Nibiru Approche

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Nassiriya — Le dîner

Après que le sénateur eut brusquement mit fin à la conversation, ils continuèrent tous les trois à regarder un moment l’écran devant eux, qui affichait des dessins abstraits multicolores se croisant dans un mouvement sans fin.

— Qu’est-ce qu’on fait maintenant ? demanda le grand maigre, mettant fin à cette espèce d’hypnose collective.

— Moi j’aurais une idée, répondit le gros. Ça fait un bon moment qu’on ne s’est rien mis sous la dent et je vois des burgers partout.

— Et où penses-tu trouver un burger à cette heure-ci ?

— Je ne sais pas, mais ce que je sais c’est que si je ne mange pas tout de suite, je vais m’évanouir.

— Oh, le pauvre, il va s’évanouir, commenta le maigre en contrefaisant une voix d’enfant.

Puis son intonation changea :

— Avec toutes les réserves que tu as sur les hanches, tu pourrais rester un mois sans manger.

— Ok, arrêtez tous les deux avec ces bêtises, s’écria le général, irrité. Nous devons arrêter un plan d’action.

— Mais moi je réfléchis mal, l’estomac vide, dit tout bas le gros.

— D’accord, s’écria Campbell, en levant les mains pour indiquer qu’il renonçait. Allons manger quelque chose. On cherchera un plan à table, de toute façon, on a encore pas mal de temps avant l’arrivée du sénateur.

— Voilà qui est parler, Général, s’écria le gros, satisfait. Je connais un petit endroit pas mal du tout, où ils font un magnifique ragoût de mouton aux patates, carottes et petits pois, en sauce curry.

— Eh bien je dois avouer qu’après cette description détaillée, j’ai un peu faim moi aussi, dit le maigre en se frottant les mains.

— C’est bon, vous m’avez convaincu, ajouta le général en se levant. Allons-y, mais tâchons de ne pas nous faire prendre. Même s’ils ne s’en sont pas encore rendu compte, je suis bel et bien un évadé.

— Et pas nous, peut-être ? répliqua le maigre. Nous nous sommes échappés du camp, et ils doivent nous chercher partout. Ça ne fait rien, on n’a qu’à s’en fiche pour l’instant.

Quelques minutes plus tard, une voiture sombre avec trois personnages louches à son bord filait dans la nuit, dans les rues presque désertes de la ville, soulevant sur son passage un nuage de fine poussière.

— Nous y sommes, c’est là ! s’écria le gros, assis à l’arrière. C’est un peu tard, mais je connais le propriétaire. Il n’y aura pas de problème.

Le maigre, au volant, chercha une place pour garer la voiture. Il fit le tour du pâté de maisons, puis se glissa sous l’auvent branlant d’une petite bicoque abandonnée. Il descendit rapidement de la voiture, et, circonspect, observa attentivement les alentours. Il n’y avait personne.

Il fit le tour de la voiture, ouvrit la portière passager et dit :

— Tout est tranquille, mon Général. Nous pouvons y aller.

Le gros descendit lui aussi de la voiture et se dirigea à grands pas vers l’entrée principale du restaurant. Il essaya de tourner la poignée, sans résultat. La porte était fermée, mais il y avait encore de la lumière à l’intérieur. Il essaya alors de regarder à travers la fenêtre, mais l’épaisse tenture de couleur ne lui permit pas de voir grand chose. Sans perdre davantage de temps, il se mit à frapper énergiquement, et ne cessa que quand il vit un petit homme, aux cheveux noirs et bouclés, apparaître derrière la tenture.

— Mais qui diable… s’exclamait-il, très irrité, mais il reconnut son corpulent ami, évita de terminer sa phrase et ouvrit.

— Ah, mais c’est toi. Mais qu’est-ce que tu fais ici à cette heure-ci ? Et qui sont ces deux messieurs ?

— Eh, vieux larron, comment vas-tu ? Ce sont deux amis et nous avons tous les trois une faim de loup.

— Mais le restaurant est fermé, j’ai déjà nettoyé la cuisine et j’allais partir.

— Je pense que cet autre ami sera plus convaincant que moi, dit-il en lui faisant voleter sous le nez un billet de cent dollars.

— Eh bien, en effet, je dois dire qu’il sait s’y prendre, répondit le petit homme, s’emparant rapidement du billet et le faisant disparaître dans la poche de sa chemise.

— Je vous en prie, entrez donc, ajouta-t-il en ouvrant grand la porte et en s’inclinant légèrement.

