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L'Anticléricalisme

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C'est-à-dire la suppression des droits, c'est-à-dire le despotisme pur et simple. Il est très vrai que supprimer le droit du citoyen comme père de famille mène directement à supprimer son droit comme propriétaire. Il dit aujourd'hui: «Je suis père de famille»; on lui répond: «Ça ne compte pas.» Il dira demain: «Je suis propriétaire»; on lui répondra: «Ça ne signifie rien.» Le «droit éminent» d'enseignement appartenant à l'État et le «droit éminent» de propriété appartenant à l'État, c'est absolument la même théorie, la même doctrine et le même dogme.

Par toutes sortes de chemins, l'anticléricalisme mène donc au despotisme et de toutes sortes de façons il le renferme en lui.

Ai-je besoin de faire remarquer encore une fois que ce n'est son défaut que parce que c'est la source même d'où il dérive? L'anticlérical est despotiste. Ce n'est pas où il arrive, c'est de quoi il part; ce n'est pas la conséquence inattendue de ses démarches, c'est le premier pas de sa course; ou plutôt c'est à la fois d'où il part et où il arrive; car c'est de quoi il ne sort jamais. Il n'est autre chose, comme il a été dit mille fois, qu'un clérical retourné, et son Syllabus est exactement aussi contraire à la Déclaration des droits de l'homme que le Syllabus romain. Un plaisant dirait: «Il n'y a qu'une Déclaration des droits de l'homme, mais il y a deux déclarations des droits de Rome. Que voulez-vous que celle-là fasse contre les deux autres.»

L'anticlérical n'est qu'un clérical retourné, comme cela se voit, même historiquement, par ce fait que les contrées de France qui contiennent le plus d'anticléricaux effrénés sont celles qui contenaient, il n'y a pas un siècle, le plus de cléricaux enfiévrés; mais c'est un clérical d'autant plus violent et d'autant plus dangereux, ce me semble, qu'il ne compte pas, ou qu'il compte assez peu sur l'association privée, et qu'il ne compte que sur l'État, et que, par conséquent, il a tout intérêt à ce que l'État soit passionnément despotique pour qu'il le soit au service des passions antireligieuses.

Il est possible qu'un catholique soit libéral. Il place ou peut placer sa volonté de puissance ailleurs que dans l'État: «Je serai fort par corporation, par mon association, par mon Église.» Il est possible à un homme qui n'est ni clérical ni anticlérical d'être libéral: on peut être autoritaire tout en n'étant ni clérical ni anticlérical, mais au moins on a une raison de moins pour l'être.

Il est impossible à un anticlérical d'être libéral et il verse toujours dans le despotisme, si tant est qu'il n'y soit pas toujours.

Entre catholiques et anticatholiques la lutte continuera donc très longtemps, puisque toutes les erreurs que l'on peut signaler aux anticatholiques dans leurs doctrines sont les principes mêmes de leurs doctrines et les sources profondes et secrètes qui les alimentent. Entre les catholiques – soutenus par les libéraux tant que les catholiques seront mis hors du droit – et les anticatholiques soutenus par tout ce qui, en ce pays, a des tendances vers le despotisme démocratique sous une forme ou sous une autre, la bataille, commencée depuis si longtemps, n'est pas près ni de finir, ni de se relâcher, ni de s'interrompre.

CONCLUSIONS

Pour la faire finir, cette bataille séculaire qui nous épuise, il faudrait qu'il se constituât un parti de modérés très énergiques, chose du reste qui ne s'est jamais vue.

Ce parti ne serait ni clérical ni anticlérical et ne permettrait pas que l'on fût ni l'un ni l'autre.

Il serait patriote et libéral, et libéral par patriotisme. Il serait convaincu de cette vérité que tout peuple a intérêt, non seulement à n'éliminer hors de la cité, à ne détruire, en l'éliminant ainsi, aucune des forces nationales, mais encore qu'il a intérêt à convertir en forces nationales tous les éléments d'énergie intellectuelle et morale qui se trouvent en lui.

