Buch lesen: «Le Visage de la Mort»
LE VISAGE DE LA MORT
(LES MYSTÈRES DE ZOE PRIME — TOME 1)
B L A K E P I E R C E
Blake Pierce
Blake Pierce a été couronné meilleur auteur et bestseller d'après USA Today pour Les Enquêtes de RILEY PAIGE - seize tomes (à suivre), la Série Mystère MACKENZIE WHITE - treize tomes (à suivre) ; Les Enquêtes d'AVERY BLACK - six tomes ; Les Enquêtes de KERI LOCKE - cinq tomes ; RILEY PAIGE - LA GENESE - cinq tomes (à suivre) ; la Série Mystère KATE WISE - six tomes (à suivre) ; la Série Thriller Psychologique CHLOE FINE - cinq tomes (à suivre) ; la Série Thriller Psychologique JESSIE HUNT - cinq tomes (à suivre) ; la Série Thriller Psychologique FILLE AU PAIR - deux tomes (à suivre) et Les Enquêtes de ZOE PRIME - deux tomes (à suivre)
Lecteur passionné, fan de thriller et romans à suspense depuis son plus jeune âge, Blake adore vous lire, rendez-vous sur www.blakepierceauthor.com – Restons en contact !
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LIVRES PAR BLAKE PIERCE
LES MYSTÈRES DE ADÈLE SHARP
LAISSÈ POUR MORT (Volume 1)
CONDAMNÈ À FUIR (Volume 2)
CONDAMNÈ À SE CACHER (Volume 3)
LA FILLE AU PAIR
PRESQUE DISPARUE (Livre 1)
PRESQUE PERDUE (Livre 2)
PRESQUE MORTE (Livre 3)
LES MYSTÈRES DE ZOE PRIME
LE VISAGE DE LA MORT (Tome 1)
LE VISAGE DU MEURTRE (Tome 2)
LE VISAGE DE LA PEUR (Tome 3)
SÉRIE SUSPENSE PSYCHOLOGIQUE JESSIE HUNT
LA FEMME PARFAITE (Volume 1)
LE QUARTIER IDÉAL (Volume 2)
LA MAISON IDÉALE (Volume 3)
LE SOURIRE IDÉALE (Volume 4)
LE MENSONGE IDÉALE (Volume 5)
SÉRIE SUSPENSE PSYCHOLOGIQUE CHLOE FINE
LA MAISON D’À CÔTÉ (Volume 1)
LE MENSONGE D’UN VOISIN (Volume 2)
VOIE SANS ISSUE (Volume 3)
LE VOISIN SILENCIEUX (Volume 4)
DE RETOUR À LA MAISON (Volume 5)
SÉRIE MYSTÈRE KATE WISE
SI ELLE SAVAIT (Volume 1)
SI ELLE VOYAIT (Volume 2)
SI ELLE COURAIT (Volume 3)
SI ELLE SE CACHAIT (Volume 4)
SI ELLE S’ENFUYAIT (Volume 5)
SI ELLE CRAIGNAIT (Volume 6)
LES ORIGINES DE RILEY PAIGE
SOUS SURVEILLANCE (Tome 1)
ATTENDRE (Tome 2)
PIEGE MORTEL (Tome 3)
ESCAPADE MEURTRIERE (Tome 4)
LA TRAQUE (Tome 5)
LES ENQUÊTES DE RILEY PAIGE
SANS LAISSER DE TRACES (Tome 1)
RÉACTION EN CHAÎNE (Tome 2)
LA QUEUE ENTRE LES JAMBES (Tome 3)
LES PENDULES À L’HEURE (Tome 4)
QUI VA À LA CHASSE (Tome 5)
À VOTRE SANTÉ (Tome 6)
DE SAC ET DE CORDE (Tome 7)
UN PLAT QUI SE MANGE FROID (Tome 8)
SANS COUP FÉRIR (Tome 9)
À TOUT JAMAIS (Tome 10)
LE GRAIN DE SABLE (Tome 11)
LE TRAIN EN MARCHE (Tome 12)
PIÉGÉE (Tome 13)
LE RÉVEIL (Tome 14)
BANNI (Tome 15)
MANQUE (Tome 16)
UNE NOUVELLE DE LA SÉRIE RILEY PAIGE
RÉSOLU
