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Cela suffisait à Léonie; elle baisait cent fois les caractères pointés à l’aiguille.

La Cour martiale poursuivait opiniâtrement sa tâche homicide. Treize[70] condamnés avaient déjà péri sur l’échafaud.

On parlait d’une nouvelle fournée!

Il n’était pas douteux que Paul y serait compris. Léonie ne vivait plus; sa raison s’égarait, quand elle reçut l’avis suivant, dans une Imitation de Jésus-Christ:

«Vu l’homme; nuit prochaine».

Quelques jours auparavant, Jean-Baptiste avait réussi à voir Co-lo-mo-o, enfermé dans la tour du Télégraphe, au-dessus du cap Diamant. Il lui avait donné les limes cachées dans sa béquille, et l’Indien, ayant scié ses fers, s’était fabriqué une corde avec la paille de son lit.

De la mie de pain, frottée de rouille, lui servait à dissimuler l’effraction de la chaîne qu’il avait aux pieds; un trou creusé dans son cachot recelait, pendant le jour, la corde de paille, jusqu’à ce qu’elle fût terminée.

Ensuite, avec les limes, avec les débris de ses fers, avec ses ongles, il pratiqua une ouverture sous la porte, et le 23 janvier 1839, à minuit, Co-lo-mo-o quittait furtivement la prison où il languissait depuis près de trois mois.

Au bas du cap Diamant, Léonie, accompagnée de son fidèle Antoine, tenait ses regards attachés sur la tour du Télégraphe, avec une tension telle qu’elle en avait le vertige, et que des fantômes sanglants tourbillonnaient devant eux.

Les minutes, pour elle, étaient effroyablement longues. Mais elle ne les pouvait compter. Elle avait perdu la mesure du temps; elle n’en savait plus apprécier la durée.

Il faisait noir, bien noir, le vent soufflait en tempête, et le Saint-Laurent poussait sur ses grèves des hurlements de bête fauve.

Voici qu’une ombre se profile au faîte de cette tour si avidement scrutée; mais cette ombre est haute, mais elle se détache si peu des ténèbres environnantes, qu’il faut les yeux d’une amante pour la discerner à pareille distance. Le cœur de la jeune fille cesse de palpiter, ses paupières se ferment, des bourdonnements remplissent ses oreilles.

Soudain, répété par mille échos, un coup de feu retentit au sommet de la citadelle.

Et, à la lueur de l’éclair qui a déchiré l’obscurité, Antoine a vu un homme suspendu dans l’espace à une corde attachée à la tour.

Le bruit sourd et mat, sinistre, d’un corps s’écrasant sur le sol, résonne.

– Ah! exclame Antoine, le malheureux a été découvert; une sentinelle l’a tué!

Léonie n’est plus là! À peine a-t-elle entendu la détonation qu’elle s’est élancée vers la cime du cap. Une ardeur incroyable, surnaturelle, l’anime, lui prête des ailes. Avec l’agilité d’une panthère, elle escalade ces rochers dont l’aspect seul fait frémir, elle arrive au pied de la tour, se penche sur le corps pantelant, brisé, de Co-lo-mo-o, le baigne de ses larmes et de ses baisers.

On crie sur les remparts, on ouvre avec fracas les lourdes portes de la citadelle; des torches circulent çà et là. Léonie est menacée. Si on l’aperçoit on tirera sur elle. Mais est-ce qu’elle voit, est-ce qu’elle entend, est-ce qu’au-delà de ce corps il y a un monde pour elle?

L’Indien n’a point rendu l’âme encore. Il pousse un gémissement. Il cherche de sa main affaiblie la main de la jeune fille, la pose sur son cœur et laisse tomber ces paroles dans un dernier soupir:

– Je l’aimais pourtant!

…………………………………

Un an après, aux Ursulines de Québec entrait mademoiselle Léonie de Repentigny, en religion sœur Paul.

Jean-Baptiste, le sourd-muet, avait été déporté à Sydney.

Giguy, 28 juillet – 17 août 1862.

Note

[1] C’est l’orthographe exacte du nom que, par erreur, j’ai quelquefois appelé Ramer dans mes précédents ouvrages.

[2] C’est ainsi que les Iroquois appellent le Saint-Laurent.

[3] Les établissements pour la traite sont nommés fort, factorerie ou poste. Voir la Huronne.

[4] Village. Voir la Tête-Plate, les Nez-Percés.

[5] Divinité des sorciers iroquois.

[6] Divinité du mal.

[7] Les Indiens nomment les Anglais Habits-Rouges ou Kingsors, corruption de King Georges (Roi Georges).

[8] Garneau, Histoire du Canada, t. I, p. 21.

[9] Garneau, Histoire du Canada, t. I, p. 23.

[10] Voir la Huronne.

[11] Située à une demi-lieue au-dessous de Québec.

[12] Le clergé catholique s’entête à n’appeler Montréal que par ce nom.

[13] Les Canadiens-français nomment ainsi les barils de farine, provisions, etc.

