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La Pensée de l'Humanité

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VII. —La véritable conception des conséquences de la doctrine défendant la nécessité de la violence, commence à pénétrer dans la conscience de l'homme moderne
1

Le châtiment, est une idée que l'humanité commence à dépasser.

2

L'esprit de Jésus, qu'on s'efforce d'étouffer, se manifeste néanmoins partout d'une façon éclatante. L'esprit évangélique n'a-t-il point pénétré dans les peuples, ne commence-t-il pas à venir à la lumière? Les idées sur les droits et les obligations ne sont-elles pas devenues plus claires pour chacun? N'entend-on pas de toutes parts des appels aux lois plus équitables, aux institutions protégeant les faibles, fondées sur une juste égalité? L'ancienne inimitié entre ceux qu'on a désunis par force, ne s'éteint-elle pas? Les peuples ne se sentent-ils pas frères?

Tout cela est l'œuvre d'un germe prêt à lever, l'œuvre de l'amour, qui débarrassera le monde du péché, qui ouvrira aux peuples une nouvelle voie de vie, dont la loi intérieure ne sera plus la violence, mais l'amour des uns pour les autres.

LAMENNAIS.

CHAPITRE XVI
DE LA VANITÉ

Rien ne pervertit la vie des hommes et ne les prive aussi sûrement de leur vrai bonheur, comme l'habitude de vivre non d'après les préceptes des sages et selon leur propre conscience, mais d'après ce qui est reconnu comme bon et approuvé par les gens parmi lesquels l'on vit.

I. —En quoi consiste la tentation de la vanité
1

La raison principale qui rend notre vie mauvaise, réside en ce que nous réglons notre conduite non selon les besoins de notre corps ou de notre âme, mais uniquement dans l'espoir d'obtenir l'approbation des gens.

2

Aucune tentation ne captive les hommes aussi longtemps, ne les éloigne autant de la compréhension du sens de la vie humaine et du vrai bonheur, que la préoccupation de la gloire, de l'approbation, de l'estime, des louanges des autres.

L'homme ne peut se libérer de la tentation que par une lutte constante contre lui-même, et par l'évocation continuelle de son unité avec Dieu, cherchant ainsi son approbation seule.

3

Il ne nous suffit pas de vivre de notre vie intérieure, la seule vraie, nous voulons vivre d'une autre vie encore, d'une vie imaginaire dans la pensée des autres, et nous nous efforçons à cette fin de paraître autres que nous ne sommes en réalité. Nous nous efforçons sans cesse de dompter cet être imaginaire, sans nous soucier du vrai, de celui que nous sommes en réalité. Si notre âme est paisible, si nous avons foi, si nous aimons, nous nous empressons d'en parler au plus tôt, afin que ces vertus ne soient pas seulement nos vertus, mais aussi celles de l'être imaginaire qui existe dans la pensée des autres.

Pour faire croire aux gens que nous avons des qualités, nous sommes prêts même à y renoncer. Nous sommes prêts à devenir lâches à condition de passer pour braves.

PASCAL.
4

L'une des expressions des plus dangereuses et des plus nuisibles est: «tous font ainsi.»

5

Lorsqu'il est difficile, et presque impossible, de comprendre pourquoi l'homme agit comme il le fait, sois sûr que la raison de ses actes réside dans le désir d'être glorifié par les hommes.

6

On ne berce pas un enfant pour le débarrasser de ce qui le fait crier, mais pour qu'il ne puisse pas crier. Nous agissons de même avec notre conscience lorsque nous l'étouffons pour être agréables aux gens. Nous n'apaisons pas la conscience, mais nous obtenons ce que nous désirons: nous ne l'entendons plus.

7

Intéresse-toi non à la quantité, mais à la qualité de tes admirateurs; il est désagréable de ne pas plaire aux bonnes gens, mais c'est toujours bien de ne pas plaire aux mauvaises gens.

SÉNÈQUE.
8

Nos plus grandes dépenses sont effectuées pour ressembler aux autres. Ni pour notre esprit, ni pour notre cœur nous ne dépensons autant.

