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Eureka

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IV

Comme point de départ, adoptons donc la Divinité. Relativement à cette Divinité, considérée en elle-même, celui-là seul n'est pas un imbécile, celui-là seul n'est pas un impie, qui n'affirme absolument rien. «Nous ne connaissons rien, dit le baron de Bielfeld, nous ne connaissons rien de la nature ou de l'essence de Dieu; – pour savoir ce qu'il est, il faut être Dieu même.»

Il faut être Dieu même! Malgré cette phrase effrayante, vibrant encore dans mon oreille, j'ose toutefois demander si notre ignorance actuelle de la Divinité est une ignorance à laquelle l'âme est éternellement condamnée.

Enfin, contentons-nous aujourd'hui de supposer que c'est Lui, – Lui, l'Incompréhensible (pour le présent du moins), – Lui, que nous considérerons comme Esprit, c'est-à-dire comme non-Matière (distinction qui, pour tout ce que nous voulons atteindre, suppléera parfaitement à une définition), – Lui, existant comme Esprit, qui nous a créés, ou faits de Rien, par la force de sa Volonté, – dans un certain point de l'Espace que nous prendrons comme centre, à une certaine époque dont nous n'avons pas la prétention de nous enquérir, mais en tout cas immensément éloignée; – supposons, dis-je,'que c'est lui qui nous a faits, – mais faits … quoi? Ceci est, dans nos considérations, un point d'une importance vitale. Qu'étions-nous, que pouvons-nous supposer légitimement avoir été, quand nous fûmes créés, nous, univers, primitivement et individuellement?

Nous sommes arrivés à un point où l'Intuition seule peut venir à notre aide. Mais qu'il me soit permis de rappeler l'idée que j'ai déjà suggérée comme la seule qui puisse convenablement définir l'intuition. Elle n'est que la conviction naissant de certaines inductions ou déductions dont la marche a été assez secrète pour échapper à notre conscience, éluder notre raison, ou défier notre puissance d'expression. Ceci étant entendu, j'affirme qu'une intuition absolument irrésistible, quoique indéfinissable, me pousse à conclure que [ce que] Dieu a originairement créé, – que cette Matière qu'il a, par la force de sa Volonté, tirée de son Esprit, ou de Rien, ne peut avoir été autre chose que la Matière dans son état le plus pur, le plus parfait, de … de quoi? – de Simplicité.

Ce sera là la seule supposition absolue dans mon discours. Je me sers du mot supposition dans son sens ordinaire; cependant je maintiens que ma proposition primordiale, ainsi formulée, est loin, bien loin d'être une pure supposition. Rien n'a été, en effet, plus régulièrement, plus rigoureusement déduit; – aucune conclusion humaine n'a été, en effet, plus régulièrement, plus rigoureusement déduite; – mais, hélas! le procédé de cette déduction échappe à l'analyse humaine; – en tout cas, il se dérobe à la puissance expressive de toute langue humaine.

Efforçons-nous maintenant de concevoir ce qu'a pu et ce qu'a dû être la Matière dans sa condition absolue de simplicité. Ici, la Raison vole d'un seul coup vers l'Imparticularité, – vers une particule, – une particule unique,– une particule une dans son espèce, —une dans son caractère, —une dans sa nature, —une par son volume, – une par sa forme, – une particule qui soit particule à tous égards, donc, une particule amorphe et idéale, – particule absolument unique, individuelle, non divisée, mais non pas indivisible, simplement parce que Celui qui la créa par la force de sa Volonté peut très-naturellement la diviser par un exercice infiniment moins énergique de la même Volonté.

Donc, l'Unité est tout ce que j'affirme de la Matière originairement créée; mais je me propose de démontrer que cette Unité est un principe largement suffisant pour expliquer la constitution, les phénomènes actuels et l'anéantissement absolument inévitable au moins de l'Univers matériel.

Le Vouloir spontané, ayant pris corps dans la particule primordiale, a complété l'acte, ou, plus proprement, la conception de la Création. Nous nous dirigerons maintenant vers le but final pour lequel nous supposons que cette particule a été créée; – quand je dis but final, je veux dire tout ce que nos considérations jusqu'ici nous permettent d'en saisir, – à savoir, la constitution de l'Univers tirée de cette Particule unique.