SÉRIE MYSTÈRE MACKENZIE WHITE
AVANT QU’IL NE TUE (Volume 1)
AVANT QU’IL NE VOIE (Volume 2)
AVANT QU’IL NE CONVOITE (Volume 3)
AVANT QU’IL NE PRENNE (Volume 4)
AVANT QU’IL N’AIT BESOIN (Volume 5)
AVANT QU’IL NE RESSENTE (Volume 6)
AVANT QU’IL NE PÈCHE (Volume 7)
AVANT QU’IL NE CHASSE (Volume 8)
AVANT QU’IL NE TRAQUE (Volume 9)
AVANT QU’IL NE LANGUISSE (Volume 10)
AVANT QU’IL NE FAILLISSE (Volume 11)
AVANT QU’IL NE JALOUSE (Volume 12)
AVANT QU’IL NE HARCÈLE (Volume 13)
LES ENQUÊTES D’AVERY BLACK
RAISON DE TUER (Tome 1)
RAISON DE COURIR (Tome2)
RAISON DE SE CACHER (Tome 3)
RAISON DE CRAINDRE (Tome 4)
RAISON DE SAUVER (Tome 5)
RAISON DE REDOUTER (Tome 6)
LES ENQUETES DE KERI LOCKE
UN MAUVAIS PRESSENTIMENT (Tome 1)
DE MAUVAIS AUGURE (Tome 2)
L’OMBRE DU MAL (Tome 3)
JEUX MACABRES (Tome 4)
LUEUR D’ESPOIR (Tome 5)
SOMMAIRE
PROLOGUE
CHAPITRE UN
CHAPITRE DEUX
CHAPITRE TROIS
CHAPITRE QUATRE
CHAPITRE CINQ
CHAPITRE SIX
CHAPITRE SEPT
CHAPITRE HUIT
CHAPITRE NEUF
CHAPITRE DIX
CHAPITRE ONZE
CHAPITRE DOUZE
CHAPITRE TREIZE
CHAPITRE QUATORZE
CHAPITRE QUINZE
CHAPITRE SEIZE
CHAPITRE DIX-SEPT
CHAPITRE DIX-HUIT
CHAPITRE DIX-NEUF
CHAPITRE VINGT
CHAPITRE VINGT-ET-UN
CHAPITRE VINGT-DEUX
CHAPITRE VINGT-TROIS
CHAPITRE VINGT-QUATRE
CHAPITRE VINGT-CINQ
CHAPITRE VINGT-SIX
CHAPITRE VINGT-SEPT
CHAPITRE VINGT-HUIT
ÉPILOGUE
PROLOGUE
Linda se carra dans son siège, essayant de trouver une position confortable sur les vieux coussins usés. Le siège, qui avait supporté le poids d’innombrables employés de station-service au cours des quinze ou vingt dernières années, était en aussi bon état que le reste de l’endroit.
Elle avait un siège au moins. Et la télévision, même si elle était minuscule et si vieille qu’elle parvenait à peine à discerner les visages au milieu des interférences sur l’écran.
Linda soupira et tapota plusieurs fois le côté de la télévision afin d’essayer de rendre l’image plus nette. Elle attendait que sa série favorite commence et elle voulait au moins pouvoir distinguer quel personnage était lequel.
Au moins, il était peu probable qu’elle soit dérangée. Cette partie de l’ouest du Missouri n’était pas vraiment très fréquentée et elle restait parfois des heures sans voir le moindre clients. Il n’y avait aucun résident à plusieurs kilomètres à la ronde et la route avait été supplantée par une nouvelle autoroute qui permettait aux gens d’atteindre leur destination sans avoir à faire trop de détours. Ce n’était probablement plus qu’une question de temps avant que la station ne ferme, alors Linda profitait de sa tranquillité tant qu’elle le pouvait encore.