EMERSON.
9

Dans chaque bonne action, il y a un peu de désir d'être approuvé par les gens. Mais c'est mauvais quand tu agis comme tu le fais uniquement pour être glorifié par les autres.

10

Un homme demanda à un autre pourquoi il travaillait à ce qu'il n'aimait pas.

– Parce que tous le font, répondit celui-ci.

– Pardon, pas tous; moi, je ne le fais pas, quelques autres, non plus.

– Si ce n'est pas tous, beaucoup le font, la plupart des gens.

– Mais dis-moi quels sont les plus nombreux, les sots ou les intelligents?

– Certainement ce sont les sots.

– Dans ce cas, tu agis comme tu le fais pour imiter les sots.

II. —Si beaucoup de gens partagent la même opinion, cela ne prouve pas que cette opinion soit juste
1

Le mal ne cesse pas d'être mauvais parce que beaucoup de gens agissent ma! et qu'ils s'en vantent, comme cela arrive souvent.

2

Plus il y a de gens qui croient à la même chose, plus il faut être prudent à l'égard de cette croyance et avoir plus, d'attention.

3

Lorsqu'on dit: il faut faire comme font les autres, cela veut dire presque toujours qu'il faut faire mal.

LA BRUYÈRE.
4

Il n'y a qu'à s'habituer à faire ce que «tout le monde» exige pour être insensiblement entraîné à commettre de mauvaises actions et à les considérer comme bonnes.

5

L'homme a son tribunal – sa conscience. On ne doit tenir qu'à son jugement.

6

Cherche celui qui est le meilleur parmi ceux qui blâment le monde.

7

Si la foule déteste quelqu'un, il faut, avant d'en juger, bien examiner pourquoi il en est ainsi. Si la foule vénère quelqu'un, il faut également, avant d'en juger, bien examiner pourquoi il en est ainsi.

CONFUCIUS.

III. —Conséquences pernicieuses de la vanité
1

La société dit à l'homme: «Pense comme nous pensons; crois comme nous croyons; mange et bois comme nous buvons et mangeons; habille-toi comme nous nous habillons.» Si quelqu'un ne se soumet pas à ces exigences, la société l'accable de ses sarcasmes, de ses injures. Il est difficile de ne pas y obéir, mais cependant, si tu t'y soumets, tu t'en sentiras plus mal encore: tu ne seras plus un homme libre, mais un esclave.

D'après LUCIE MALAURY.
2

C'est très bien quand les hommes s'instruisent pour leur âme, pour être plus sages, meilleurs. De telles études leur sont utiles. Mais s'ils étudient pour la gloire, afin de paraître instruits, l'instruction devient non seulement inutile, mais nuisible; elle rend les hommes moins sages et moins bons qu'ils ne le seraient s'ils n'avaient pas étudié du tout.

Traduit du chinois.
3

Non seulement vous ne devez pas vous vanter vous-mêmes, mais encore vous ne devez pas permettre aux autres de vous glorifier. Les louanges font périr l'âme en reportant les préoccupations de l'âme sur la gloire des hommes.

4

Il arrive souvent de voir qu'un homme bon, sage et juste, tout en sachant que la guerre, l'exploitation du travail des autres, le blâme, la consommation de la viande et divers actes du même genre sont mauvais, continue à accomplir ces actes. Pourquoi? Parce qu'il tient plus à l'opinion publique qu'au jugement de sa conscience.

5

L'inobservation des traditions n'a pas occasionné une millième partie du mal causé par le respect des anciennes coutumes.

Les gens ne croient plus depuis longtemps aux anciennes coutumes, mais ils les observent néanmoins parce qu'ils pensent que la plupart des gens les blâmeraient, s'ils n'observaient plus les anciennes coutumes auxquelles personne ne croit plus depuis longtemps.