Cette constitution s'est effectuée par la transformation forcée de l'Unité, originelle et normale, en Pluralité, condition anormale. Une action de cette nature implique réaction. Une diffusion de l'Unité n'a lieu que conditionnellement, c'est-à-dire qu'elle implique une tendance au retour vers l'Unité, – tendance indestructible jusqu'à parfaite satisfaction. Mais je m'étendrai par la suite plus amplement sur ce sujet.

La supposition de l'Unité absolue dans la Particule primordiale renferme celle de la divisibilité infinie. Concevons donc simplement la Particule comme non absolument épuisée par sa diffusion à travers l'Espace. De cette Particule considérée comme centre, supposons, irradié sphériquement, dans toutes les directions, à des distances non mesurables, mais cependant définies, dans l'espace vide jusqu'alors, un certain nombre innombrable, quoique limité, d'atomes inconcevablement mais non infiniment petits.

Or, de ces atomes, ainsi éparpillés ou à l'état de diffusion, que nous est-il permis, non pas de supposer, mais de conclure, en considérant la source d'où ils émanent et le but apparent de leur diffusion? L'Unité étant leur source, et la différence d'avec l'Unité le caractère du but manifesté par leur diffusion, nous avons tout droit de supposer que ce caractère persiste généralement dans toute l'étendue du plan et forme une partie du plan lui-même; – c'est-à-dire que nous avons tout droit de concevoir des différences continues, sur tous les points, d'avec l'unité et la simplicité du point originel. Mais, pour ces raisons, sommes-nous autorisés à imaginer les atomes comme hétérogènes, dissemblables, inégaux et inégalement distants? Pour parler plus explicitement, devons-nous croire qu'il n'y a pas eu, au moment de leur diffusion, deux atomes de même nature, de même forme ou de même grosseur? et que, leur diffusion étant opérée à travers l'Espace, ils doivent être tous, sans exception, inégalement distants l'un de l'autre? Un pareil arrangement, dans de telles conditions, nous permet de concevoir aisément, immédiatement, le procédé d'opération le plus exécutable pour un dessein tel que celui dont j'ai parlé, – le dessein de tirer la variété de l'unité, – la diversité de la similarité, – l'hétérogénéité de l'homogénéité, – la complexité de la simplicité, – en un mot, la plus grande multiplicité possible de rapports de l'Unité expressément absolue. Incontestablement nous aurions le droit de supposer tout ce que j'ai dit, si nous n'étions pas arrêtés par deux réflexions: – la première, c'est que la superfluité et la surérogation ne sont jamais admissibles dans l'Action Divine; et la seconde, c'est que le but poursuivi apparaît comme tout aussi facile à atteindre quand quelques-unes des conditions requises sont obtenues dans le principe, que quand toutes existent visiblement et immédiatement. Je veux dire que celles-ci sont contenues dans les autres, ou qu'elles en sont une conséquence si instantanée, que la distinction devient inappréciable. La différence de grosseur, par exemple, sera tout de suite créée par la tendance d'un atome vers un second atome, de préférence à un troisième, en raison d'une inégalité particulière de distance; inégalité particulière de distance entre des centres de quantité, dans des atomes voisins de différente forme, — phénomène qui ne contredit en rien la distribution généralement égale des atomes. La différence d'espèce, nous la concevons aussi très-aisément comme résultant de différences dans la grosseur et dans la forme, supposées plus ou moins conjointes; – en effet, puisque l'Unité de la Particule proprement dite implique homogénéité absolue, nous ne pouvons pas supposer que les atomes, au moment de leur diffusion, diffèrent en espèce, sans imaginer en même temps une opération spéciale de la Volonté Divine, agissant à l'émission de chaque atome, dans le but d'effectuer en chacun une transformation de sa nature essentielle; – et nous devons d'autant plus repousser une idée aussi fantastique, que l'objet en vue peut parfaitement bien être atteint sans une aussi minutieuse et laborieuse intervention. Nous comprenons donc, avant tout, qu'il eût été surérogatoire, et conséquemment anti-philosophique, d'attribuer aux atomes, en vue de leurs destinations respectives, autre chose qu'une différence de forme au moment de leur dispersion, et postérieurement une inégalité particulière de distance, – toutes les autres différences naissant ensemble des premières, dès les premiers pas que la masse a faits vers sa constitution. Nous établissons donc l'Univers sur une base purement géométrique. Il va sans dire qu'il n'est pas du tout nécessaire de supposer une absolue différence, même de forme, entre tous les atomes irradiés; – nous nous contentons de supposer une inégalité générale de distance de l'un à l'autre. Nous sommes tenus simplement d'admettre qu'il n'y a pas d'atomes voisins de forme similaire, – qu'il n'y a pas d'atomes qui puissent jamais se rapprocher, excepté lors de leur inévitable réunion finale.