Le générique de sa série retentit, toujours aussi rassurant et familier malgré le son de mauvaise qualité qui lui donnait un côté métallique. Linda se tortilla de nouveau contre le dossier, essayant de se mettre le plus à l’aise possible, et prit un paquet de chips du présentoir derrière elle.
— Oh, Loretta, dit le personnage à l’écran. Comment as-tu pu me faire ça ? Ne sais-tu pas que nous sommes…
Le dialogue fut noyé par le carillon de la cloche au-dessus de la porte. Linda sauta sur ses pieds, trébuchant presque dans sa tentative pour donner l’impression qu’elle était attentive. Elle fourra d’un air coupable le paquet de chips ouvert sur une étagère sous le comptoir.
— Salut, dit le client en souriant.
Il semblait amusé, mais amical, presque comme s’ils partageaient une blague entre eux deux.
— Euh, est-ce que je pourrais utiliser vos toilettes ?
Il était plutôt agréable. C’était un homme mince à l’apparence d’un jeune garçon. Il devait avoir trente ans grand maximum. Linda l’apprécia immédiatement. Elle avait une espèce de sixième sens en ce qui concernait les clients. Elle savait toujours au premier coup d’œil s’ils allaient lui causer des ennuis ou non.
— Désolée, mon chou, dit-elle. Les toilettes sont réservées aux clients.
— Oh, dit-il.
Il fouilla la pièce du regard. Il y avait un présentoir de bonbons bon marché près du comptoir qui servait à attirer les enfants qui chercheraient ensuite à attirer l’attention de leurs parents.
— Je vais acheter ces bonbons.
Il prit un paquet de bonbons en sucre dur et le jeta délicatement sur le comptoir, juste devant elle. Il fouilla dans sa poche pour en sortir quelques pièces et le compte exact suivi le paquet.
— Et voilà, monsieur, dit Linda en poussant une des clés des toilettes vers lui. Les toilettes sont juste derrière le bâtiment. Vous n’avez qu’à sortir et faire le tour.
— Oh, merci, dit l’homme, prenant la clé et la tapotant contre son pouce tout en regardant le parking. Mais, euh. Est-ce que cela vous dérangerait de me montrer où c’est ?
Linda hésita. Sa série avait commencé et elle en avait déjà raté une bonne partie. Et bien qu’elle trouvât cet homme parfaitement gentil et normal — même beau, si elle avait eu dix ou quinze ans de moins — un petit doute tenace la taraudait. Devrait-elle vraiment abandonner le comptoir et lui montrer les toilettes ? Partir seule, dans le noir, avec un inconnu et hors de vue de la route ?
Oh, Linda, pensa-t-elle pour elle-même. Tu essayes seulement de trouver un moyen de regarder ta série plus longtemps. Allez, tire-toi de ta chaise, lève-toi et fais ton travail.
— Bien sûr, dit-elle, cependant toujours quelque peu réticente. Suivez-moi.
Le soleil s’était couché voilà peut-être une demi-heure, il n’était donc vraiment pas surprenant qu’il eût besoin d’aide pour trouver les toilettes. Il était difficile de se repérer la nuit dans un endroit que l’on ne connaissait pas. Linda commença à le guider dans la bonne direction, marchant sur les mauvaises herbes qui poussaient dans le béton.
— Cet endroit est vraiment désert, hein ? dit-il.
— Ouais, répondit Linda.
C’était une chose un peu étrange à dire dans le noir, non ? Il avait peut-être lui-même un peu peur et avait besoin d’être rassuré. Non pas que l’isolement ne lui plût plus qu’à lui.
— On n’a pas vraiment beaucoup de clients ces temps-ci.
— J’ai toujours pensé que les stations-service en disaient beaucoup sur un endroit. Il y a des petits signes, vous savez. Des motifs que l’on peut remarquer. Comme la richesse d’une communauté ou quelle genre de nourriture est populaire.