IV.– La lutte contre la tentation de la vanité
1

Pendant les premiers temps de sa vie, dans son enfance, l'homme vit principalement pour son corps: il mange, il boit, il joue, il s'amuse. C'est le premier degré. Plus l'homme grandit, plus il commence à se préoccuper de l'opinion des gens parmi lesquels il vit, et plus il commence à négliger les besoins de son corps pour ne penser qu'à la gloire des hommes. C'est le second degré. Le troisième et dernier degré est celui où l'homme se soumet surtout aux exigences de son âme et où il néglige le corps, les amusements et l'opinion publique, pour ne penser qu'à son âme.

2

Il est difficile de déroger tout seul aux coutumes établies; cependant, à chaque pas que l'on fait pour devenir meilleur, on se heurte contre l'usage établi et l'on subit la critique des gens. L'homme qui consacre sa vie à se perfectionner y doit être préparé.

3

C'est mal d'irriter les gens en dérogeant aux coutumes établies, mais c'est plus mal encore de déroger aux exigences de la conscience et de la raison en subissant les coutumes pernicieuses.

4

On ridiculise celui qui garde le silence, comme celui qui parle trop, comme celui qui parle trop peu; il n'y a pas un homme sur terre qu'on ne critique pas. Il n'y a jamais eu, il n'y a pas et il n'y aura jamais personne qu'on aurait toujours blâmé pour tout ce qu'il fait, de même qu'il n'y a personne qu'on aurait toujours loué. C'est pourquoi, il est inutile de se préoccuper ni des louanges, ni des blâmes des gens.

 
5

Tu crains que les gens ne te méprisent pour ta douceur; mais les gens justes ne peuvent pas te mépriser pour cela; quant aux autres, tu n'as pas besoin de t'en préoccuper – ne fais pas attention à leur opinion. Un bon menuisier ne se chagrinera pas parce qu'un homme qui ne comprend rien à son métier n'approuve pas son travail.

Les gens qui le méprisent pour ta douceur ne comprennent rien à ce qui est bien pour l'homme. Pourquoi donc te préoccuper de leur appréciation?

D'après ÉPICTÈTE.
6

Il est temps pour l'homme de connaître sa valeur. Serait-il, en effet, quelque être bâtard? Il est temps de cesser de regarder humblement de tous côtés pour voir s'il a plu ou déplu aux gens. Non; que ma tête reste droite et ferme sur mes épaules! La vie ne m'est pas donnée pour la montrer, mais pour que je la vive. Je reconnais l'obligation de vivre pour mon âme. Et je veux me préoccuper non pas de l'opinion que les gens auraient de moi, mais de ma vie, de savoir si je n'accomplis ou si je n'accomplis pas ma destinée devant Celui qui m'a envoyé dans la vie.

EMERSON.
7

Quiconque s'est abandonné depuis sa jeunesse à ses grossiers instincts d'animal, ne cesse de s'y adonner, bien que sa conscience réclame autre chose. Il agit ainsi parce que les autres font comme lui. Et les autres agissent ainsi pour la même raison que lui. Il ne peut y avoir qu'une issue: chaque homme doit se libérer de la préoccupation de l'opinion publique.

V. —On doit se préoccuper de son âme et non pas de sa gloire
1

Le moyen le plus rapide et le meilleur pour gagner la réputation d'un homme vertueux, n'est pas de paraître tel devant les hommes, mais de faire des efforts sur soi-même pour devenir vertueux.

Causeries de SOCRATE.
2

Celui qui ne réfléchit pas par lui-même, se soumet aux idées d'un autre homme. Soumettre sa pensée à quelqu'un est un servage plus humiliant que de soumettre son travail. Réfléchis toi-même et ne te préoccupe pas de ce que te diront les gens.

3

Personne ne manifeste tant de respect et d'attachement pour la vertu, que celui qui perd volontiers la réputation d'un homme de bien, uniquement pour rester bon dans son for intérieur.

SÉNÈQUE.
4

Lorsqu'un homme est habitué à ne vivre que pour l'opinion publique, il lui répugne, parce qu'il ne fait pas ce que font les autres, d'avoir la réputation d'un sot, d'un ignorant ou d'un vilain homme. Mais on doit travailler à tout ce qui est difficile. Et à cette œuvre, on doit travailler des deux côtés: apprendre à mépriser l'opinion des gens; apprendre à vivre pour de telles œuvres qui, bien qu'elles soient critiquées par la foule, n'en restent pas moins des bonnes œuvres.