[14] Après ces incendies successifs, plus de vingt mille habitants se trouvèrent sans logements.

[15] Chose triste à dire, mais trop facile à comprendre, partout où les populations protestante et catholique se trouvent en présence, on voit la première prospérer, acquérir des richesses, l’autre décroître, s’appauvrir.

[16] Pour l’étymologie de ce nom, voir la Huronne.

[17] La population des deux Canadas dépasse actuellement deux millions d’habitants. Il n’est guère de peuples qui se soient accrus aussi rapidement. Comme on le concevra aisément, les Anglo-Saxons ont pris plus de développement que les Franco-Canadiens, depuis la conquête du Canada par l’Angleterre, en 1789. Alors les premiers ne comptaient pas plus de sept à huit mille âmes dans le pays qu’ils occupaient sous le nom de Haut-Canada, à l’ouest de Montréal. De récentes statistiques nous montrent leur progression vraiment fabuleuse :

1814… 95 000

1824… 151 097

1829… 198 440

1832… 261 066

1834… 320 693

1836… 372 502

1842… 486 055

1848… 723 292

1852… 952 054

1855… 1 003 121

1860… 1 060 305

Quant au Bas-Canada, il a suivi l’échelle suivante :

Lors de la conquête, soixante mille Français à peine l’habitaient. À partir du premier recensement anglais on trouve :

1825… 423 630

1827… 471 876

1831… 511 920

1844… 690 782

1882… 890 661

1888… 930 207

1860… 1 000 044

M. Chauveau, surintendant de l’instruction publique au Canada accompagne ces chiffres d’observations très judicieuses.

«Si, dit-il, l’on considère que cet accroissement est presque entièrement dû à la multiplication par le seul effet des naissances de 60 000 Français, on le trouvera certainement remarquable. Quelques centaines de familles, presque toutes normandes ou bretonnes, ont originairement peuplé les vastes territoires qui composaient la Nouvelle-France. À la conquête, un grand nombre de familles se sont embarquées pour la France, et, depuis ce temps, il n’a pas été ajouté aux familles françaises de la colonie. Quelques individus isolés, aussitôt repartis qu’arrivés, ont, pour bien dire, à peine visité la Nouvelle-France, passée sous la domination de l’Angleterre. Malgré le nombre considérable de Français et de Belges qui émigrent en Amérique, il n’y a actuellement (1858) que 1366 natifs de ces deux pays. Loin de gagner par l’immigration, la race française a, au contraire, constamment perdu par une émigration qui s’est faite dès l’origine et n’a cessé de se faire vers les États-Unis, les plaines de l’ouest et jusqu’à la Louisiane et au Texas… Bien plus, une émigration plus formidable s’est faite depuis quelques années. Des ouvriers par bandes, des familles de cultivateurs par essaims ont laissé le Canada, etc..!»

Les dilapidations insensées du trésor public, la corruption effroyable des hommes politiques, l’augmentation constante des impôts, la lourdeur de la dette coloniale, qui pèse de près de deux cents francs sur chaque tête d’individu, sont les principaux motifs de cette émigration. Quant à la fécondité des Canadiens, elle peut passer pour proverbiale. Les « familles de douze ou quinze enfant » sont communes. J’ai connu des femmes qui avaient donné le jour à vingt-cinq, et une à trente et un!

[18] Pour plus amples détails, qu’il m’est impossible de donner ici, voir la Huronne.

[19] Voir la Huronne.

[20] On appelle ainsi les métis nés d’une peau blanche et d’une mère indienne.

[21] Les Indiens appellent rassade les grains de verroterie enfilés dans des piquants de porc-épic.

[22] Un des principaux chefs de la police.

[23] Les Canadiens nomment ainsi les territoires du Nord-Ouest. Voir la Huronne.

[24] Je ne crois pas inutile de prévenir mes lecteurs que toutes les localités que je cite existent et que, dans mes descriptions de ces localités, je tâche et tâcherai toujours d’être aussi exact que possible, mon but, en publiant ces ouvrages, étant de raconter, sous une forme anecdotique, mes voyages dans l’Amérique septentrionale.

[25] Au Canada, les gens de la campagne sont ainsi nommés, et cette qualification leur a sans doute été appliquée aux premiers temps de la colonisation par opposition aux gens qui faisaient la chasse ou couraient le pays en quête d’aventures, tandis qu’eux ils habitaient des demeures fixes.

[26] Marques de la dégradation d’un homme chez les sauvages de l’Amérique septentrionale.

[27] Voir la Huronne.

[28] On sait que les rapides sont des écueils à fleur d’eau.

[29] Durant l’hiver de 1854-55, le froid fut excessif au Canada. Le thermomètre descendit jusqu’à 35° Réaumur. Pour la première fois, de mémoire d’homme, une partie des rapides du Sault Saint-Louis gela, et je fus assez heureux pour pouvoir, avec deux amis, visiter l’île au Diable, en y passant de la rive septentrionale sur le pont de glace. Cette petite expédition fit événement dans la pays, où bien peu de personnes peuvent se flatter d’avoir exploré l’île en question.