Or, étant donnée l'infinie diversité de tempéraments, de caractères, de tendances, de croyances, d'opinions et d'idées qui existe dans le monde moderne, la patrie ne peut être aimée par tous, que si elle admet cette diversité, c'est-à-dire que si elle respecte la liberté et la favorise; et la patrie ne peut être aimée que de quelques-uns, ce qui est un danger épouvantable, si, dans cette diversité d'opinions, elle en prend une pour la faire sienne et pour l'imposer.

Il en résulte d'abord qu'il n'y a rien de plus rétrograde et de plus réactionnaire que de rebrousser, au XXe siècle, vers l'État antique, vers l'État romain et vers l'État grec, qui a une doctrine religieuse à lui, qui l'impose, qui l'assène et qui fait boire la ciguë ou prendre le chemin de l'exil à ceux qui en ont une autre, démarche d'autant plus réactionnaire et rétrograde que jamais, même à Athènes et à Rome, on n'a proscrit la liberté d'enseigner, d'une façon permanente et continue, aussi rigoureusement qu'on le fait en France au temps où nous sommes.

Il en résulte ensuite que le patriotisme s'éteindrait bientôt si la patrie n'était plus, dans l'esprit des citoyens, qu'un être tracassier, impérieux et tyrannique, d'esprit étroit du reste et qui veut, comme un grand-père autoritaire et têtu, qu'on ne pense dans sa maison que comme il pense et qu'on ne parle qu'en répétant ce qu'il dit. C'est ainsi que les familles s'aigrissent et du reste se désunissent et se dissolvent.

Et l'on peut remarquer ceci, qui peut-être est fâcheux: c'est au moment où les hommes d'opinions dites «avancées» renoncent au patriotisme ou l'attiédissent singulièrement dans leurs cœurs, qu'on s'arrange d'autre part de manière à refroidir le patriotisme chez les hommes d'opinions dites arriérées, de sorte qu'on peut se demander où, bientôt, le patriotisme se réfugiera.

Le parti libéral, et libéral par patriotisme, que je suppose, dirait donc, autant par patriotisme que par dévotion à la Déclaration des droits de l'homme, d'une part à la «France noire»:

«Il vous est permis d'être noirs, à la condition que vous soyez patriotes.

«Il vous est permis de croire en Dieu et de dire que vous y croyez et pourquoi vous y croyez.

«Il vous est permis de vous associer en une communion de croyances, de pensées, d'espoirs et d'efforts, dite l'Église catholique, et de prêcher et d'enseigner ce que vous croyez; parce que ce sont des droits de l'homme et qu'il ne suffit pas d'être catholique pour cesser d'être tenu pour un être humain.

«Il vous est permis de ne pas croire que la Révolution française est la vérité absolue et définitive et la seule religion que l'humanité doive embrasser; et il vous est permis de donner toutes les raisons pourquoi vous ne croyez point cela.

«Il vous est permis de discuter toutes les lois que font les représentants de la majorité du peuple français; car ces lois n'ont rien de divin, de sacré, ni même d'irrévocable; il vous est permis de les discuter, à la condition que, de fait, vous y obéissiez et que vous disiez que, de fait, il y faut obéir.

«Il vous est permis de discuter la Constitution, comme font les professeurs de droit constitutionnel dans leurs cours et les philosophes sociologues dans leurs leçons; il vous est permis de la discuter tout entière, à la condition que, de fait, vous y obéissiez et que vous disiez que, de fait, il y faut obéir.

«Il vous est permis de faire à vos doctrines, idées et opinions, autant d'adhérents que vous en pourrez faire et d'intervenir dans les élections, sauf par corruption, tout autant que vous le voudrez; et nous considérons que, non seulement c'est votre droit, mais que c'est même votre devoir, comme il est le nôtre et parce qu'il est le nôtre, car mon droit c'est le tien et ton droit c'est le mien, et user de son droit est un devoir.

