nous sommes tous dans le même bateau, non? Je ne me préoccuperais pas pour ça. Par contre, je me concentrerais sur ce compte en banque. Vous remarquez quelque chose de bizarre?”

“Il a un solde de plus de 24.000 dollars,” dit Luke.

“Exact,” dit Swann. “Un concierge avec un montant assez conséquent d'argent sur son compte courant. Intéressant. Maintenant, revenons un mois en arrière, du 28 mars au 27 avril. Le solde atteint jusqu'à 37.000 dollars avant qu'il ne commence à dépenser. Des virements ont été effectués à partir d'un compte sans nom pour une somme de 5.000 dollars, puis 4.000 dollars et enfin, soyons fous… un virement de 20.000 dollars.”

“OK” dit Luke.

“Passons au mois précédent, de fin février à fin mars. Au début, son solde est de 1.129 dollars et à la fin du mois, il dépasse les 9.000 dollars. Continuons de retourner en arrière, de fin janvier à fin février, où son solde n'a pas une seule fois atteint les 2.000 dollars. À partir de là, si vous retournez en arrière sur les trois années précédentes, vous verrez que son solde a rarement dépassé les 1.500 dollars. Nous avons donc ici un type qui vivait au mois par mois et qui soudainement commença à recevoir d'importants transferts d'argent à partir de mars.”

“Et d'où proviennent ces transferts?”

Swann sourit. “Ça, c'est la partie amusante. Ils proviennent d'une petite banque offshore spécialisée en comptes numérotés anonymes, la Royal Heritage Bank basée sur l'île de Grand Cayman.”

“Tu peux les pirater?” demanda Luke. Il vit du coin de l'oeil le regard désapprobateur de Trudy.

“J'ai pas besoin,” répondit Swann. “La Royal Heritage Bank appartient à un actif de la CIA nommé Grigor Svetlana. C'est un Ukrainien qui faisait partie de l'Armée Rouge dans le temps. Il s'est fait mal voir par les Russes il y a vingt ans, après que d'anciennes armes soviétiques aient disparu et réapparu sur des marchés noirs en Afrique de l'Ouest. Et je ne parle pas de fusils. Je parle de missiles anti aériens, anti tanks et de missiles de basse altitude. Les Russes étaient prêts à le pendre. Il s'est donc tourné vers nous. J'ai mes entrées à Langley et les comptes de la Royal Heritage Bank sont loin d'être anonymes. En fait, c'est un livre ouvert à destination des services de renseignements américains. Bien entendu, la plupart des clients de la Royal Heritage Bank ne sont pas au courant.”

“Donc tu sais à qui appartient le compte dont proviennent les virements?”

“Tout à fait.”

“OK, Swann,” dit Luke. “Tu es très habile mais maintenant fais-nous part de tes découvertes.”

Swann montra du doigt ses écrans d'ordinateur. “Le compte dont provient les transferts appartient à Bryant lui-même. C'est le compte qui apparaît sur mon moniteur de gauche. Il a un solde actuel d'environ 209.000 dollars. Il faisait des virements petit à petit à partir de son compte numéroté vers son compte courant, probablement pour son usage personnel. Et si nous retournons en arrière de quelques mois, vous verrez que le compte offshore de Bryant a été ouvert le 3 mars avec un virement de 250.000 dollars à partir d'un autre compte de la Royal Heritage Bank, celui qui apparaît sur mon moniteur de droite.”

Luke regarda le compte de droite. Son solde affichait plus de quarante-quatre millions de dollars.

“Quelqu'un a fait une affaire en engageant Bryant,” dit-il.

“Exactement,” dit Swann.

“Qui est-ce?”

“C'est ce type, là.” Sur l'écran, une photo de carte d'identité apparut. Il s'agissait d'un homme d'un âge moyen aux cheveux foncés tournant au gris. “Je vous présente Ali Nassar, 47 ans, Iranien, né à Téhéran dans une famille riche et influente. Il a étudié à la School of Economics de Londres, puis à l'école de droit de Harvard. Rentré dans son pays, il a obtenu un autre diplôme en droit à l'université de Téhéran. Par conséquent, il peut pratiquer tant aux États-Unis qu'en Iran. Il s'est surtout occupé de transactions commerciales internationales durant la majeure partie de sa carrière. Il vit à New York. C'est un diplomate iranien aux Nations Unies et il est couvert par l'immunité diplomatique.”