[30] Les Indiens de Caughnawagha et de Lorette sont ainsi désignés par les Canadiens-français.

[31] Excursion.

[32] Chez les Canadiens-français ce terme s’emploie ordinairement pour futur, fiancé, amoureux.

[33] Les territoires habités par les Indiens du Nord-Ouest américain sont ainsi nommés au Canada.

 

[34] Voir les Nez-Percés.

[35] Cette locution, comme une foule d’autres employées en Normandie est très usitée au Canada, même dans la haute classe de la société.

[36] Le clergé catholique a joué un rôle prépondérant dans la colonisation canadienne ; aussi n’est-il pas étonnant qu’on trouve une si abondante quantité de noms de saints et de saintes pour designer les localités.

[37] Les Indiens appellent ainsi leurs villages.

[38] C’est le nom donné par les Indiens aux bateaux à vapeur : ils appellent bête-à-feu, sans qualificatif, les locomotives de chemin de fer, et, par extension, les convois.

[39] On sait que le lunch est le goûter des Anglais et des Américains.

[40] C’est le vieux mot français, toujours employé au Canada comme équivalent de sac.

[41] Ils l’appliquent dans le cas de séduction, adultère, mariage entre gens d’âges très différents, etc.

[42] Voir la Huronne.

[43] La Huronne, prologue.

[44] Les Indiens appellent ainsi les Canadiens-français.

[45] Voir la Huronne.

[46] Abolis par un acte du parlement en 1835 seulement.

[47] Garneau, Histoire du Canada.

[48] Rapport de Lord Durham, envoyé après les premiers troubles pour faire une enquête sur les affaires du Canada.

[49] Historique. – Il est à regretter que M. Garneau n’ait pas reproduit dans son Histoire du Canada, cette lettre qui me semble avoir l’importance d’un document d’État.

[50] Locution canadienne. Elle signifie Changer de parti.

[51] C’est le nom donné, en Angleterre et en Amérique, à l’estrade qui sert, dans les meetings, aux orateurs politiques.

[52] Ce portrait de M. Papineau était encore vrai en 1833, quand nous avons eu l’avantage de le voir et de l’entendre.

[53] On sait que ce terme, purement américain, signifie exécuter sans forme de procès.

[54] Les Canadiens ne se servent jamais du mot village.

[55] Voir la Huronne.

[56] Dans la deuxième édition de l’Histoire de M. Garneau, on trouve la note suivante:

«Le docteur O’Callaghan m’écrivait d’Albany, le 19 juillet 1852: Si vous devez blâmer le mouvement, blâmez ceux qui l’ont provoqué et qui doivent en répondre devant l’histoire. Quant à nous, mon ami, nous fûmes les victimes, non les conspirateurs; et, fussé-je sur mon lit du mort, je ne pourrais que déclarer, en présence du ciel, que je n’avais pas plus l’idée d’un mouvement de résistance quand je quittai Montréal et me rendis à la rivière Richelieu avec M. Papineau, que je ne songe maintenant à être évêque de Québec. Je vous dirai aussi que M. Papineau et moi, nous nous cachâmes dans une ferme de la paroisse Saint-Marc, de peur que notre présence n’alarmât le pays, et ne servit de prétexte à la témérité!.. Je voyais bien aussi que le pays n’était pas prêt.»

M. Garneau a publié cette note en anglais.

[57] Textuel.

[58] Voir la Tête-Plate, les Nez-Percés.

[59] Historique.

[60] Une dame anglaise, avec qui j’eus le plaisir de faire une excursion au Saguenay, en 1853, s’écrie, en racontant ses impressions: «À chaque minute de nouvelles sublimités nous saluaient, les rives devenaient plus élevées, plus hardies, au point que l’émotion comprimée inondait l’âme et la rendait malade ; les paroles ne pouvaient la soulager, les paroles ne pourraient décrire ce qu’elle éprouvait».

[61] Plus logiques que nous, les Canadiens ont traduit les mots anglais square par carré, wagon par char, rail par lisse, etc.

[62] Les exemples de cette horrible barbarie ne sont pas rares dans l’histoire du Canada. En 1832, un patriote canadien, Nadeau, fut pris par les Anglais et accroché, au moyen d’un clou planté dans la mâchoire inférieure, à l’aile d’un moulin à vent. Il mit trois jours à mourir!

[63] Voir la Huronne.

[64] Il s’agit ici du frère de celui qui combattit à Saint-Denis.

[65] C’est le nom donné par les Indiens au gouverneur du Canada.

[66] Une des exclamations ordinaires des Indiens ; les Anglais l’écrivent waught.

[67] Historique. – (English Reporter, années 1838-39.)

[68] Titre donné aux femmes des lords anglais; il est intraduisible en français.

[69] Historique. – Hélas!

[70] Et non dix, comme je l’ai dit par erreur dans la Huronne.