Quoique la tendance, immédiate et perpétuelle, des atomes dispersés à retourner vers leur Unité normale soit impliquée, comme je l'ai dit, dans leur diffusion anormale, toutefois il est clair que cette tendance doit être sans résultat, – qu'elle doit rester une tendance et rien de plus, – jusqu'à ce que la force d'expansion, cessant d'opérer, donne à cette tendance toute liberté de se satisfaire. L'Action Divine, toutefois, étant considérée comme déterminée, et interrompue après l'opération primitive de la diffusion, nous concevons tout de suite une réaction,– en d'autres termes une tendance, qui pourra être satisfaite, de tous les atomes désunis à retourner vers l'Unité.

 

Mais la force de diffusion étant retirée, et la réaction ayant commencé pour favoriser le dessein final, —celui de créer la plus grande somme de rapports possible,– ce dessein est maintenant en danger d'être frustré dans le détail, par suite de cette tendance rétroactive qui a pour but son accomplissement total. La multiplicité est l'objet; mais rien n'empêche les atomes voisins de se précipiter tout de suite l'un vers l'autre, – grâce à leur tendance maintenant libre, avant l'accomplissement de tous les buts multiples, – et de se fondre tous en une unité compacte; rien ne fait obstacle à l'aggrégation de diverses masses, isolées jusque-là, sur différents points de l'espace; – en d'autres termes, rien ne s'oppose à l'accumulation de diverses masses, chacune faisant une Unité absolue.

V

Pour l'accomplissement efficace et complet du plan général, nous devinons maintenant la nécessité d'une force répulsive limitée, – de quelque chose qui serve à séparer, et qui, lors de la cessation de la Volition diffusive, puisse en même temps permettre le rapprochement et empêcher la jonction des atomes; qui leur permette de se rapprocher infiniment, et leur défende de se mettre en contact positif; quelque chose, en un mot, qui ait puissance, jusqu'à une certaine époque, de prévenir leur fusion, mais non de contredire à aucun égard ni à aucun degré leur tendance à se réunir. La force répulsive, déjà considérée comme si particulièrement limitée à d'autres égards, peut, je le répète, être prise comme une puissance destinée à empêcher l'absolue cohésion, seulement jusqu'à une certaine époque. A moins que nous ne concevions l'appétition des atomes pour l'Unité comme condamnée à n'être jamais satisfaite, – à moins que nous n'admettions que ce qui a eu un commencement ne doive pas avoir de fin, – idée qui est réellement inadmissible, quelque nombreux que soient ceux d'entre nous qui rêvent et bavardent sur ce thème, – nous sommes forcés de conclure que l'influence répulsive supposée devra finalement, – sous la pression de l'Unitendance agissant collectivement, mais agissant seulement alors que, pour l'accomplissement des plans de la Divinité, cette action collective devra se faire naturellement, – céder à une force qui, à cette époque finale, sera la force supérieure, poussée juste au degré nécessaire, et permettre ainsi le tassement universel des choses en Unité, unité inévitable parce qu'elle est originelle et conséquemment normale. Il est en vérité fort difficile de concilier toutes ces conditions; – nous ne pouvons même pas comprendre la possibilité de cette conciliation; – néanmoins cette impossibilité apparente est féconde en suggestions brillantes.