Luke se caressa le menton. Il sentait la barbe y pousser. Il commençait à fatiguer. “Donc, pour résumer, Nassar a payé Ken Bryant pour vraisemblablement accéder à l'hôpital et à toute information concernant les mesures de sécurité et comment les contourner.”

“Oui, vraisemblablement.”

“Il dirige probablement une cellule terroriste ici à New York, il a partie prise dans le vol de substances dangereuses et au moins quatre meurtres et il ne peut pas être poursuivi par la loi américaine?”

“On dirait bien.”

“D'accord. Vu que tu as accédé à son compte, on peut peut-être vérifier à qui d'autre il a envoyé de l'argent?”

“Ça me prendra un petit temps.”

“Pas de problème. J'ai une course à faire en attendant.”

Luke jeta un coup d'oeil à Ed Newsam. Le visage de Newsam était dur, ses yeux étaient plats et vides.

“Qu'est-ce que tu en penses, Ed? Tu veux venir faire un tour avec moi? On devrait peut-être aller rendre visite à Mr. Ali Nassar.”

Newsam sourit, l'air renfrogné.

“Ça pourrait être amusant.”

Chapitre 10

6h20 du matin

Centre de bien-être du Congrès – Washington DC

Ce n'était pas facile à trouver.

Jeremy Spencer se tenait devant des portes verrouillées en acier gris dans le sous-sol de l'édifice de bureaux Rayburn House. Les portes étaient dissimulées dans un coin du parking souterrain. Peu de personnes savaient que cet endroit existait et encore moins savaient où il se trouvait exactement. Il se sentait idiot mais il frappa tout de même à la porte.

La porte se déverouilla dans un grésillement. Il l'ouvrit tout en ressentant cette sensation bien connue d'incertitude lui serrant l'estomac. Il savait que la salle de fitness du Congrès était hors limites pour toute personne non membre du Congrès des États-Unis. Cependant et en dépit d'un manquement à un protocole de longue date, il avait été invité à s'y rendre.

Aujourd'hui était le jour le plus important de sa jeune vie. Il n'était à Washington que depuis trois ans et il montait en flèche.

Il y a sept ans, il n'était qu'un pauvre type vivant dans un parc à caravanes dans le nord de l'état de New York. Après ça, il était passé étudiant boursier à la State University de New York à Binghamton. Au lieu de prendre du bon temps et de profiter de l'opportunité, il est devenu président des Républicains du campus et commentateur du journal de l'école. Très vite, il commença à publier sur Breitbart et Drudge. Et maintenant, à peine le temps de se retourner et il se retrouvait journaliste régulier pour Newsmax, traitant des sujets du Capitole.

La salle de fitness n'était pas luxueuse. Il y avait quelques équipements cardios, des miroirs et quelques poids libres sur un rail. Un homme âgé en pantalon de training et en t-shirt, écouteurs rivés aux oreilles, marchait sur un tapis. Jeremy pénétra dans la silencieuse salle des vestiaires. Au détour d'un coin, il vit devant lui la personne qu'il était venu rencontrer.

L'homme était grand, la cinquantaine, avec des cheveux gris. Il se tenait devant un casier ouvert et Jeremy le vit de profil. Son dos était droit et sa large mâchoire jaillissait vers l'avant. Il portait un t-shirt et un short trempés de sueur par l'entraînement. Ses épaules, ses bras, son torse et ses jambes, tout son corps était musclé et défini. Il ressemblait à un meneur d'hommes.

L'homme était William Ryan, originaire de Caroline du Nord, Représentant pour une période de neuf ans et Président de la Chambre. Jeremy savait tout de lui. Sa famille était une vieille fortune. Ils possédaient des plantations de tabac avant la Révolution. Son arrière-arrière-grand-père était Sénateur des États-Unis durant la Reconstruction. Il avait terminé premier de sa classe à la Citadel. Il était charmant, gracieux, et il exerçait le pouvoir avec une grande confiance et une assurance si entière que peu de membres de son parti envisageaient de s'opposer à lui.