— Je suppose que je n’y avais jamais vraiment pensé.
Au fond d’elle, Linda n’en avait que faire de son explication de la complexité des stations-service à travers le pays. Elle voulait atteindre les toilettes et retourner à l’intérieur aussi rapidement que possible, sans que rien de bizarre ne se produise. Mais elle ne voulait pas se montrer impolie et lui dire cela.
— Oh, ouais. J’aime visiter différentes stations-service. Certaines sont vraiment gigantesques, vous savez. Puis certaines sont petites, déglinguée et reculée, comme celle-ci. Et on peut aussi en apprendre beaucoup sur les gens qui y travaillent.
Un frisson descendit le long de l’échine de Linda. Il parlait d’elle. Elle ne voulait pas lui demander ce qu’il pouvait apprendre sur elle, ou ce qu’il savait déjà. Elle ne pensait pas que cela lui plairait.
— C’est un drôle de travail, ici au milieu de nulle part, continua-t-il. Vous devez passer beaucoup de temps seule. Si vous avez besoin d’aide, eh bien, il doit être difficile d’en trouver. Seul un certain type de personnes accepte ce genre de travail. De là on peut prédire toute sortes de choses concernant le comportement en se basant sur les motifs. Comme par exemple, jusqu’où quelqu’un serait prêt à aller pour servir un client.
Linda accéléra le pas sur le sol sombre ; elle ressentait à présent le besoin de s’éloigner de lui. Se faire dire à quel point elle était vulnérable n’était pas quelque chose qu’elle avait envie d’entendre en ce moment. Cela fit descendre un autre frisson le long de son échine, alors même qu’elle se disait combien elle se montrait stupide. Elle sentit le métal dur de la clé de la porte d’entrée dans sa poche et elle la glissa entre deux de ses doigts, là où elle pourrait lui servir d’arme.
Elle ne dit mot. Elle ne voulait pas lui faire dire quelque chose d’autre — ou lui faire faire quelque chose. Bien qu’elle ne pût pas dire ce à quoi elle s’attendait, elle était certaine qu’elle ne voulait pas que cela se produise. Ils traversèrent le parking vide — la voiture du client devait être garée à l’avant, près des pompes.
— Et voilà les toilettes, là-bas, dit Linda en désignant la porte du doigt.
Elle n’avait pas particulièrement envie d’aller plus loin. S’il y allait seul, elle pourrait retourner à son comptoir, où il y avait un téléphone pour appeler à l’aide et des portes qu’elle pouvait verrouiller.
Le client ne dit rien, mais il sortit son paquet de bonbons et l’ouvrit. Il ne la regardait même pas, mais il semblait soigneusement concentré sur sa tâche alors qu’il retournait le paquet pour le vider.
Les bonbons sphériques colorés s’éparpillèrent et rebondirent sur le béton. Linda poussa un cri perçant et fit un pas en arrière malgré elle. Qui avait déjà entendu parler de quelqu’un renversant des bonbons sur le sol comme cela ? C’était seulement pour lui faire peur ou quoi ? Linda porta une main à sa poitrine, essayant de calmer son cœur qui battait la chamade.
— Regardez ça ! rit le client en montrant les bonbons du doigt. C’est toujours la même chose, vous savez ? Rien n’est jamais aléatoire. On obtient toujours les mêmes séquences et fractales, et il s’y cache toujours quelque chose. Même si on essaye de ne rien voir, notre cerveau s’accroche à une séquence, tout simplement.
Linda en avait assez entendu. Ce gars était dingue. Elle était toute seule, dans le noir, comme il s’était donné le mal de lui faire remarquer. Elle devait s’éloigner de lui, retourner au comptoir. Retourner où elle serait en sécurité.
Linda prit le chemin le plus rapide auquel elle put penser. Elle fit rapidement les derniers pas jusqu’aux toilettes et en ouvrit la porte pour lui, la lumière au-dessus de la porte s’allumant automatiquement.