Que cette répulsion existe positivement, nous le voyons. L'homme n'emploie et ne connaît aucune force suffisante pour fondre deux atomes en un. Je n'avance ici que la thèse bien reconnue de l'impénétrabilité de la matière. Toute l'Expérience la prouve, – toute la Philosophie l'admet. J'ai essayé de démontrer le but de la répulsion et la nécessité de son existence; mais je me suis religieusement abstenu de toute tentative pour en pénétrer la nature; et cela, à cause d'une conviction intuitive qui me dit que le principe en question est strictement spirituel, – gît dans une profondeur impénétrable à notre intelligence présente, – est impliqué dans une considération relative à ce qui maintenant, dans notre condition humaine, ne peut être l'objet d'aucun examen, – dans une considération de l'Esprit en lui-même. Je sens, en un mot, qu'ici, et ici seulement, Dieu s'est interposé, parce qu'ici, et seulement ici, le nœud demandait l'interposition de Dieu.

Dans le fait, pendant que dans cette tendance des atomes vers l'Unité on reconnaîtra tout d'abord le principe de la Gravitation Newtonienne, ce que j'ai dit d'une force répulsive, servant à mettre des limites à la satisfaction immédiate, peut être entendu de ce que nous avons jusqu'à présent désigné tantôt comme chaleur, tantôt comme magnétisme, tantôt comme électricité; montrant ainsi, dans les vacillations de la phraséologie par laquelle nous essayons de le définir, l'ignorance où nous sommes de son caractère mystérieux et terrible.

Le nommant donc, pour le présent seulement, électricité, nous savons que toute analyse expérimentale de l'électricité a donné, pour résultat final, le principe, réel ou apparent, de l'hétérogénéité. Seulement là où les choses diffèrent, l'électricité se manifeste; et il est présumable qu'elles ne diffèrent jamais là où l'électricité n'est pas développée, sinon apparente. Or, ce résultat est dans le plus parfait accord avec celui où je suis parvenu par une autre voie que par l'expérience. J'ai affirmé que l'utilité de la force répulsive était d'empêcher les atomes disséminés de retourner à l'Unité immédiate; et ces atomes sont représentés comme différant les uns des autres. La différence est leur caractère, – leur essentialité, – juste comme la non-différence était le caractère essentiel de leur mouvement. Donc, quand nous disons qu'une tentative pour mettre en contact deux de ces atomes doit amener un effort de l'influence répulsive pour empêcher cette union, nous pouvons aussi bien nous servir d'une phrase absolument équivalente, à savoir, qu'une tentative pour mettre en contact deux différences amènera comme résultat un développement d'électricité. Tous les corps existants sont composés de ces atomes en contact immédiat, et peuvent conséquemment être considérés comme de simples assemblages de différences plus ou moins nombreuses; et la résistance faite par l'esprit de répulsion, si nous mettions en contact deux de ces assemblages quelconques, serait en raison des deux sommes de différences contenues dans chacun; – expression qui peut être réduite à celle-ci, équivalente:

La somme d'électricité développée par le contact de deux corps est proportionnée à la différence entre les sommes respectives d'atomes dont les corps sont composés.

Qu'il n'existe pas deux corps absolument semblables, c'est un simple corollaire qui résulte de tout ce que nous avons dit. Donc l'électricité, toujours existante, se développe par le contact de corps quelconques, mais ne se manifeste que par le contact de corps d'une différence appréciable.

A l'électricité, – pour nous servir encore de cette désignation, – nous pouvons à bon droit rapporter les divers phénomènes physiques de lumière, de chaleur et de magnétisme; mais nous sommes bien mieux autorisés encore à attribuer à ce principe strictement spirituel les phénomènes plus importants de vitalité, de conscience et de Pensée. A ce sujet, toutefois, qu'il me soit permis de faire une pause et de noter que ces phénomènes, observés dans leur généralité ou dans leurs détails, semblent procéder au moins en raison de l'hétérogénéité.

Écartons maintenant les deux termes équivoques, gravitation et électricité, et adoptons les expressions plus définies d'attraction et de répulsion. La première, c'est le corps; la seconde, c'est l'âme; l'une est le principe matériel, l'autre le principe spirituel de l'Univers. Il n'existe pas d'autres principes. Tous les phénomènes doivent être attribués à l'un ou à l'autre, ou à tous les deux combinés. Il est si rigoureusement vrai, il est si parfaitement rationnel que l'attraction et la répulsion sont les seules propriétés par lesquelles nous percevons l'Univers, – en d'autres termes, par lesquelles la Matière se manifeste à l'Esprit, – que nous avons pleinement le droit de supposer que la matière n'existe que comme attraction et répulsion, – que l'attraction et la répulsion sont matière, – nous servant de cette hypothèse comme d'un moyen de faciliter l'argumentation; – car il est impossible de concevoir un cas où nous ne puissions employer à notre gré le mot matière et les termes attraction et répulsion, pris ensemble, comme expressions de logique équivalentes et convertibles.