 

“Monsieur le Président?”

Ryan se retourna, vit Jeremy et afficha un large sourire. Il portait un t-shirt bleu avec des inscriptions en rouge et blanc: 'PROUD AMERICAN'. Il tendit la main à Jeremy. “Excusez-moi,” dit-il. “Je suis encore un peu trempé de sueur.”

“Pas de problème, monsieur.”

“OK,” dit Ryan. “Ça suffit avec les messieurs. En privé, appelez-moi Bill. Si c'est trop dur, appelez-moi par mon titre. Mais je veux que vous sachiez une chose importante. Je vous ai spécialement demandé et je vous offre une entrevue exclusive. Plus tard cet après-midi, il est possible que je finisse par donner une conférence de presse avec tous les médias. Je n'en sais encore rien. Mais jusque là, durant toute la journée à venir, mes pensées et mon avis concernant cette crise sont sous votre signature. Ça fait quoi comme impression?”

“Une impression fantastique,” répondit Jeremy. “C'est un honneur. Mais pourquoi moi?”

Ryan baissa la voix. “Vous êtes un bon gars. Je suis votre carrière depuis longtemps. Et je voudrais vous donner quelques conseils de manière totalement officieuse. À partir de demain, vous ne serez plus un chien d'attaque mais un journaliste chevronné. Je veux que vous imprimiez mot pour mot ce que je vais vous dire, mais à partir de demain, je voudrais que vous deveniez plus… nuancé, dirais-je. Newsmax n'est pas mal pour ce que c'est mais d'ici un an je vous vois au Washington Post. C'est là où on a besoin de vous et c'est ce qui se passera. Mais d'abord, il faut que les gens soient convaincus que vous avez mûri et que vous êtes devenu un journaliste traditionnel juste et pondéré. Que ce soit le cas ou non importe peu. Ce qui importe, c'est ce que les gens croient. Vous comprenez ce que je vous dis?”

“Je pense que oui,” répondit Jeremy. Le sang bouillonnait à ses oreilles. Les mots qu'il entendait étaient exaltants et terrifiants à la fois.

“Nous avons tous besoin d'amis haut-placés,” dit le Président. “Même moi. Maintenant, à ton tour.”

Jeremy sortit son téléphone. “Je viens de démarrer l'enregistreur… à l'instant. Monsieur, êtes-vous au courant du vol massif de substances radioactives qui a eu lieu à New York City la nuit dernière?”

“Je suis plus qu'au courant,” répondit Ryan. “Comme tous les Américains, je suis profondément préoccupé. Mes assistants m'ont réveillé à 4h du matin pour m'annoncer la nouvelle. Nous sommes en contact étroit avec les services de renseignements et nous surveillons la situation de près. Comme vous êtes sûrement au courant, j'ai travaillé sur une proposition de déclaration de guerre à l'Iran, mais le Président et son parti l'ont bloquée à chaque tour. Nous sommes actuellement dans une situation où l'Iran occupe un pays allié, la nation souveraine d'Irak, et notre propre personnel doit passer des contrôles iraniens pour entrer et sortir de notre ambassade là-bas. Je ne pense pas qu'il y ait eu de situation aussi humiliante depuis la crise de la prise d'otages en Iran en 1979.”

“Pensez-vous que ce vol ait été organisé par l'Iran, monsieur?”

“Tout d'abord, appelons les choses par leur nom. Qu'une bombe explose ou pas dans un métro, il s'agit d'une attaque terroriste sur le sol américain. Au moins deux gardiens de sécurité ont été assassinés et la ville de New York est en état d'alerte. Deuxièmement, nous n'avons pas encore assez d'informations pour pouvoir désigner l'identité des terroristes. Mais nous savons tous qu'une vulnérabilité sur la scène mondiale encourage ce genre d'attaques. Il faut que nous montrions notre vraie force, que nous nous unissions en tant que pays, la gauche et la droite ensemble pour se défendre. J'invite le Président à se joindre à nous.”