— Oh ! dit le jeune homme. Là, regardez. Sur votre main. Une autre séquence.
Linda se figea et baissa les yeux vers ses taches de rousseur qui étaient maintenant visible dans la lumière orange pâle. L’attention qu’il prêtait à sa peau était comme un insecte, quelque chose dont elle voulait instinctivement se débarrasser.
— Je dois retourner dans le magasin, lâcha Linda. Laissez simplement la clé quand vous aurez fini, juste au cas où il y aurait d’autres clients.
Elle commença à se hâter vers l’avant de la station-service, vers la porte et la sécurité du comptoir. Il y avait quelque chose qui clochait chez ce jeune homme ; quelque chose de très étrange en effet, et elle ne voulait pas passer une seconde de plus en sa compagnie — même si cela signifiait retourner chez la clé seule plus tard. Tous les poils de sa nuque étaient hérissés et son cœur refusait de se calmer.
Elle devrait peut-être appeler quelqu’un. Elle pensa à son ex-mari, assis chez lui à des kilomètres de là, probablement en train de se détendre devant la télévision. Ou son patron, qui, de ce qu’elle savait, pourrait être au Canada tant elle le voyait souvent. Prendraient-ils le temps de répondre ? Et s’ils répondaient, que pourraient-ils faire pour l’aider ?
La police, peut-être ? Non — c’était sûrement excessif.
Linda trébucha presque sur un bonbon qui avait roulé plus loin que les autres et essaya de faire plus attention à où elle mettait les pieds, vérifiant le sol devant elle. Son cœur battait la chamade et elle pouvait entendre ses propres pas qui étaient bien trop bruyants alors qu’elle se précipitait en direction de l’angle du bâtiment. Elle aurait voulu pouvoir faire moins de bruit, aller plus vite, simplement atteindre les portes.
Elle courait presque, le souffle court. Elle tourna à l’angle, envahie d’une sensation de soulagement à la vue des portes familières devant elle.
Mais quelque chose la retenait — quelque chose qui se resserrait autour de son cou.
Les mains de Linda montèrent instinctivement, saisissant le fil de fer fin et tranchant qui lui coupa les doigts alors qu’elle s’efforçait de l’attraper. Ses pieds essayèrent de faire avancer son corps sans but, son élan ne faisant que plus reculer sa tête. Elle devait atteindre les portes. Elle devait retourner à l’intérieur.
La panique lui voila la vision et l’atroce pression s’intensifia jusqu’à ce qu’elle ressente une rapide vague de soulagement, quelque chose de chaud et humide s’épanchant sur sa poitrine. Elle n’avait pas le temps d’essayer de comprendre, seulement de suffoquer et de sentir une sensation humide et poisseuse à l’endroit où s’était trouvé le fil de fer et de remarquer le sol sous ses genoux, et ensuite sa tête, et ensuite plus rien du tout.
CHAPITRE UN
L’agent spécial Zoe Prime regarda la femme sur le siège passager à côté d’elle et essaya de ne pas se sentir intimidée.
— Ça nous met tout de suite dans le bain ! plaisanta Shelley.
Zoe savait ce qu’elle voulait dire. Elles venaient d’être mises en équipe et voilà qu’elles se rendaient à toute allure sur une scène de crime. La scène d’un crime majeur, à vrai dire. Un crime qui ferait la une de nombreux journaux.
Mais ce n’était pas ce qui rendait Zoe mal à l’aise. C’était le fait qu’elle eût été mise en équipe avec un nouvel agent qui se faisait déjà remarquer au Bureau. Shelley Rose avait une attitude et un visage ouvert et chaleureux et il était dit qu’elle pouvait obtenir des aveux de quiconque d’un simple sourire. Être mis en équipe avec quelqu’un de tel suffisait amplement à faire descendre un frisson de paranoïa le long de votre échine quand vous aviez un secret à cacher.
Sans parler du fait que Zoe, qui n’était pas considérée comme étant la meilleure à quoi que ce soit au Bureau jusqu’à présent, nourrissait une certaine envie envers le respect que sa partenaire, qui n’était qu’une bleue, inspirait.