Après avoir jeté un rapide coup d’œil derrière eux pour s’assurer que personne ne les observait, les trois hommes se glissèrent l’un après l’autre dans le petit restaurant.

Il était organisé en deux ambiances différentes et ne semblait pas être particulièrement entretenu. Le sol était en briques sombres et rugueuses. Dans la pièce la plus grande, trois tables basses et rondes, posées chacune sur un tapis usé et aux couleurs largement passées, étaient entourées de coussins également en mauvais état. Dans l’autre pièce, en revanche, l’ameublement était d’un style un peu plus occidental et semblait même beaucoup plus « intime ». D’amples tentures aux couleurs chaudes recouvraient les murs. L’éclairage était tamisé, et l’atmosphère nettement plus accueillante. Deux petites tables avaient déjà été dressées, prêtes pour le lendemain. Sur chacune d’elle étaient posées une nappe d’un vert foncé aux broderies bariolées, des serviettes assorties, des assiettes de service en céramique aux bords argentés, des fourchettes à gauche, des cuillers et des couteaux à droite, et au centre, une longue bougie jaune foncé sur un petit bougeoir de pierre noire.

— On peut s’installer là-bas ? demanda le gros qui indiquait la petite salle de sa main épaisse.

Sans répondre, l’homme bouclé bondit vers la petite salle, rapprocha les deux tables, plaça les chaises, et, après un grand salut de la tête et un geste théâtral des bras, leur dit :

— Je vous en prie, Messieurs, vous serez mieux comme ça.

Ils s’installèrent tous trois autour de la table, et le gros dit :

— Prépare-nous ta spécialité et amène-nous trois bières en attendant.

Puis, sans lui laisser la possibilité de répliquer :

— Ne fais pas le malin. Je sais que tu en as plusieurs caisses, cachées quelque part.

Le général attendit que le propriétaire file en cuisine, puis il revint sur la conversation qu’ils avaient eue plus tôt.

— Le sénateur est un homme sans scrupules. Nous devons faire très attention à lui. Si quelque chose devait aller de travers, il n’hésiterait pas un instant à nous envoyer quelqu’un qui nous ferait la peau.

— Nous voilà bien, commenta le gros. On dirait que tout le monde nous aime à la folie, ici.

— Essayons de faire le boulot de notre mieux et il ne nous arrivera rien, affirma le maigre, qui avait gardé le silence jusqu’alors. Je connais bien ce genre de personnages. Si on ne lui fait pas de problèmes et qu’on obéit aux ordres, tout se passe bien, et chacun de nous aura la récompense qu’il mérite.

— Oui, une bonne petite balle au milieu du front, commenta tout bas le gros.

— Allez, ne fais pas ton oiseau de mauvais augure. Pour l’instant, on s’en est bien tirés, non ?

— Oui, pour l’instant.

Pendant ce temps, caché dans sa cuisine, le propriétaire du restaurant parlait à voix basse au téléphone, en arabe.

— C’est lui, je te dis que c’est lui.

— C’est incroyable qu’il soit venu chez toi sans escorte.

— Il y a deux autres hommes. Il y en a un que je connais très bien, et je suis sûr qu’il appartient à une organisation bizarre qui pourrait être liée à lui, d’une manière ou d’une autre.

— Tu pourrais prendre une photo et me l’envoyer ? Je ne voudrais pas préparer une armée pour me rendre compte qu’il s’agit d’une banale confusion entre deux personnes.

— D’accord, je vais voir ce que je peux faire. Laisse-moi quelques minutes.

L’homme coupa la communication, activa la caméra de son téléphone, le glissa dans la poche de sa chemise de façon à ce que l’objectif dépasse légèrement, et posa trois grands verres sur un plateau d’aluminium. Il déboucha trois bouteilles de bière et en disposa une à côté de chaque verre. Il souleva le plateau de sa main droite, respira un grand coup et se dirigea vers la table occupée par les trois convives.

— J’espère que cette marque vous conviendra, dit-il en servant les boissons. Nous n’avons malheureusement pas beaucoup de choix. Ici, les lois sont très sévères en matière d’alcool.

— Oui, oui, ne t’inquiète pas, dit le gros en attrapant une bouteille qu’il vida dans son verre, le remplissant de mousse.