“Que pensez-vous que le Président devrait faire?”

“Au minimum, il doit déclarer l'état d'urgence au niveau national. Il devrait également fournir aux forces de l'ordre des pouvoirs spéciaux temporaires jusqu'à ce que nous retrouvions les responsables. Ces pouvoirs spéciaux devraient inclure la surveillance sans mandat, ainsi que les fouilles et les saisies aléatoires dans toutes les gares, les stations de bus, les aéroports, les écoles, les parcs publics, les centres commerciaux et tout autre centre important d'activité. Il faut également qu'il agisse immédiatement afin de protéger tous les autres stocks de substances radioactives partout sur le territoire des États-Unis.”

Jeremy fixa les yeux farouches de Ryan. Le feu qui y brûlait lui faisait presque détourner le regard.

“Parce que le plus important, c'est que finalement si les attaquants s'avèrent être originaires d'Iran ou sponsorisés par l'Iran, alors il faut qu'il déclare la guerre ou qu'il nous laisse la déclarer. S'il s'avère qu'il s'agit d'une attaque iranienne et qu'en dépit de cette information le Président continue à bloquer nos efforts pour protéger notre pays et ses alliés au Moyen-Orient… alors il ne me laisse pas le choix. Je lancerai moi-même la procédure de destitution.”

Chapitre 11

6h43 du matin

75ème Rue près de Park Avenue – Manhattan

Luke était assis avec Ed Newsam à l'arrière d'un véhicule de l'agence. Ils se tenaient de l'autre côte d'une rue calme bordée d'arbres, face à un haut édifice luxeux, moderne, avec de doubles portes en verre et un portier aux gants blancs à l'entrée. Pendant qu'ils observaient de loin, le portier ouvrit la porte pour une mince femme blonde en costume blanc qui sortait promener son chien. Il détestait ce genre d'édifice.

“Bon, ben, il y a au moins une personne dans cette ville qui ne semble pas préoccupée par la menace d'une attaque terroriste,” dit Luke.

Ed s'enfonça dans son siège. Il semblait à moitié endormi. Avec son pantalon en treillis beige et son t-shirt blanc sur sa silhouette taillée au couteau, sa tête de billard et sa barbe courte, il était loin de ressembler à un agent fédéral. En tout cas, il ne ressemblait certainement pas une personne qu'ils laisseraient entrer dans cet édifice.

Luke songeait à Ali Nassar et était contrarié par son immunité diplomatique. Il espérait que Nassar n'essayerait pas d'en faire tout un plat car Luke n'avait pas la patience de négocier.

Le téléphone de Luke sonna. Il y jeta un oeil et décrocha.

“Trudy,” dit-il. “Que puis-je faire pour toi?”

“Luke, on vient juste de recevoir l'info,” dit-elle. “Tu sais, le type que vous avez retrouvé mort à l'hôpital.”

“Oui, raconte.”

“Il s'agit d'Ibrahim Abdulraman, de 31 ans, Lybien, né à Tripoli dans une famille pauvre. Très peu éduqué, si pas du tout, il a rejoint l'armée à 18 ans. Très vite, il fut transféré à la prison Abu Salim où il a travaillé plusieurs années. Il a été impliqué dans des cas de violations des droits de l'homme à la prison, y compris des cas de torture et d'assassinat d'opposants au régime. En mars 2011, avec le début de la chute du régime, il a fui le pays. Un an plus tard, on le retrouve à Londres, travaillant comme garde du corps pour un jeune prince saoudien.”

Les épaules de Luke s'affaisèrent. “Mouais, un tortionnaire lybien travaillant pour un prince saoudien? Qui termine son parcours lors du vol de substances radioactives à New York? C'était qui ce type, vraiment?”

“Il n'avait aucun lien connu avec des extrémistes et il ne semble pas qu'il ait eu des convictions politiques très affirmées. Il n'a jamais fait partie des soldats d'élite d'aucune armée et il ne semble pas qu'il ait reçu d'entraînement spécial. Je pense que c'était un opportuniste, un type engagé pour sa force. Il a disparu de Londres il y a dix mois.”