«Il ne vous est défendu que de détacher les citoyens de la patrie. Vous pouvez aller jusqu'à dire du mal de la patrie, entendons par là jusqu'à lui dire des vérités dures, mais de telle façon qu'il soit visible que vous n'en dites du mal que pour la rendre meilleure, et par conséquent par profonde affection pour elle, et à la condition que votre conclusion soit toujours qu'il faut aimer sa patrie, même, quand elle se trompe, plus diligemment, même, quand elle se trompe et ne jamais la renoncer, même dans le secret du cœur.

«Voilà tout ce qui vous est permis. Voilà la seule chose qui vous soit défendue. Allez, Messieurs.»

Il dirait d'autre part à la «France rouge»:

«Il vous est permis d'être rouges, à la condition d'être patriotes.

«Il vous est permis d'être athées et de faire profession et propagande d'athéisme.

«Il vous est permis de considérer le sentiment religieux comme une maladie mentale que les gens bien portants doivent mettre tous leurs efforts à guérir chez ceux qui en sont atteints.

«Il vous est permis de dire à la nation la plus intelligente de l'univers que l'évêque de Rome l'opprime et qu'elle gémit encore sous le joug accablant du pontife romain.

«Il vous est permis de vous associer en corporations puissantes pour combattre les menées infâmes et dangereuses de la «congrégation» et pour répandre vos doctrines.

«Cela vous est même recommandé; car si vous réussissiez, peut-être, combattant par vous-mêmes et par les corporations dont vous seriez membres et que vous soutiendriez, perdriez-vous l'habitude de vous adresser toujours à l'État et de le persécuter pour qu'il se charge de vos querelles, de vos vengeances et de l'exercice de vos haines et pour qu'il consacre toutes ses forces à combattre une partie considérable de la nation française, ce qui donne à celle-ci le désir et presque le droit d'en faire autant quand elle a la majorité.

«Il vous est permis d'user de la parole, du livre, de la brochure, de la revue et du journal, de tout enfin, excepté de la rue (exception qui frappera aussi vos adversaires), pour faire connaître, faire juger et faire accepter les vérités politiques, religieuses, économiques et sociologiques dont vous êtes détenteurs.

 

«Il ne vous est défendu que de détacher les citoyens de la patrie. Et, comme à vos adversaires, il vous est même permis d'en dire du mal, à la condition que vous n'en concluiez jamais, quelque faute qu'elle puisse commettre, qu'il faut la quitter, la renoncer, déserter son drapeau et tirer des coups de fusil sur ceux qui le tiennent.

«Voilà tout ce qui vous est permis; voilà la seule chose qui vous soit défendue. Allez, Messieurs.»

Le parti libéral dirait enfin au gouvernement, quel qu'il fût: «Vous n'êtes où l'on vous a mis que pour défendre la patrie et l'administrer, c'est-à-dire pour pourvoir à l'armée, à la marine, aux finances, à la police et à la justice. Là se bornent votre rôle et votre fonction et, du reste, votre capacité. Quand vous vous mêlez d'autre chose, vous sortez de vos droits et, du reste, vous le faites mal.

«Vous devriez n'avoir qu'un budget de la guerre et de la marine, qu'un budget de l'administration intérieure, qu'un budget de la justice et de la police et qu'un budget des affaires étrangères.

«Dès que vous vous mêlez de religion, d'enseignement et même d'industrie et de beaux-arts, vous devenez un parti, et c'est au profit d'un parti, blanc, rouge ou noir, selon les saisons, que vous vous mêlez de tout cela; de sorte que, créé pour assurer la concorde entre les citoyens, vous êtes toujours, plus ou moins vivement, un gouvernement de guerre civile; et que, créé pour défendre, maintenir et agrandir la patrie, vous mettez au moins une partie de vos efforts à la diminuer.

«Restreignez-vous donc à votre rôle et à votre emploi, pour n'être du reste que plus fort dans votre emploi et dans votre rôle.

«Assurez à l'extérieur la défense, à l'intérieur l'ordre et les bonnes finances. C'est tout. Vous n'avez pas autre chose à faire.