VI

Je disais tout à l'heure que ce que j'ai nommé la tendance des atomes disséminés à retourner à leur unité originelle devait être pris pour le principe de la foi newtonienne de la gravitation; et en effet on n'aura pas grande peine à entendre la chose ainsi, si l'on considère la gravitation newtonienne sous un aspect purement général, comme une force qui pousse la matière à chercher la matière; c'est-à-dire si nous voulons ne pas attacher notre attention au modus operandi connu de la force newtonienne. La coïncidence générale nous satisfait; mais, en regardant de plus près, nous voyons dans le détail beaucoup de choses qui paraissent non-coïncidentes, et beaucoup d'autres où la coïncidence ne paraît pas du moins suffisamment établie. Un exemple: la gravitation newtonienne, si nous la considérons dans certains modes, ne nous apparaît pas du tout comme une tendance vers Y Unité; elle nous semble plutôt une tendance de tous les corps dans toutes les directions, phrase qui semble exprimer la tendance à la diffusion. Ici donc il y a non-coïncidence. Un autre exemple: quand nous réfléchissons sur la loi mathématique qui gouverne la tendance newtonienne, nous voyons clairement que nous ne pouvons pas obtenir la coïncidence, – relativement, du moins, au modus operandi,– entre la gravitation, telle que nous la connaissons, et cette tendance, simple et directe en apparence, que j'ai supposée.

En effet, je suis arrivé à un point où il serait bon de renforcer ma position en inversant mon procédé. Jusqu'à présent, nous avons procédé à priori, d'une considération abstraite de la Simplicité, prise comme la qualité qui a dû le plus vraisemblablement caractériser l'action originelle de Dieu. Voyons maintenant si les faits établis de la Gravitation newtonienne peuvent nous fournir, à posteriori, quelques inductions légitimes.

Que déclare la loi newtonienne? que tous les corps s'attirent l'un l'autre avec des forces proportionnées [à leurs quantités de matière et inversement proportionnées] aux carrés de leurs distances. C'est à dessein que je donne d'abord la version vulgaire de la loi; et je confesse que dans celle-ci, comme dans la plupart des traductions vulgaires de grandes vérités, je ne trouve pas une qualité très-suggestive. Adoptons donc une phraséologie plus philosophique —Chaque atome de chaque corps attire chaque autre atome, soit appartenant au même corps, soit appartenant à chaque autre corps, avec une force variant en raison inverse des carrés des distarices entre l'atome attirant et l'atome attiré. Ici, pour le coup, un flot de suggestions jaillit aux yeux de l'esprit.

Mais voyons distinctement la chose que Newton a prouvée, —selon la définition grossièrement irrationnelle de h preuve prescrite par les écoles de métaphysique. Il fut obligé de se contenter de montrer que les mouvements d'un Univers imaginaire, composé d'atomes attirants et attirés obéissant à la loi qu'il annonçait, coïncidaient parfaitement avec les mouvements de l'Univers existant réellement, autant du moins qu'il tombe sous notre observation. Telle fut la somme de sa démonstration, selon le jargon conventionnel des philosophies. Les succès qui la confirmèrent ajoutèrent preuve sur preuve, – des preuves telles que les admet toute intelligence saine, – mais la démonstration de la loi-elle-même, selon les métaphysiciens, n'avait été confirmée en aucune façon. Cependant la preuve oculaire, physique, de l'attraction, ici même, sur cette Terre, fut enfin trouvée, en parfait accord avec la théorie newtonienne, et à la grande satisfaction de quelques-uns de ces reptiles intellectuels. Cette preuve jaillit, indirectement et incidemment (comme jaillirent presque toutes les vérités importantes), d'une tentative faite pour mesurer la densité moyenne de la Terre. Dans les fameuses expériences que Maskelyne, Cavendish et Bailly firent dans ce but, il fut découvert, vérifié et mathématiquement démontré que l'attraction de la masse d'une montagne était en accord exact avec l'immortelle théorie de l'astronome anglais.