“OK, tu peux me redonner son nom?”

“Ibrahim Abdulraman. Et Luke, il faut que tu saches autre chose.”

“Quoi?”

“Ce n'est pas moi qui ai trouvé cette info. Elle est affichée sur le grand panneau dans la pièce principale du centre de commandement. Ce type des services de police de New York, Myerson, il ne m'a jamais communiqué les identifiants lorsqu'il les a eus en sa possession et ils ont effectué leurs propres recherches. Ils ont communiqué l'info à tout le monde sans même nous en parler. Ils sont occupés à nous éjecter.”

Luke regarda Ed et leva les yeux au ciel. La dernière chose dont il avait envie, c'était d'être impliqué dans une compétition entre agences. “OK, bon…”

“Écoute, Luke, je suis préoccupée pour toi. Tu commences à avoir de moins en moins d'alliés ici et je doute qu'un incident international aide la situation. Si on passait les infos sur les virements bancaires à la Défense Nationale pour qu'ils prennent leur propre décision? On peut toujours expliquer le piratage par un excès de zèle. Si tu vas rendre visite à ce diplomate, tu prends de sérieux risques.”

“Trudy, j'y suis déjà.”

“Luke…”

“Trudy, je vais raccrocher maintenant.”

“J'essaie de t'aider,” dit-elle.

Après avoir raccroché, il regarda Ed.

“Tu es prêt?”

Ed bougeait à peine. Il fit un geste vers l'édifice.

“Je suis né pour ça.”

*

“Je peux vous aider, messieurs?” demanda l'homme au moment où ils entrèrent.

Un lustre scintillant pendait au plafond de l'entrée de l'édifice. Sur la droite, il y avait un divan et deux chaises de designer. Un long comptoir longeait le mur de gauche derrière lequel se trouvait un autre portier. Il avait devant lui un téléphone, un ordinateur et une série d'écrans vidéos. Il y avait également une petite télévision où défilaient les actualités.

L'homme avait l'air d'avoir environ 45 ans. Ses yeux étaient rouges et veinés, et ce n'était pas forcément parce qu'ils étaient injectés de sang. Ses cheveux étaient lissés vers l'arrière. Il avait l'air de sortir de sa douche. Luke supposa qu'il travaillait ici depuis tellement longtemps qu'il pouvait se saoûler toute la nuit et faire son boulot dans son sommeil. Il connaissait probablement de vue chaque personne qui soit jamais rentrée ou sortie de cet édifice. Et il savait que Luke et Ed n'avaient rien à faire là.

“Ali Nassar,” dit Luke.

L'homme décrocha son téléphone. “Mr. Nassar, à la suite Penthouse. Qui dois-je annoncer?”

Sans dire un mot, Ed se glissa vers le comptoir et appuya sur le récepteur du téléphone, coupant la connexion. Ed était imposant et fort comme un lion mais quand il se déplaçait, il était fluide et gracieux comme une gazelle.

“Il est préférable que vous n'annonciez personne,” dit Luke. Il montra son insigne au portier. Ed fit de même. “Agents fédéraux. Nous voulons poser quelques questions à Mr. Nassar.”

“J'ai bien peur que ça ne soit pas possible en ce moment. Mr. Nassar ne reçoit personne avant 8h du matin.”

“Alors pourquoi avez-vous décroché le téléphone pour appeler?” demanda Newman.

Luke jeta un coup d'oeil à Ed. C'était une question un peu brusque. Ed n'était pas du genre à dialoguer et il avait peut-être bien fait.

“Vous avez vu les actualités?” demanda Luke. “Je suis sûr que vous avez entendu parler des déchets radioactifs dérobés? Nous avons des raisons de croire que Mr. Nassar sait quelque chose à ce sujet.”

L'homme regardait fixement devant lui. Luke sourit. Il savait qu'il venait de discréditer Nassar. Ce portier était sûrement bavard. Dès demain, chaque personne de cet édifice serait au courant que les fédéraux sont venus interroger Nassar sur ses activités terroristes.

“Je suis désolé, monsieur,” dit le portier.