«Ne vous considérez pas comme le premier théologien de France, le premier moraliste de France, le premier professeur de France et le premier amateur d'art de France. Où avez-vous pris que vous fussiez tout cela? Il n'en est rien, je vous assure, et à la fois vous avez trop de prétention et vous vous donnez trop de mal.

«Ne vous réduisez pas, nous le concédons par crainte des changements trop brusques, ne vous réduisez pas, du jour au lendemain, à ce simple rôle de soldat sur la frontière et de gendarme à l'intérieur que nous disons qui est le vôtre; mais, en attendant une simplification plus complète, au moins sur les domaines qui ne sont pas les vôtres, où vous avez empiété et où vous vous trouvez installé, soyez neutre, véritablement neutre; n'ayez pas d'opinion; ne servez aucun parti.

«N'imposez aucune doctrine à vos professeurs, ne leur en interdisez aucune, sauf l'antipatriotisme; car cela rentre précisément dans votre rôle d'interdire celle-là.

«N'exigez de vos fonctionnaires, quels qu'ils soient, aucune qualité confessionnelle, aucune doctrine et aucune pratique soit religieuse, soit antireligieuse.

«N'exigez de vos fonctionnaires, quels qu'ils soient, aucune opinion politique, et soyez absolument indifférent à celles qu'ils peuvent avoir, pourvu qu'ils s'acquittent bien de leurs fonctions et qu'ils soient dévoués au pays.

«Laissez à la magistrature, quoique nommée par vous, une indépendance absolue et ne la mettez jamais, par promesses, encouragements, intimidation et autres influences, au service d'un parti, quelque bon que puisse être à vos yeux ce parti.

«Pour ce qui est de la masse des citoyens, qu'ils sentent bien, tous, que vous ne voulez pas même savoir à quel parti ils appartiennent et que ce serait en vain que, pour obtenir des faveurs et bénéficier d'injustices, ils se mettraient dans celui-ci, dans celui-là ou dans un troisième.

«Vous aimez à répandre des idées. N'en répandez qu'une, c'est que vous êtes la justice et l'impartialité absolues. A cause de l'expérience acquise, on ne vous croira pas tout de suite, mais on finira par s'apercevoir que vous dites vrai.»

A ce discours, il est infiniment probable que le gouvernement répondrait: «Je dépends des électeurs. Avec votre système, j'en aurais pour moi trois mille sur huit millions. Souffrez que je sois le gouvernement d'un parti, comme tous les gouvernements depuis 1789; et du parti le plus fort.

– Mais être le gouvernement d'un parti, c'est être gouverné par un parti. Omnia serviliter pro dominatione.

– A qui le dites-vous? C'est pourtant le seul moyen d'exister.»

Il faudrait voir. Ce n'est pas si certain qu'on s'obstine à le croire. Un gouvernement de parti est vite dévoré par son parti même, dont il ne réussit jamais à satisfaire tous les appétits. Un gouvernement de justice impose beaucoup. Il a, dans une République, quelque chose de la majesté du gouvernement royal, lequel est par définition et quelquefois en réalité, au-dessus de tous les partis; et, naturellement, c'est dans une République qu'on est le plus sensible à ce qui est le bon aspect du gouvernement royal.

Mon scepticisme ne va peut-être pas assez loin, et c'est toujours ce que je suis tenté de lui reprocher; mais j'ai tendance à croire qu'un gouvernement de justice se créerait assez vite un très grand parti et pourrait ainsi être, lui aussi, un gouvernement de parti, mais d'un parti juste.

En tout cas, pour continuer un instant le dialogue, le parti libéral dit au gouvernement: «Soyez libéral.» Le gouvernement répond aux libéraux: «Soyez les plus nombreux, et je vous jure bien que je serai libéral. Je ne pourrai même pas faire autrement.»

C'est donc aux libéraux à être les plus nombreux. C'est pour en augmenter le nombre que j'ai écrit ces quelques pages, après d'autres, au cas que je pourrais avoir quelque force de persuasion. – Mais c'est sur ce point que mon scepticisme est radical.

Août-Novembre 1905.

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