5

Les hommes vivent et agissent d'après leurs idées, ainsi que d'après les idées des autres. Suivant que les uns et les autres influencent leurs actes, les hommes se distinguent entre eux.

6

Il est difficile de distinguer si tu sers les autres pour ton âme, pour Dieu, ou pour la gloire des hommes. Il n'y a qu'un seul moyen de contrôle: si tu accomplis une œuvre que tu crois bonne, demande-toi si tu continuerais à y travailler si tu savais d'avance que personne n'apprendrait jamais ce que tu fais. Si tu réponds que tu le ferais, c'est que tu travailles sûrement pour ton âme, pour Dieu.

VI. —Celui qui vit de la vraie vie n'a pas besoin de louanges
1

Vis seul, a dit le sage. Cela veut dire que tu dois résoudre le problème de ta vie tout seul, avec le concours du Dieu qui vit en toi, et non pas d'après les conseils et les opinions des autres.

2

Si tu veux être tranquille, tâche de plaire à Dieu et non pas aux hommes. Ceux-ci ont des désirs différents: aujourd'hui, ils veulent une chose; demain une autre. Jamais, ils ne sont satisfaits. Mais le Dieu qui vit en toi désire toujours une seule chose, et tu sais ce qu'il veut.

3

Il n'y a qu'un seul moyen pour ne pas croire en Dieu: ce moyen consiste à toujours reconnaître l'opinion des gens comme juste, et à ne prêter aucune attention à notre voix intérieure.

JOHN RUSKIN.
4

Si nous sommes sur un bateau en marche et que nous regardons un objet qui se trouve sur le même bateau, nous ne remarquons pas que nous voguons, mais en regardant de côté sur ce qui ne se meut pas avec nous, par exemple la berge, nous nous apercevons immédiatement que nous sommes en mouvement. Lorsque tous les hommes vivent autrement qu'il ne le faut, nous ne le remarquons pas; mais il suffit, qu'un seul se ressaisisse et qu'il commence à vivre selon Dieu, pour qu'il devienne clair combien les autres vivent mal. Mais les autres persécutent toujours celui qui ne vit pas comme eux.

PASCAL.

CHAPITRE XVII
DES FAUSSES CROYANCES

Les fausses croyances sont celles que les gens acceptent non pas parce qu'elles leur sont nécessaires pour leur âme, mais parce qu'ils croient en ceux qui les prêchent.

I. —En quoi consiste la supercherie des fausses croyances
1

Souvent les hommes pensent qu'ils croient à la loi de Dieu, alors qu'ils ne croient qu'à ce que tous croient. Et tous les hommes ne croient pas à la loi de Dieu, mais qualifient telle ce qui leur convient et ne les empêche pas de mener la vie qui leur plaît.

2

Quand les hommes vivent dans le péché et les tentations, ils ne sauraient être tranquilles. La conscience les dénonce. C'est pourquoi ils sont obligés de choisir entre ces deux alternatives: ou se reconnaître coupables devant les hommes et devant Dieu, et cesser de pécher, ou bien continuer à mener une vie de pécheurs, commettre de mauvaises actions et les qualifier de bonnes. C'est pour ces hommes que l'on a inventé les fausses croyances, grâce auxquelles on peut se considérer comme juste, tout en menant une mauvaise vie.

3

C'est mal de mentir devant les hommes, mais c'est pis encore de se mentir à soi-même. Ce mensonge est tout particulièrement nuisible parce que les autres peuvent dénoncer ton mensonge, tandis que personne ne t'accusera de t'être menti à toi-même. C'est pourquoi, garde-toi de te mentir à toi-même, surtout lorsqu'il s'agit de la foi.

4

«Crois ou sois maudit.» C'est la qu'est la raison principale du mal. Si l'homme accepte sans discuter ce qu'il aurait dû examiner par sa propre raison, il finit par perdre l'habitude de raisonner, il est soumis à la malédiction et induit ses proches au péché. Le salut des hommes réside en ce que chacun doit apprendre à vivre de sa raison.