Shelley avait un visage presque symétrique, à un millimètre et demi de la perfection, un léger écart entre ses yeux. Il n’était pas surprenant qu’elle inspire la confiance et s’attire l’amabilité de ceux qui l’entouraient. C’était de la psychologie classique. Un petit défaut rendait sa beauté plus humaine.
Même en sachant cela, Zoe ne pouvait s’empêcher de se surprendre à aimer sa nouvelle partenaire, elle aussi.
— Qu’est-ce qu’on sait pour le moment ? demanda Zoe.
Shelley parcourut la pile de documents dans le dossier qu’elle avait à la main.
— Détenu a reçu de l’aide pour s’évader de Tent City{1} à Phoenix, dit-elle.
Le désert de l’Arizona défilait à l’extérieur de la voiture.
— Il s’est enfui à pieds. Ça ne l’a apparemment pas ralenti. Trois homicides recensés jusqu’à présent.
— Des gardes ? demanda Zoe.
Des idées se bousculaient déjà dans sa tête. Elle calculait le nombre de kilomètres qu’un homme pouvait parcourir à pied par cette chaleur. Pas beaucoup sans repos, abri ou eau. Si l’on ajoutait à cela à quel point il est compliqué de courir dans le sable, cela rendait la fuite encore plus difficile.
— Non, des gens qu’il a croisés. Les deux premiers étaient des randonneurs.
Shelley marqua une pause et inspira à travers ses dents serrées.
— Les meurtres étaient… violents d’après les informations qu’on a actuellement. La dernière victime était un touriste qui se rendait au Grand Canyon.
— C’est là qu’on se rend actuellement, supposa Zoe.
La carte de la zone s’ouvrit dans son esprit, traçant les chaussées et sentiers que chaque victime avait probablement empruntés pour croiser la route de leur homme.
— Bon. On dirait qu’il va falloir qu’on se prépare.
Zoe hocha silencieusement la tête. Elle avait remarqué qu’il était plus difficile pour les gens comme Shelley d’arriver à une scène de crime et de voir le corps de la victime. Ils ressentaient la douleur et les souffrances qui avaient été infligées. Zoe ne voyait toujours simplement qu’un corps — de la viande. De la viande qui contenait des indices qui pouvaient aider l’enquête et les nombres qui l’entouraient.
C’était probablement ce qui lui avait permis de réussir tous les concours d’entrée et de devenir agent spécial en premier lieu — rester calme et au contrôle, et analyser les faits et non les émotions. Mais c’était sa nature calme et sa tendance à rapidement reprendre une expression neutre qui lui avait valu de se faire assigner un nouveau partenaire. Apparemment, le dernier avait trouvé Zoe trop calme et distante.
Elle avait tenté de remédier à cela pour sa première affaire avec Shelley en achetant deux cafés dans des gobelets en polystyrène et en en donnant un à sa partenaire quand elles s’étaient rencontrées, en reconnaissance d’un apparemment ancien rituel entre collègues. Cela avait semblé s’être bien passé. Shelley était assez avenante pour deux, c’était pour cela que Zoe avait bon espoir que cela pourrait bien se passer.
Il ne fut pas difficile de trouver le site. Des policiers locaux s’affairaient en uniforme sous le soleil torride dont l’intensité brûlante pesa lourdement sur les bras nus de Zoe dès l’instant où elle sortit de la voiture climatisée. Elle aurait un coup de soleil en quarante-cinq minutes si elle ne se protégeait pas. Ses joues, son nez et ses mains auraient probablement bronzé le temps qu’elles retournent à la voiture.
Shelley les présenta et elles montrèrent leurs plaques à l’officier responsable avant de s’approcher de la scène de crime. Zoe n’écouta que d’une oreille, heureuse de laisser Shelley prendre les choses en main. Bien qu’elle fût l’officier supérieur, elle n’était pas jalouse de voir Shelley faire preuve d’excès d’autorité. Zoe faisait déjà ses recherches, elle cherchait les clés qui révéleraient tout. Shelley lui fit un signe de tête, un accord tacite qu’elle se chargerait des policiers pendant que Zoe examinait les environs.