“Vous n'avez pas à être désolé,” dit Luke. “Tout ce que vous avez à faire, c'est de nous donner accès au niveau penthouse. Si vous refusez, je vous arrête pour obstruction à la justice et je vous sors d'ici menotté. Je suis sûr que ce n'est pas ce que vous désirez et ce n'est pas non plus ce dont j'ai envie. Alors donnez-nous la clé ou le code, et continuez comme si de rien n'était. Sachez également que si vous trafiquez l'ascenseur une fois que nous sommes à l'intérieur, non seulement je vous arrêterai pour obstruction à la justice, mais également comme partie prise dans le cas de quatre meurtres et vol de substances dangereuses. La caution sera fixée à dix millions de dollars et vous croupirez dans la prison de Rikers Island durant les douze prochains mois en attente d'un procès. Ça vous semble séduisant comme option…” Luke jeta un oeil à la plaque d'identification du portier.

“John?”

*

“Tu allais vraiment arrêter ce type?” demanda Ed.

L'ascenseur en verre s'élevait dans un tube circulaire de plexyglass dans un coin de l'édifice. Plus ils montaient, plus la vue sur la ville devenait saisissante et vertigineuse. Bientôt, ils purent balayer toute la ville du regard. L'Empire State Building se trouvait juste en face d'eux et l'édifice des Nations Unies à leur gauche. Au loin, des avions scintillaient dans la lumière de l'aube à leur approche vers l'aéroport de LaGuardia.

 

Luke sourit. “L'arrêter pour quoi?”

Ed ricana. L'ascenseur continuait à monter, toujours plus haut.

“Je suis crevé. J'allais dormir quand Don m'a appelé.”

“Je sais,” dit Luke. “Pareil pour moi.”

Ed hocha la tête. “Je n'avais plus fait de nuit blanche depuis longtems. Ça ne me manquait pas.”

L'ascenseur atteignit le dernier étage. Une tonalité douce retentit et les portes s'ouvrirent.

Ils s'avancèrent dans un large vestibule. Le sol était en pierre polie. À dix mètres devant eux, se trouvaient deux hommes imposants, en costume. Ils avaient la peau sombre. D'origine perse peut-être, pensa Luke. Ils bloquaient l'accès à une double porte mais ça ne le préoccupait pas vraiment.

“On dirait que notre portier nous a annoncés.”

L'un des deux hommes leva la main. “Vous devez faire marche arrière. Vous n'avez pas le droit de venir ici.”

“Agents fédéraux,” dit Luke. Ils continuèrent à avancer vers les deux hommes.

“Vous n'avez aucune autorité ici. Nous vous refusons l'accès.”

“J'imagine que ça ne vaut pas la peine de leur montrer mon insigne,” dit Luke.

“Ouais,” répondit Ed. “Pas besoin.”

“Suis-moi, OK?”

“OK.”

Luke attendit un instant.

“Maintenant!”

Ils se trouvaient à un mètre des deux hommes. Luke se jeta sur son adversaire et lui assena le premier coup. Il fut surpris par la lenteur de son propre poing. L'homme le dépassait d'une dizaine de centimètres et disposait d'une grande envergure de mouvement. Il esquiva facilement le coup de Luke et saisit son poignet. Il était très fort. Il attira Luke contre lui.

Luke tenta de lui asséner un coup de genou dans l'aine mais l'homme bloqua le coup avec sa jambe. L'homme saisit Luke à la gorge. Ses doigts se serrèrent comme les serres d'un oiseau, s'enfonçant dans la chair.

Luke riposta en lui enfonçant les doigts dans les yeux. L'index et le majeur de sa main gauche s'enfoncèrent chacun dans un oeil. Ce n'était pas un coup direct mais ça eut l'effet escompté. L'homme relâcha sa prise et recula. Ses yeux coulaient. Il les ferma un intant, secoua la tête, cligna des yeux, puis sourit.

Ça allait vraiment être une dure bataille.

Puis soudainement, Newsam surgit, tel un fantôme. Il prit la tête du type dans ses mains et la frappa violemment contre le mur. La violence des coups était intense. Une chose était de frapper la tête de ton adversaire contre un mur mais Ed Newsam le faisait comme s'il voulait traverser le mur en utilisant la tête du type.