EMERSON.
5

On ne peut ni peser ni mesurer le tort qu'ont produit et produisent encore les fausses croyances.

La religion règle les rapports de l'homme envers Dieu, à l'égard de l'univers; elle détermine la destinée de l'homme qui découle de ces rapports. Quelle doit être la vie de l'homme si ces rapports et la destination déterminés ainsi sont faux?

6

Il y a trois sortes de fausses croyances. La première est de croire à la possibilité de pouvoir apprendre par l'expérience ce qui ne peut l'être d'après les lois de l'expérience. La seconde fausse croyance fait admettre, dans le but de notre perfectionnement moral, des choses sur lesquelles nous ne pouvons nous former aucune idée par notre raison. La troisième fausse croyance reconnaît la possibilité d'évoquer par un moyen surnaturel une action mystérieuse à l'aide de laquelle la divinité exerce son influence sur notre moralité.

KANT.
II. —Les fausses croyances ne satisfont pas les exigences supérieures, mais les exigences inférieures de l'âme humaine
1

L'unique et vraie religion ne contient rien que des lois, c'est-à-dire des éléments moraux dont nous pouvons reconnaître et étudier nous-mêmes la nécessité incontestable, et que nous concevons par notre raison.

KANT.
2

L'homme ne peut plaire à Dieu que par une vie juste. C'est pourquoi tout ce par quoi l'homme croit plaire à Dieu, en dehors d'une vie pure et juste, n'est qu'un grossier et nuisible mensonge.

D'après KANT.
3

Faire pénitence en s'infligeant des souffrances, au lieu de profiter de l'état d'esprit où l'on se trouve afin d'amender sa conduite, est un travail inutile. De plus, une telle pénitence a cette mauvaise conséquence; l'homme croit avoir payé ainsi toutes ses dettes, et ne songe plus à son perfectionnement qui seul est nécessaire lorsqu'on reconnaît ses erreurs.

KANT.
4

C'est mal lorsque les hommes ne connaissent pas Dieu, mais c'est plus mal encore lorsqu'ils reconnaissent comme Dieu ce qui n'est pas Dieu.

LACTANCE.
5

On dit: Dieu a créé l'homme à Son image; on aurait mieux fait de dire que c'est l'homme qui a créé Dieu à son image.

LICHTENBERG.
6

Lorsqu'on parle du ciel comme d'un endroit où se trouvent les heureux, on se le représente généralement quelque part très haut, dans les régions infinies de l'univers. On oublie que notre terre, vue de l'une de ces hautes régions, ressemble également à l'un des astres célestes, et que les habitants de ces planètes ont absolument le même droit de dire, en désignant la terre: «Voyez-vous cet astre-là, c'est l'endroit de la félicité éternelle, l'asile céleste préparé pour nous et où nous irons un jour.» Le fait est que, par une étrange erreur de notre raison, l'élan de notre croyance est toujours connexe avec l'idée de notre élévation vers les hauteurs, et nous ne songeons pas que nous aurions beau nous élever, nous devrons néanmoins redescendre encore, afin de pouvoir poser un pied ferme dans quelque autre monde.

7

Les mahométans font bien de couvrir leurs yeux de leurs doigts et de se boucher les oreilles, lorsqu'ils entrent au temple et commencent à prier.

La vraie prière est dans l'abstraction de toutes nos préoccupations habituelles, de tout ce qui peut nous rappeler l'existence de nos sens, et dans l'évocation en soi de l'élément divin. Dans ce but, le mieux est de faire ce que nous dit le Christ: d'entrer seul dans un lieu clos, et de s'y enfermer, c'est-à-dire de prier dans la solitude complète, que l'on soit chez soi, dans la forêt ou dans les champs. La vraie prière est dans ce détachement de toutes les choses extérieures, pendant lequel on contrôle son âme, ses actes, ses désirs, non pas d'après les exigences extérieures du monde, mais d'après les exigences de l'élément divin que nous sentons en nous.

Une telle prière est un secours: elle fortifie et élève l'âme, elle confesse et vérifie les actions passées, elle indique la conduite future.