L'homme, mettant tout son soin à se placer juste en face du général, prit un verre, l’inclina légèrement et y versa délicatement une petite moitié de la bouteille. Puis il fit de même avec le verre du maigre, et s’écria :

— C’est comme ça qu’on fait. Ce n’est pas un pauvre Irakien qui va devoir apprendre à trois Américains comment on sert la bière, non ?

Un gros éclat de rire spontané partit de la table, et les trois convives, levant leur verre, les firent tinter dans un toast qui devait leur porter chance.

Le propriétaire, après avoir ébauché son salut habituel, se retira en cuisine. Dès qu’il en eut franchi le seuil et qu’il se fut assuré que personne ne le regardait, il regarda son portable pour vérifier la qualité du film. Les images tremblaient un peu, mais le visage épais du général Campbell était bien visible. Il envoya aussitôt le film au numéro qu’il avait appelé auparavant et attendit patiemment. Moins d’une minute après, la légère vibration de son téléphone l’avertit d’un appel.

— C’est lui, dit la voix à l’autre bout du fil. On sera là dans une heure au plus tard. Ne les laisse partir sous aucun prétexte.

 

— Ils viennent juste d’arriver et ils n’ont pas encore commencé à manger. Vous avez largement le temps.

Et il raccrocha.

Vaisseau Théos — L'amiral

Élisa regardait encore l’étrange petit objet qu’Atzakis avait laissé tomber dans sa main, quand la porte de la capsule de transport interne numéro six s’ouvrit. Pétri en sortit, rayonnant, le téléphone du colonel à la main.

— J’ai réussi ! s’exclama-t-il. Enfin, j’espère.

Il rejoignit rapidement les autres au centre du pont de commandement, et expliqua :

— C’est un système franchement dépassé, mais je pense que j’ai compris le principe de fonctionnement. Je me suis connecté à un de ces satellites qui tournent autour de la planète sur une orbite plus basse que la nôtre et je crois qu’on peut maintenant passer un « appel ».

— Tu es le meilleur, compagnon, s’écria Atzakis. J’étais sûr que tu réussirais.

— Avant de crier victoire, voyons si ça fonctionne vraiment, dit Jack, récupérant son téléphone des mains de l’extraterrestre.

Le colonel en observa attentivement l’écran, puis dit, émerveillé :

— Incroyable, il y a trois barres de réseau.

— Allez, essaie ! lui dit Élisa, tout excitée.

Jack parcourut rapidement son répertoire et trouva le numéro de l’amiral Wilson. Un doute l’assaillit cependant :

— Mais quelle heure est-il à Washington ?

— Voyons, il devrait être deux heures et demi, répondit Élisa après avoir jeté un coup d’œil à sa montre.

— C’est bon, j’essaie, alors.

Jack prit une profonde inspiration puis appuya sur la touche « APPEL ».

Le téléphone sonnait. Incroyable.

Il attendit patiemment, et ce n’est qu’au bout de la septième sonnerie qu’une voix rauque et profonde répondit :

— Amiral Benjamin Wilson, qui est à l’appareil ?

— Amiral. C’est Jack Hudson. Vous m’entendez ?

— Bien sûr, mon garçon, je t’entends parfaitement. C’est un plaisir d’entendre ta voix depuis tout ce temps. Tout va bien ?

— Amiral… Oui, oui, merci.

Jack était extrêmement embarrassé et ne savait pas par où commencer.

— Je vous dérange pour une question de la plus grande importance, mais qui a quelque chose d’invraisemblable.

— Bigre, mon garçon, ne me mets pas sur le grill comme ça. Que diable se passe-t-il ?

— Eh bien, ce n’est pas facile à expliquer. Vous me faites confiance, n’est-ce pas ?

— Mais évidemment, quelle question.

— Ce que je vais vous dire pourra vous sembler insensé, mais je vous assure que ce n’est que la pure vérité.

— Jack, si tu ne me dis pas tout de suite de quoi il s’agit, mon pauvre vieux cœur pourrait s’arrêter.

— D’accord.

Jack fit une petite pause, puis dit d’une seule traite :

— Je me trouve en ce moment en orbite autour de la Terre. Je suis sur un vaisseau extraterrestre et j’ai des informations terribles à communiquer directement au président des États-Unis. Vous êtes la seule personne en qui j’ai confiance et qui pourrait me mettre en contact avec lui. Je vous jure sur feu mon cher père que ce n’est pas une plaisanterie.

De très longues secondes passèrent, pendant lesquelles aucun son ne sortit du haut-parleur du téléphone. Jack eut un instant peur que l’amiral n’ait eu une attaque. Puis la voix rauque à l’autre bout du fil dit :

— Mais tu m’appelles vraiment de là-haut ? Et comment diable fais-tu ?

