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Œuvres de Napoléon Bonaparte, Tome IV

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Berlin, le 31 octobre 1806.
Vingt-quatrième bulletin de la grande armée

Stettin est en notre pouvoir. Pendant que la gauche du grand-duc de Berg, commandée par le général Milhaud, faisait mettre bas les armes, à une colonne de six mille hommes à Passewalk, la droite, commandée par le général Lasalle, sommait la ville de Stettin, et l'obligeait à capituler. Stettin est une place en bon état, bien armée et bien palissadée: cent-soixante pièces de canon, des magasins considérables, une garnison de six mille hommes de belles troupes, prisonnière, beaucoup de généraux, tel est le résultat de la capitulation de Stettin, qui ne peut s'expliquer que par l'extrême découragement qu'a produit sur l'Oder et dans tous les pays de la rive droite la disparition de la grande armée prussienne.

De toute cette belle armée de cent quatre-vingt mille hommes, rien n'a passé l'Oder. Tout a été pris, ou erre encore entre l'Elbe et l'Oder, et sera pris avant quatre jours. Le nombre des prisonniers montera à près de cent mille hommes. Il est inutile de faire sentir l'importance de la prise de la ville de Stettin, une des places les plus commerçantes de la Prusse, et qui assure à l'armée un bon pont sur l'Oder et une bonne ligne d'opérations.

Du moment que les colonnes du duc de Weimar et du général Blucher, qui sont débordées par la droite et la gauche, et poursuivies par la queue, seront rendues, l'armée prendra quelques jours de repos.

On n'entend point encore parler des Russes. Nous désirons fort qu'il en vienne une centaine de milliers. Mais le bruit de leur marche est une vraie fanfaronnade. Ils n'oseront pas venir à notre rencontre. La journée d'Austerlitz se représente à leurs yeux. Ce qui indigne les gens sensés, c'est d'entendre l'empereur Alexandre et son sénat dirigeant, dire que ce sont les alliés qui ont été battus. Toute l'Europe sait bien qu'il n'y a pas de familles en Russie qui ne portent le deuil.

Ce n'est point la perte des alliés qu'elle pleure: cent quatre-vingt-quinze pièces de bataille russes qui ont été prises, et qui sont à Strasbourg, ne sont pas les canons des alliés.

Les cinquante drapeaux russes qui sont suspendus a Notre-Dame de Paris, ne sont point les drapeaux des alliés. Les bandes de Russes qui sont morts dans nos hôpitaux, ou sont prisonniers dans nos villes, ne sont pas les soldats des alliés.

L'empereur Alexandre, qui commandait à Austerlitz et à Vischau, avec un si grand corps d'armée, et qui faisait tant de tapage, ne commandait pas les alliés.

Le prince qui a capitulé, et s'est soumis à évacuer l'Allemagne par journées d'étapes, n'était pas sans doute un prince allié. On ne peut que hausser les épaules à de pareilles forfanteries. Voilà le résultat de la faiblesse des princes et de la vénalité des ministres. Il était bien plus simple pour l'empereur Alexandre de ratifier le traité de paix qu'avait conclu son plénipotentiaire, et de donner le repos au continent. Plus la guerre durera, plus la chimère de la Russie s'effacera, et elle finira par être anéantie; autant la sage politique de Catherine était parvenue à faire de sa puissance un immense épouvantail, autant l'extravagance et la folie des ministres actuels la rendront ridicule en Europe.

Le roi de Hollande, avec l'avant-garde de l'armée du Nord, est arrivé, le 21, à Gottingue. Le maréchal Mortier, avec les deux divisions du huitième corps de la grande armée, commandées par les généraux Lagrange et Dupas, est arrivé le 26 à Fulde.

Le roi de Hollande a trouvé, à Munster, dans le comté de la Marck et autres états prussiens, des magasins et de l'artillerie.

On a ôté à Fulde et à Brunswick les armes du prince d'Orange et celles du duc. Ces deux princes ne régneront plus. Ce sont les principaux auteurs de cette nouvelle coalition.

Les Anglais n'ont pas voulu faire la paix; ils la feront; mais la France aura plus d'états et de côtes dans son système fédératif.