— Je ne sais pas si vous trouverez grand-chose, disait le chef de police. Nous avons tout passé au peigne fin.
Zoe l’ignora et continua ses recherches. Elle pouvait voir des choses, des choses que les autres ne voyaient pas. Des choses qui auraient pu tout aussi bien être écrites en lettres de trois mètres de haut, mais qui étaient invisibles aux yeux des gens normaux.
C’était son secret ; son superpouvoir. Elle repéra les empreintes du détenu dans le sable et les calculs apparurent à côté, lui disant tout ce qu’elle avait besoin de savoir. C’était aussi facile que lire un livre.
Elle s’accroupit légèrement afin de mieux voir les empreintes les plus proches et la façon dont elles s’éloignaient du corps de la victime. La foulée du criminel lui disait qu’il faisait un mètre quatre-vingt-dix-huit. La profondeur des empreintes indiquaient aisément un poids de quatre-vingt-quinze kilogrammes. Il avait couru à un rythme régulier, s’approchant de la victime à six kilomètres par heure pour l’attaquer, d’après l’espace entre elles.
Zoe se déplaça pour ensuite examiner le corps. Le détenu s’était servi d’un surin de dix-neuf centimètres avec lequel il avait poignardé la victime à un angle de quarante-neuf degrés. Il s’était enfui vers le nord-ouest à une allure plus rapide de neuf virgule cinq kilomètres par heure.
Le sang sur le sable lui disait que cela s’était produit voilà moins de quatre heures. Les calculs étaient simples. Se servant d’une vitesse moyenne à laquelle une personne se fatiguait et prenant en compte la température de ce jour, Zoe leva les yeux et les plissa en regardant au loin, visualisant la distance exacte où ils le trouveraient. Son rythme cardiaque s’accéléra quand elle s’imagina l’arrestation. Ils l’attraperaient facilement. Il était déjà fatigué et n’avait pas d’eau ni de moyen de savoir qu’ils avaient déjà découvert ses crimes. Cela serait bientôt fini.
Son attention dériva vers les arbustes et les petits arbres qui poussaient au loin, des pousses éparses n’offrant pas assez de protection pour un humain. Elle vit la distance entre eux et des nombres apparurent devant ses yeux et lui racontèrent l’histoire derrière leur disposition. Si les plantes poussaient loin les unes des autres, cela signifiait qu’il y avait peu de ressources naturelles. Si elles poussaient très près les unes des autres, cela signifiait que leurs racines cherchaient une source d’eau souterraine et un sol riche en nutriments. Bien que cela eût l’air d’être dû au hasard aux yeux d’un novice, le positionnement de chaque plante était intentionnel. C’était l’intention du monde naturel.
— Est-ce que tu as trouvé quoi que ce soit ? demanda Shelley.
Son regard était chargé d’espoir, comme si elle attendait que sa partenaire plus expérimentée résolve tout.
Zoe leva les yeux, sursautant d’un air coupable. Elle se releva et secoua rapidement la tête.
— Je suppose qu’il est parti par-là, dit-elle en désignant la direction évidente des empreintes qui s’éloignaient.
Il y avait un affleurement de rochers au loin, un bon endroit pour se reposer. La formation rocheuse lui permit de voir le souffle du vent, des milliers d’années d’évidement et de façonnage.
— Il va peut-être s’arrêter à l’ombre là-bas. Il fait chaud aujourd’hui.
Un secret était un secret. Il était hors de question qu’elle admette ce qu’elle savait. Il était hors de question qu’elle dise à voix haute qu’elle était une femme étrange qui comprenait le monde différemment de tout le monde. Ou qu’elle admette le reste — qu’elle ne comprenait pas comment les autres gens voyaient le monde. Mais elle pouvait leur donner cela, le genre d’indice qu’une personne normale pouvait peut-être voir.