Wilson est un type incroyable. Au lieu de s’inquiéter des extraterrestres, il se demande comment je peux utiliser mon portable d’ici… Exceptionnel…

— Eh bien, avec leur technologie, ils ont réussi à établir une espèce de connexion avec un satellite de télécommunications. Je ne peux pas vous en dire beaucoup plus.

— Des extraterrestres. Mais d’où viennent-ils ? Et qu’est-ce que c’est que cette catastrophe imminente ? Et puis pourquoi ils t’ont emmené, précisément toi ?

— Amiral, c’est une longue histoire, et j’espère vivement avoir le temps de vous la raconter, mais pour l’instant le plus important est que vous me mettiez en contact avec le président.

— Mon garçon, j’ai une confiance aveugle en toi, mais pour que notre cher président digère une chose pareille, il me faudra un peu plus que ton coup de fil.

— Je m’en doutais, et c’est normal, répondit Jack. Et si je vous disais qu’en ce moment, vous êtes assis sur un fauteuil marron foncé et que vous avez un exemplaire du New York Times sur les genoux, mes affirmations vous sembleraient plus convaincantes ?

Pétri avait réussi à relever les coordonnées de l’amiral par le signal qu’émettait son téléphone, avait positionné le Théos au zénith de la ville et avait activé les senseurs à courte portée en les pointant directement sur la source des émissions.

— Par tous les diables, s’écria l’amiral en sautant sur ses pieds et en faisant tomber le journal. Mais comment le sais-tu ? Il ne peut pas y avoir de caméras dissimulées ici. Des détecteurs passent mon bureau au peigne fin tous les jours.

— En fait, ce n’est pas avec une « caméra » que nous arrivons à vous voir. Disons que c’est un système de vision absolument incroyable. Nous sommes à 50 000 kilomètres de la Terre et je pourrais lire votre journal sans difficultés. Je pourrais même vous dire quel est le rythme de vos pulsations cardiaques en ce moment.

— Tu plaisantes, n’est-ce pas ?

Jack jeta un coup d’œil à Pétri qui changea aussitôt le mode de visualisation.

L’amiral leur apparaissait maintenant sous la forme d’une silhouette rougeâtre, avec des nuances jaune clair et gris foncé. En haut à droite de l’écran, d’autres chiffres apparurent. Jack les lut et annonça :

— Votre cœur bat actuellement à quatre-vingt-dix-huit pulsations par minute, et votre tension artérielle est de 135/90 mm de Hg.

— Eh, je sais, elle est un peu élevée. Je prends même des médicaments pour la réguler, mais ça ne marche pas toujours. Tu sais, l’âge…

Il s’arrêta un instant et s’écria :

— Mais tout cela est absolument incroyable, c’est stupéfiant. Tu penses pouvoir faire la même chose avec le président ?

— Je crois que oui, répondit Jack en cherchant du regard la confirmation de Pétri, qui se contenta d’approuver légèrement de la tête.

— Est-ce que tu pourrais au moins me dire quelques mots de ce qui doit se passer ? Vu qu’ils sont venus de Dieu sait où pour nous en informer, ça doit être bigrement sérieux.

— Oui, il est normal que vous le sachiez.

Élisa l’incitait à poursuivre par de grands gestes de la main et des grimaces étranges de la bouche.

— Leur planète s’approche très rapidement de la nôtre. Un de ses satellites, Kodon, en l’occurrence, nous effleurera dans un peu moins de sept jours et pourrait causer une série de bouleversements indicibles. Même notre orbite et celle de la Lune pourraient être touchées. Sur notre planète, des marées successives pourraient submerger les terres émergées et les eaux pourraient balayer des millions et des millions de personnes. En bref, une catastrophe.

L'amiral était resté sans voix. Il retomba lourdement sur son fauteuil marron, et ne put que murmurer, d’un filet de voix :

— Que le diable m’emporte.

— En fait, nos amis ici présents seraient heureux de mettre à notre disposition un système en mesure de limiter la majeure partie de ces effets néfastes, mais c’est une procédure très risquée et qu’ils n’ont encore jamais complètement expérimentée. De plus, même si tout devait se passer pour le mieux, nous ne pourrions pas subir l’événement sans dommages. Une partie de l’influence planétaire, même réduite, ne pourra malheureusement pas être endiguée. Nous devrions donc nous organiser pour limiter au maximum les dégâts et les pertes.