Boum!

Le visage du type grimaça.

Boum!

Sa mâchoire se laissa aller.

Boum!

Ses yeux se retournèrent.

Luke leva la main. “OK, Ed. Je pense qu'il a eu son compte. Laisse-le tomber en douceur. Ce sol ressemble à du marbre.”

Luke jeta un coup d'oeil à l'autre garde. Il était affalé sur le sol, les yeux fermés, la bouche ouverte, la tête appuyée contre le mur. Ed les avait maîtrisés tous les deux en un rien de temps. Luke n'avait pas causé une égratignure.

Luke sortit des liens en plastique de sa poche et s'agenouilla près du type. Il ligota ses chevilles en serrant fort. Quelqu'un finirait par venir couper ces attaches et ses pieds resteraient probablement endormis pendant une heure.

Ed faisait de même avec son adversaire.

“Tu es un peu rouillé, Luke”, dit-il.

“Moi? Noooon. Je ne suis même pas supposé me battre. Ils m'ont engagé pour mon intelligence.” Il pouvait encore sentir l'endroit où les mains du type avaient serré sa gorge. Ça allait être douloureux demain.

Ed secoua la tête. “J'ai fait partie de la Force Delta, tout comme toi. Je suis arrivé deux ans après l'opération avant-poste de combat Stanley au Nuristan. L'histoire était encore sur toutes les lèvres. On racontait comment vous aviez été parachutés et débordés. Au matin, seuls trois hommes continuaient à se battre et tu étais l'un d'entre eux, n'est-ce pas?”

Luke grogna. “Je ne suis pas au courant de l'existence de…”

“Ne me raconte pas des conneries,” dit Ed. “Classifiée ou non, je connais l'histoire.”

Luke avait appris à vivre sa vie de manière compartimentée. Il parlait rarement de cet incident qui avait eu lieu il y a une éternité, dans un coin de l'est de l'Afghanistan tellement paumé que le fait d'y mettre des troupes au sol était supposé signifier quelque chose. C'était de l'histoire ancienne. Même sa femme n'était pas au courant.

Mais vu qu'Ed faisait partie des forces Delta, alors… c'était OK.

“Oui effectivement, “ dit-il. “J'y étais. On s'est retrouvé là suite à de mauvais renseignements et ça a fini par être la pire nuit de ma vie.” Il fit un geste vers les deux hommes au sol.

“En comparaison, ça c'est un épisode de Happy Days. On a perdu neuf hommes là-bas. Juste avant l'aube, on est tombé à court de munitions.” Luke secoua la tête. “Ça s'est envenimé. La plupart de nos hommes étaient déjà morts et les trois d'entre nous qui s'en sont sortis.... Je ne suis même pas sûr qu'on en soit jamais revenu. Martinez est paralysé des jambes. D'après les dernières infos, Murphy est SDF et est régulièrement interné au service de psychiatrie de Virginie.”

“Et toi?”

“Je continue à faire des cauchemars.”

Ed était occupé à nouer les poignets de son adversaire. “J'ai connu un type qui faisait partie de l'équipe de nettoyage après qu'ils aient évacué la zone. Il m'a dit que 167 corps avaient été retrouvés sur cette colline, sans compter nos propres hommes. À l'intérieur du périmètre, 21 ennemis étaient morts en combat au corps-à-corps.”

Luke le regarda. “Pourquoi tu me racontes ça?”

Ed haussa les épaules. “Tu es un petit peu rouillé. Aucune honte à l'admettre. Bien que tu sois intelligent et bien que tu sois petit, tu es tout en muscles, tout comme moi.”

Luke éclata de rire. “OK, je suis un peu rouillé. Mais c'est qui que tu appelles petit?” Il rit en levant les yeux sur la charpente musclée d'Ed.

Ed rit en retour. Il fouilla les poches de l'homme sur le sol et en quelques secondes, il trouva ce qu'il cherchait. Il s'agissait d'une carte ouvrant le verrou numérique fixé au mur à côté des doubles portes.

“On rentre?”

“Après toi,” dit Ed.