Mais, en dépit de cette confirmation d'une vérité qui n'en avait aucun besoin, – en dépit de la prétendue corroboration de la théorie par la prétendue preuve oculaire et physique, —en dépit du caractère de cette corroboration, – les idées que les vrais philosophes eux-mêmes ne peuvent s'empêcher d'accepter relativement à la gravitation, et particulièrement les idées acceptées et complaisamment maintenues par les hommes vulgaires, ont été évidemment tirées, pour la plus grande partie, d'une considération du principe, tel qu'ils le trouvent simplement développé sur la planète à laquelle ils sont attachés.

 

Or, où tend une considération aussi amoindrie? A quelle espèce d'erreur donne-t-elle naissance? Sur la Terre nous voyons, nous sentons simplement que la gravitation chasse tous les corps vers le centre de la Terre. Aucun homme, dans le domaine ordinaire de la vie, ne peut voir ni sentir autrement, – ne peut s'empêcher de percevoir que toute chose, partout, a une tendance gravitante, perpétuelle vers le centre de la Terre, et pas ailleurs; cependant (sauf une exception qui sera spécifiée postérieurement) il est certain que chaque chose terrestre (pour ne pas parler maintenant de toutes les choses célestes) a une tendance non-seulement vers le centre de la Terre, mais en outre vers toute espèce de direction possible.

Or, quoique les hommes de philosophie ne puissent pas être accusés de se tromper avec le vulgaire dans cette matière, ils se laissent toutefois influencer, à leur insu, par l'idée vulgaire agissant comme sentiment. —Quoique personne n'ait foi dans les fables du Paganisme, —dit Bryant dans sa très-savante Mythologie, – cependant nous nous oublions sans cesse au point d'en tirer des inductions comme de réalités existantes. —Je veux dire que la perception purement sensitive de la gravitation, telle que nous la connaissons sur la Terre, induit l'humanité en fantaisie et la fait croire à une concentralisation, à une sorte de spécialité terrestre; – qu'elle a toujours incliné vers cette fantaisie les intelligences même les plus puissantes, – les détournant perpétuellement, quoique imperceptiblement, de la caractéristique réelle du principe; les ayant empêchées jusqu'à l'époque présente de saisir même un aperçu de cette vérité vitale qui se trouve dans une direction diamétralement opposée, – derrière les caractéristiques essentielles du principe, qui sont, non pas la concentralisation ou la spécialité, mais l'universalité et la diffusion. Cette vérité vitale est l'Unité, prise comme source du phénomène.

Permettez-moi de répéter la définition de la gravitation: Chaque atome, dans chaque corps, attire chaque autre atome, appartenant au même corps ou appartenant à tout autre corps, avec une force qui varie en raison inverse des carrés des distances de l'atome attirant et de l'atome attiré.

Que le lecteur s'arrête ici un moment avec moi pour contempler la miraculeuse, ineffable et absolument inimaginable complexité de rapports impliquée dans ce fait, que chaque atome attire chaque autre atome, —impliquée seulement dans ce fait de l'attraction, étant écartée la question de la loi ou du mode suivant lesquels l'attraction se manifeste, – impliquée dans ce fait unique que chaque atome attire plus ou moins chaque autre atome, dans une immensité d'atomes telle, que toutes les étoiles qui entrent dans la constitution de l'Univers peuvent être à peu près comparées pour le nombre aux atomes qui entrent dans la composition d'un boulet de canon.