— Mon garçon, répondit faiblement l’amiral. Je crois que le président doit être immédiatement informé de ce que tu viens de me dire. J’espère seulement, pour toi et pour moi, que ce n’est pas une plaisanterie, parce nous ne nous en sortirions ni l’un ni l’autre ; même si j’espère de tout cœur que ce soit le cas. Peut-être que je me suis simplement endormi dans mon fauteuil et que je vais bientôt me réveiller et me rendre compte que tout ça n’est rien qu’un affreux cauchemar.

— J’aimerais beaucoup, Amiral. Mais hélas, tout cela n’est pas un mauvais rêve, mais la réalité crue. Je m’en rapporte à vous pour que cette information parvienne au président.

— Ok. Laisse-moi juste un peu de temps pour trouver le bon canal. Comment pourrai-je te recontacter ?

— Je pense que vous pouvez tout simplement me rappeler à ce numéro, dit Jack en cherchant le regard de Pétri qui haussa les épaules, incertain.

— Ça devrait marcher, reprit-il. De toute façon, si je n’ai pas de vos nouvelles d’ici une heure, c’est moi qui vous rappelle, d’accord ?

— D’accord, à plus tard.

— Je vous remercie infiniment, dit le colonel, et il mit fin à la communication.

Il resta quelques instants absolument immobile, le regard perdu dans le vide, puis dit très tranquillement aux autres, pendus à ses lèvres :

— Il va nous aider.

— Espérons-le, répondit Élisa, chancelante. Je pense que ce ne sera pas facile de convaincre le président qu’il ne s’agit pas d’un canular.

— Il n’y a que lui qui puisse réussir un tel exploit. Laissons-lui juste un peu de temps.

Puis, s’adressant à Pétri :

— Avec tes “ senseurs ”, ou n’importe laquelle de vos inventions diaboliques, essaie de mettre au point un beau petit spectacle. Il va falloir qu’on les étonne avec quelque chose d’exceptionnel qui puisse tous les laisser bouche bée.

— Je m’en occupe, répondit Pétri avec un petit sourire sardonique. Ce ne sont pas les effets spéciaux qui nous manquent.

— Si tu veux, je peux t’indiquer la position exacte de la Maison Blanche, résidence officielle du président des États-Unis d’Amérique, et celle du Pentagone, qui est le siège du quartier général du Département de la Défense.

— Alors -dit Élisa en s’approchant d’Atzakis- pendant qu’ils s’amusent tous les deux à effrayer ces malheureux, j’aimerais que tu m’expliques maintenant ce que c’est que cette chose bizarre que tu m’as donnée tout à l’heure.

— Comme je te le disais, je pense que cela peut être la solution à tous vos problèmes de déchets.

— Tu ne vas pas me dire qu’il me suffira de l’allumer pour dématérialiser tout le plastique qui se balade, non ?

— Malheureusement, nous n’avons pas encore inventé une telle chose, mais ça, ça pourrait vous aider à le remplacer.

— Je suis tout ouïe, et elle le lui tendit.

— Cette petite chose n’est autre qu’un mini-générateur de champs de forces. Grâce à une programmation toute simple, il peut prendre la forme qu’on veut.

— Je ne comprends pas.

— Je vais te montrer. Ouvre la main.

Atzakis prit délicatement le petit rectangle foncé entre le pouce et l’index et le posa sur la paume ouverte d’Élisa. Moins d’une seconde après, comme par enchantement, un magnifique vase de mille couleurs différentes se matérialisa dans sa main.

— Mais que diable…

Effrayée, Élisa retira instinctivement sa main et fit tomber le vase qui tomba par terre en rebondissant çà et là, mais sans se casser, et surtout, sans faire aucun bruit.

— Excuse-moi -ne put que murmurer Élisa, désolée- je ne m’y attendais pas du tout.

Et elle se pencha pour le ramasser. Elle le prit et se mit à l’observer sous toutes les coutures. Malgré une surface absolument lisse, la lumière ne s’y reflétait pas du tout. Au toucher, l’objet était un peu plus froid que ce à quoi on aurait pu s’attendre, et il ne semblait être fait dans aucun des matériaux qu’elle connaissait.

— C’est absolument incroyable. Mais comment as-tu fait ?

— Tout le mérite lui revient, répondit Atzakis en indiquant le petit objet noir qui semblait s’être enchâssé à la base du vase. C’est lui qui génère un champ de forces qui prend la forme que tu vois.