III. —Le Culte extérieur
1

Bien qu'il y ait une différence de procédé entre un chamane tounghouse et un prélat catholique européen, ou bien, en prenant pour exemple des gens simples, entre un voghoul grossier et sensuel qui, tous les matins, pose sur sa tête la patte d'une peau d'ours, et prononce les paroles de sa prière: «Ne me tue pas,» et un puritain indépendant de Connecticut; il n'y a aucune différence dans les principes de leurs croyances, car ils appartiennent tous deux à la même catégorie de gens dont le culte ne consiste pas à devenir meilleurs, mais de croire et d'exécuter certains règlements arbitraires. Seuls ceux qui croient que le culte de Dieu consiste à aspirer à une vie meilleure diffèrent des premiers, parce qu'ils reconnaissent un tout autre principe et infiniment plus élevé, réunissant tous les hommes de bonne foi dans un temple invisible qui seul peut être un temple universel.

 
KANT.
2

«Et quand tu prieras, ne fais pas comme les hypocrites; car ils aiment à prier en se tenant debout dans les synagogues et aux coins des rues, afin d'être vus des hommes. Je vous dis, en vérité, qu'ils reçoivent leur récompense. Mais toi, quand tu pries, entre dans la chambré et, ayant fermé ta porte, prie ton Père qui est dans ce lieu secret; et ton Père qui te voit dans le secret, te récompensera».

MATTH., VI, 5-6.
3

«Gardez-vous des scribes qui se plaisent à se promener en longues robes, et qui aiment les salutations dans les assemblées et les premières places dans les synagogues, et les festins; qui ruinent les maisons des veuves, tout en affectant de faire de longues prières.»

Luc, XX, 46-47.
IV.– La pluralité des croyances et l'unité de la religion vraie
1

L'homme qui ne pense pas à la religion, s'imagine qu'il n'y a qu'une seule vraie religion – celle dans laquelle il est né. Mais tu n'as qu'à te demander ce qui arriverait si tu étais né dans une autre religion, toi chrétien si tu étais né mahométan; toi bouddhiste – chrétien; toi chrétien – brahmane. Est-il possible que seuls, avec notre religion, nous soyons dans le vrai, et que tous les autres soient dans le mensonge? La religion ne deviendra pas vraie parce que tu te persuaderas toi-même et que tu persuaderas les autres qu'elle seule est vraie.

IV.– Conséquences de la confession des fausses croyances
1

En 1682, en Angleterre, le docteur Leyton, un homme respectable qui avait écrit un livre contre l'épiscopat anglican, a été jugé et condamné aux châtiments suivants. On le fouetta cruellement, puis on lui coupa une oreille et on lui ouvrit un côté du nez, puis on inscrivit sur sa joue, au fer rouge, les lettres SS: semeur de sédition. Sept jours plus tard on le fouetta à nouveau, bien que les plaies qu'il avait au dos n'aient pas encore été fermées; puis on lui ouvrit l'autre côté du nez, on lui trancha l'autre oreille et on lui tâtoua l'autre joue. Tout cela fut fait au nom du christianisme.

MORISSON DAVIDSON.
2

En 1415, Jean Huss fut reconnu comme hérétique pour avoir dévoilé la fausse croyance des catholiques et les mauvaises actions du pape, et il fut condamné à mort, sans que son sang puisse être versé, c'est-à-dire à être brûlé.

L'exécution eut lieu derrière les portes de la villes, entre deux jardins. En arrivant sur place, Huss se mit à genoux et commença à prier. Lorsque le bourreau lui ordonna de monter sur le bûcher, il se leva et dit très haut:

«Jésus-Christ. Je vais à la mort pour avoir prêché Ta parole, je souffrirai docilement.»

Les bourreaux, déshabillèrent Huss et lui attachèrent les mains derrière le dos au poteau; ses pieds se trouvaient sur un banc. On mit du bois et de la paille autour de lui. Le bois et la paille lui venaient jusqu'au menton. Le chef impérial s'approcha alors de Huss et lui annonça qu'il serait pardonné s'il se rétractait.