Le chef de police s’éclaircit la gorge, l’interrompant.
— Nous avons déjà cherché dans cette direction et nous n’avons rien trouvé. Les chiens ont perdu la piste. Le terrain devient plus rocailleux là-bas, il n’y a donc pas d’empreintes. Nous supposons qu’il a continué à courir tout droit. Ou qu’il a été pris par un véhicule.
Zoe plissa les yeux. Elle savait ce qu’elle savait. Cet homme était au désespoir, ses foulées étaient longues et son corps bas alors qu’il courrait penché en avant pour aller plus vite. Il ne cherchait pas quelqu’un pour le sauver et il n’était pas assez loin pour qu’ils ne puissent pas le trouver.
— Faites-nous plaisir, suggéra Zoe en tapotant le sceau du FBI sur sa plaque qu’elle avait toujours à la main.
Être un agent spécial avait un excellent avantage : il n’était pas toujours nécessaire de s’expliquer. À vrai dire, ne pas s’expliquer ne faisait que renforcer les stéréotypes.
Shelley cessa d’étudier le visage de Zoe et se retourna vers le chef de police d’un air déterminé.
— Envoyez l’hélicoptère. Les chiens sont prêts ?
— Bien sûr, dit-il en hochant la tête, bien qu’il n’eût pas l’air ravi. C’est vous qui commandez.
Shelley le remercia.
— Retournons à la voiture, suggéra-t-elle à Zoe. Je suis en contact radio avec le pilote. Il nous préviendra s’ils voient quoi que ce soit.
Zoe hocha la tête et retourna docilement à la voiture. Shelley l’avait soutenue, elle était de son côté. C’était bon signe. Elle était reconnaissante et cela ne blessait en rien son égo que ce soit Shelley qui donnait les ordres. Cela ne changeait rien, tant que cela permettait de sauver des vies.
— Fiou, souffla Shelley avant de marquer une pause alors qu’elle se reposait sur le siège passager, une carte ouverte dans les mains. Ça ne devient pas plus facile, n’est-ce pas ? Une femme seule, comme ça, sans provocation. Elle ne méritait pas ça.
Zoe hocha de nouveau la tête.
— O.K., dit-elle, ne sachant pas vraiment ce qu’elle pouvait ajouter d’autre à la conversation.
Elle démarra la voiture et commença à conduire pour remplir le vide.
— Tu ne parles pas beaucoup, n’est-ce pas ? demanda Shelley.
Elle marqua une pause avant d’ajouter :
— Ce n’est pas un problème. J’apprends simplement comment tu fonctionnes.
Le meurtre n’était pas mérité, c’était vrai. Zoe pouvait le voir et le comprendre. Mais ce qui était fait était fait. Elles avaient du travail à faire à présent. Les secondes s’écoulaient et dépassèrent les limites normales d’une réponse attendue. Zoe réfléchit mais ne trouva rien à dire. Le moment était passé. Si elle parlait maintenant, elle n’en aurait l’air que plus étrange.
Zoe se concentra sur le fait de garder une expression triste alors qu’elle conduisait, mais il était trop difficile de faire les deux en même temps. Elle arrêta de s’efforcer de le faire, son visage se détendant pour reprendre son regard fixe et neutre habituel. Ce n’était pas qu’elle ne pensait pas ou qu’il n’y avait aucune émotion dans ses yeux. Il était seulement difficile de penser à ses expressions faciales et de les contrôler consciemment pendant que son esprit calculait la distance exacte entre chaque borne sur la route et s’assurait qu’elle restait à une vitesse qui lui permettrait de faire un écart sur ce type de route sans faire se retourner la voiture.
Elles retournèrent sur la route, suivant la surface plus lisse qui sinuait à travers le paysage plat. Zoe voyait déjà que la route allait dans la bonne direction et qu’elle leur permettrait de rattraper le meurtrier s’il courait en ligne droite. Elle appuya avec force sur la pédale, se servant du bitume à son avantage pour accélérer.