— Et tu pourrais en faire un en forme de bouteille ?

— Bien sûr, dit Atzakis en souriant, regarde.

Sur ces mots, il posa la pulpe de son index sur le petit rectangle et le vase disparut. Il le pressa de nouveau en y appuyant le pouce, et une élégante bouteille bleu cobalt, au col long et fin, surgit du néant.

Élisa était restée bouche bée et mit quelques instants à reprendre ses esprits. Puis, sans détacher les yeux de l’objet créé, elle dit, d’une voix brisée par l’émotion :

 

— Jack, viens, tu dois absolument voir ça.

Le colonel, qui avait donné toutes ses indications à Pétri pour le repérage des deux objectifs, se tourna vers elle et la rejoignit d’un pas tranquille. Il regarda distraitement l’objet qu’Atzakis tenait à la main, et demanda d’un air ennuyé :

— Une bouteille ? Et qu’y a-t-il de si intéressant ?

— Une bouteille, parfaitement, répliqua Élisa, irritée. Mais qui était un magnifique vase de couleur jusqu’à un instant.

— Allez, ne te moque pas de moi.

— Zak, montre-lui.

L'extraterrestre exécuta la même opération que précédemment, et cette fois-ci, ce fut une énorme sphère noire comme l’encre qui apparut entre ses mains.

— Oh, misère ! s’écria le colonel en faisant un bond en arrière.

— Ça, ça te dit quelque chose, non ? demanda Atzakis en entourant de ses bras la boule de presque un mètre de diamètre.

— Oui, oui, s’exclama le Professeur, tout excité. C’est la même que celle que nous avons trouvée enterrée dans le camp, dans la mystérieuse boîte de pierre.

— Et il y en avait trois autres, ajouta le colonel, qui ont ensuite servi de base pour l’atterrissage du vaisseau.

— C’est bien ça, confirma Atzakis. Nous les avions laissées la dernière fois pour nous servir de repère pour la récupération de la cargaison de plastique.

— Ouah, s’écria Élisa, tout s’éclaircit petit à petit.

— Excuse ma question idiote, dit Jack en s’adressant à l’extraterrestre. Mais si nous voulions les utiliser comme contenants, mettons pour l’eau, par exemple, nous devrions aussi inventer un système pratique d’ouverture et de fermeture. Comment pourrions-nous faire ?

— Très simple. Il suffira d’en utiliser un autre et de lui donner une forme de bouchon.

— Quel idiot je suis. Je n’y avais pas pensé, s’écria Jack en se donnant une tape sur le front.

— Comment appelez-vous ces sympathiques petites choses ? demanda Élisa, intriguée.

— Sur notre planète, nous les appelons Shans, répondit Atzakis, en faisant disparaître la sphère et en lui rendant le petit rectangle noir.

— Alors ça, c’est un petit Shan, dit Élisa en souriant, et en le regardant attentivement entre ses doigts. Je peux essayer d’en faire quelque chose moi aussi ?

— Eh bien, ce n’est pas aussi simple que ça. Moi j’y arrive, parce que j’utilise mon implant N^COM pour le programmer en temps réel. Donc soit tu t’en fais implanter un toi aussi, soit tu utilises…

Il s’interrompit et se mit à fouiller dans un tiroir sur le côté de la console. Quelques secondes plus tard, il en tira une espèce de petit casque très semblable à celui dont ils s’étaient précédemment servis pour respirer, et termina sa phrase en le lui tendant :

— Ça.

— Je dois me le mettre sur la tête ?

— Bien sûr.

— Ça ne va pas me faire griller le cerveau, pas vrai ?

Atzakis sourit. Il lui prit doucement les mains et l’aida à le placer correctement.

— Et maintenant ?

— Prends le Shan entre tes doigts et pense à un objet, n’importe lequel. Ne te soucie pas des dimensions. Il est programmé pour ne pas pouvoir se transformer en quelque chose de plus d’un mètre cube.

Élisa ferma les yeux et se concentra. Quelques secondes plus tard, un magnifique chandelier argenté se matérialisait entre ses mains.

— Mon Dieu -s’exclama-t-elle, stupéfaite- c’est absurde, c’est incroyable.

Elle ne parvenait pas à contenir ses émotions. Elle ne cessait de retourner l’objet entre ses mains, le scrutant dans tous ses détails.

— Je l’avais imaginé exactement comme ça. Ce n’est pas possible, je rêve.