«Non, dit Huss, je ne me connais aucune faute.»

Les bourreaux allumèrent alors le bûcher, et Huss se mit à chanter la prière: «Jésus, Fils du Dieu vivant, aie pitié de moi.»

Le feu monta, très haut, et bientôt Huss se tut.

C'est ainsi que les gens qui se qualifiaient de chrétiens, défendaient leur croyance.

N'est-il pas évident que ce n'était pas une religion, mais la superstition la plus grossière?

3

Les gens ne commettent jamais de mauvaises actions avec plus de sang-froid et d'assurance en leur justice, que lorsqu'ils le font en vertu d'une fausse croyance.

PASCAL.
VI. —En quoi consiste la vraie religion?
1

«Ne vous faites point appeler maître; car vous n'avez qu'un maître – le Christ; et vous, vous êtes tous frères. Et n'appelez personne sur la terre votre père; car vous n'avez qu'un seul Père, Celui qui est dans les cieux; et ne vous faites point appeler docteur, car vous n'avez qu'un seul Docteur – le Christ.» MATTH., XXIII, 8-10.

C'est ainsi qu'enseignait le Christ. Et il enseignait ainsi parce qu'il savait que, de même qu'en son temps il y avait des gens qui prêchaient une fausse loi de Dieu, il y en aurait aussi dans l'avenir. Il le savait et disait qu'il ne fallait pas écouter ceux qui s'intitulaient maîtres parce que leur enseignement obscurcit la doctrine simple et claire qui est révélée à tous et qui vit dans le cœur de chaque homme.

Cette doctrine consiste à aimer Dieu, comme le suprême bien et la suprême vérité, à aimer son prochain comme soi-même et à faire aux autres ce qu'on veut qu'ils vous fassent.

2

La religion ne consiste pas à savoir ce qui a été et ce qui sera, ni même ce qui est actuellement, mais elle consiste à savoir ce que chaque homme doit faire.

3

«Si donc tu apportes ton offrande à l'autel, et que là tu te souviennes que ton frère a quelque chose contre loi, laisse-là ton offrande devant l'autel, et va-t-en premièrement te réconcilier avec ton frère; et après cela viens, et présente ton offrande».

MATT., V. 23.

Voilà où est la vraie religion: ni dans la cérémonie, ni dans l'offrande, mais dans l'union des hommes.

4

La doctrine chrétienne est tellement claire que les tout petits enfants la comprennent dans son sens exact. Seuls ceux qui ne veulent pas vivre comme des chrétiens ne la comprennent pas.

Pour comprendre le vrai christianisme, il faut tout d'abord renoncer au faux christianisme.

5

Le vrai culte de Dieu est exempt de superstitions; lorsque la superstition y pénètre, le culte même s'écroule. Le Christ nous a montré en quoi consistait le vrai culte de Dieu. Il nous enseignait que de tout ce que nous faisons dans le monde, il n'y a qu'une lumière et qu'un seul bonheur pour les hommes, – c'est notre amour des uns pour les autres; Il nous disait que nous ne pourrons atteindre notre bonheur qu'en servant les autres, et non pas nous-mêmes.

6

Si ce qui est présenté comme loi de Dieu ne demande pas d'amour, ce ne sont que des inventions des gens, et non pas la loi de Dieu.

D'après SKOWORODA.
7

On ne peut pas apprendre à connaître Dieu d'après ce que l'on raconte de Lui. On ne peut le connaître qu'en accomplissant Sa loi, la loi que le cœur de chaque homme connaît.

8

Le sens de la doctrine du Christ est dans l'indication de la perfection divine vers laquelle les hommes doivent tendre. Mais les hommes qui ne veulent pas suivre la doctrine du Christ, comprennent volontairement ou non, la doctrine du Christ non pas comme il l'a prêchée – rapprochement continu vers la perfection – mais comme une règle conformément à laquelle le Christ exigerait des hommes la perfection divine. Et en interprétant aussi faussement la doctrine du Christ, ceux qui ne veulent pas la suivre adoptent l'une de ces deux attitudes: ou bien, considérant la perfection comme inaccessible (ce qui est parfaitement juste), ils rejettent toute la doctrine comme un rêve irréalisable, ou bien, attitude la plus nuisible et la plus générale, tout en reconnaissant la perfection comme inaccessible, ils corrigent c'est-à-dire, dénaturent la doctrine et observent des règles que l'on appelle chrétiennes, mais qui sont, pour la plupart, contraires, au christianisme.