Eussions-nous simplement découvert que chaque atome tendait vers un point favori, vers quelque atome particulièrement attractif, nous serions encore tombés sur une découverte qui, en elle-même, aurait suffi pour accabler notre esprit; – mais quelle est cette vérité que nous sommes actuellement appelés à comprendre? C'est que chaque atome attire chaque autre atome, sympathise avec ses plus délicats mouvements, avec chaque atome et avec tous, toujours, incessamment, suivant une loi déterminée dont la complexité, même considérée seulement en elle-même, dépasse absolument les forces de l'imagination humaine. Si je me propose de mesurer l'influence d'un seul atome sur l'atome son voisin dans un rayon solaire, je ne puis pas accomplir mon dessein sans d'abord compter et peser tous les atomes de l'Univers et définir la position précise de chacun à un moment particulier de la durée. Si je m'avise de déplacer, ne fût-ce que de la trillionième partie d'un pouce, le grain microscopique de poussière posé maintenant sur le bout de mon doigt, quel est le caractère de l'action que j'ai eu la hardiesse de commettre? J'ai accompli un acte qui ébranle la Lune dans sa marche, qui contraint le Soleil à n'être plus le soleil, et qui altère pour toujours la destinée des innombrables myriades d'étoiles qui roulent et flamboient devant la majesté de leur Créateur.

De telles idées, de telles conceptions, – pensées monstrueuses qui ne sont plus des pensées, rêveries de l'âme plutôt que raisonnements ou même considérations de l'intellect, – de telles idées, je le répète, sont les seules que nous puissions réussir à créer en nous dans tous nos efforts pour saisir le grand principe de l'Attraction.

Mais maintenant, avec de telles idées, avec une telle vision, franchement acceptée, de la merveilleuse complexité de l'Attraction, que toute personne, capable de réfléchir sur de pareilles matières, s'applique à imaginer un principe adaptable aux phénomènes observés, – ou la condition qui leur a donné naissance.

Une si évidente fraternité des atomes n'indique-t-elle pas une extraction commune? Une sympathie si victorieuse, si indestructible, si absolument indépendante, ne suggère-t-elle pas l'idée d'une source, d'une paternité commune? Un extrême ne pousse-t-il pas la raison vers l'extrême son contraire? L'infini dans la division ne se rapporte-t-il pas à l'absolu dans l'individualité? Le superlatif de la complexité ne fait-il pas deviner la perfection dans la simplicité? Je veux dire, non pas seulement que les atomes, comme nous les voyons, sont divisés ou qu'ils sont complexes dans leurs rapports, mais surtout qu'ils sont inconcevablement divisés et inexprimablement complexes; c'est de l'extrême des conditions que je veux parler maintenant, plutôt que des conditions elles-mêmes. En un mot, n'est-ce pas parce que les atomes étaient, à une certaine époque très-ancienne, quelque chose de plus même qu'un assemblage, —n'est-ce pas parce que, originellement, donc normalement, ils étaient Un, que maintenant en toutes circonstances, sur tous les points, dans toutes les directions, par tous les modes de rapprochement, dans tous les rapports et à travers toutes les conditions, ils s'efforcent de retourner vers cette unité absolue, indépendante et inconditionnelle?

Ici, quelqu'un demandera peut-être: «Pourquoi, puisque c'est vers l'Unité que ces atomes s'efforcent de retourner, ne jugeons-nous pas et ne définissons-nous pas l'Attraction une simple tendance générale vers un centre?– Pourquoi, particulièrement, vos atomes, les atomes que vous nous donnez comme ayant été irradiés d'un centre, ne retournent-ils pas tous à la fois, en ligne droite, vers le point central de leur origine?»

Je réponds qu'ils le font, ainsi que je le montrerai clairement; mais que la cause qui les y pousse est tout à fait indépendante du centre considéré comme tel. Ils tendent tous en ligne droite vers un centre, à cause de la sphéricité selon laquelle ils ont été lancés dans l'espace. Chaque atome, formant une partie d'un globe généralement uniforme d'atomes, trouve naturellement plus d'atomes dans la direction du centre que dans toute autre direction; c'est donc dans ce sens qu'il est poussé, mais il n'y est pas poussé parce que le centre est le point de son origine. Il n'est pas de point auquel les atomes se rallient. Il n'est pas de lieu, soit dans le concret, soit dans l'abstrait, auquel je les suppose attachés. Rien de ce qui peut s'appeler localité ne doit être conçu comme étant leur origine. Leur source est dans le principe Unité. C'est là le père qu'ils ont perdu. C'est là ce qu'ils cherchent toujours, immédiatement, dans toutes les directions, partout où ils peuvent le trouver, même partiellement; apaisant ainsi, dans une certaine mesure, leur indestructible tendance, tout en faisant route vers leur absolue satisfaction finale.