9

L'idée de l'union des chrétiens, comme une réunion des élus, des meilleurs, est une idée anti-chrétienne présomptueuse et fausse. Quel est le meilleur, quel est le plus mauvais? Pierre était le meilleur avant que le coq chantât, et le brigand était le plus méchant avant la croix. Ne connaissons-nous pas en nous-mêmes tantôt l'ange, tantôt le diable, qui se mêlent si bien à notre vie, qu'il n'y a pas d'homme qui aurait complètement chassé l'ange, ni qui aurait laissé apparaître le diable derrière l'ange. Comment pouvons-nous, nous qui sommes des êtres si complexes, former la réunion des élus, des justes?

Il y a une lumière de vérité, et il y a ceux qui s'approchent d'elle de tous côtés; d'autant de côté qu'il y a de rayons dans un cercle, c'est-à-dire par des routes infiniment variées. Tâchons de toutes nos forces d'arriver à la lumière de la vérité qui nous unit tous, et ce n'est pas à nous de juger si nous sommes près d'elle et unis à elle.

VII —La seule religion, vraie unit les hommes de plus en plus
1

Voyez le mécontentement profond de la forme actuelle du christianisme, qui se répand dans la société et s'exprime par le murmure, parfois, par l'irritation, la tristesse. Tous attendent l'avènement du Royaume de Dieu. Et il approche.

Le pur christianisme, bien que lentement, mais toujours de plus en plus, prend la place de celui qui porte ce nom.

CHANNING.
2

Depuis Moïse à Jésus, il s'est opéré chez les individus et les peuples un grand développement mental et religieux. Les anciennes erreurs sont abandonnées, de nouvelles vérités ont pénétré dans la conscience de l'humanité. Un seul homme ne peut être aussi grand que l'humanité. Si un grand homme est tellement en avance sur ses frères qu'ils ne le comprennent pas, – il arrive un temps où ils le rejoignent d'abord, puis le devancent et s'en vont si loin qu'ils deviennent, à leur tour, incompréhensibles pour ceux qui se trouvent à l'endroit où était l'ancien grand homme. Chaque grand génie religieux explique de plus en plus les vérités de la religion et contribue ainsi à l'union, de plus en plus grande, des hommes.

PARKER.
4

Chaque homme séparément, de même que toute l'humanité dans son ensemble doit se transformer, passer de l'état inférieur à l'état supérieur, sans s'arrêter dans sa croissance dont la limite est en Dieu lui-même. Tout état est la conséquence de l'état précédent. La croissance s'effectue continuellement et imperceptiblement et, pareille à la croissance de l'embryon, elle a lieu de façon à ce que rien ne détruit le but des situations successives de ce développement continu. Mais s'il est donné à l'homme et à tout le genre humain de se transformer, cette transformation, tant pour l'individu que pour tout le genre humain, doit s'effectuer dans le travail et les souffrances.

Avant de se parer de grandeur, avant d'apparaître à la lumière, on doit se mouvoir dans les ténèbres, supporter les persécutions, sacrifier son corps pour sauver son âme; il faut mourir pour ressusciter à la vie plus puissante, plus parfaite. Et après dix-huit siècles, ayant accompli un des cycles de son développement, l'humanité tend de nouveau à se transformer. Les anciens systèmes, les anciennes sociétés, tout ce qui composait l'ancien monde s'écroule déjà, et les peuples vivent maintenant au milieu de décombres, dans l'effroi et la souffrance. C'est pourquoi on ne doit pas perdre courage à la vue de ces ruines, de ces morts qui se sont déjà accomplies et qui s'accompliront encore, mais, au contraire, prendre courage. L'union des hommes est proche.

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