Berlin, le 2 novembre 1806.
Vingt-cinquième bulletin de la grande armée

Le général de division Beaumont a présenté aujourd'hui à l'empereur cinquante nouveaux drapeaux et étendards pris sur l'ennemi; il a traversé toute la ville avec les dragons qu'il commande, et qui portaient ces trophées; le nombre des drapeaux, dont la prise a été la suite de la bataille de Jéna, s'élève en ce moment à deux cents.

Le général Davoust a fait cerner et sommer Custrin, et cette place s'est rendue. On y a fait quatre mille hommes prisonniers de guerre. Les officiers retournent chez eux sur parole, et les soldats sont conduits en France. Quatre-vingt-dix pièces de canon ont été trouvées sur les remparts; la place, en très-bon état, est située au milieu des marais; elle renferme des magasins considérables. C'est une des conquêtes les plus importantes de l'armée; elle a achevé de nous rendre maître de toutes les places sur l'Oder.

Le maréchal Ney va attaquer en règle Magdebourg, et il est probable que cette forteresse fera peu de résistance.

Le grand-duc de Berg avait son quartier général, le 31, à Friedland. Ses dispositions faites, il a ordonné l'attaque de la colonne du général prussien Bila que le général Beker a chargé dans la plaine en avant de la petite ville d'Anklam, avec la brigade de dragons du général Boussart. Tout a été enfoncé, cavalerie et infanterie, et le général Beker est entré dans la ville avec les ennemis, qu'il a forcés de capituler. Le résultat de cette capitulation a été quatre mille prisonniers de guerre: les officiers sont renvoyés sur parole, et les soldats sont conduits en France. Parmi ces prisonniers, se trouve le régiment de hussards de la garde du roi, qui, après la guerre de sept ans, avaient reçu de l'impératrice Catherine, en témoignage de leur bonne conduite, des pelisses de peau de tigre.

La caisse du corps du général Bila, et une partie des bagages avaient passé la Penne et se trouvaient dans la Poméranie suédoise. Le grand-duc de Berg les a fait réclamer.

Le 1er novembre au soir, le grand-duc avait son quartier-général à Demmin.

Le général Blucher et le duc de Weimar, voyant le chemin de Stettin fermé, se portaient sur leur gauche, comme pour retourner sur l'Elbe; mais le maréchal Soult avait prévu ce mouvement: et il y a peu de doute que ces deux corps ne tombent bientôt entre nos mains.

Le maréchal a réuni son corps d'armée à Stettin, où l'on trouve encore chaque jour des magasins et des pièces de canon.

Nos coureurs sont déjà entrés en Pologne.

Le prince Jérôme, avec les Bavarois et les Wurtembergeois, formant un corps d'armée, se porte en Silésie.

S.M. a nommé le général Clarke gouverneur général de Berlin et de la Prusse, et a déjà arrêté toutes les bases de l'organisation intérieure du pays.

Le roi de Hollande marche sur Hanovre, et le maréchal Mortier sur Cassel.

Berlin, le 3 novembre 1806.
Vingt-sixième bulletin de la grande armée

On n'a pas encore reçu la nouvelle de la prise des colonnes du général Blucher et du duc de Weimar. Voici la situation de ces deux divisions ennemies et celle de nos troupes. Le général Blucher, avec sa colonne, s'était dirigé sur Stettin. Ayant appris que nous étions déjà dans cette ville, et que nous avions gagné deux marches sur lui, il se reploya, de Gransée, où nous arrivions en même temps que lui, sur Neustrelitz, où il arriva le 30 octobre, ne s'arrêtant point là, et se dirigeant sur Wharen, où on le suppose arrivé le 31, avec le projet de chercher à se retirer du côté de Rostock pour s'y embarquer.

Le 31, six heures après son départ, le général Savary, avec une colonne de six cents chevaux, est arrivé à Strelitz, où il a fait prisonnier le frère de la reine de Prusse, qui est général au service du roi.

Le 1er novembre, le grand-duc de Berg était à Demmin, filant pour arriver a Rostock, et couper la mer au général Blucher.

Le maréchal prince de Ponte-Corvo avait débordé le général Blucher. Ce maréchal se trouvait le 31, avec son corps d'armée, à Neubrandebourg, et se mettait en marche sur Wharen, ce qui a dû le mettre aux prises, dans la journée du 1er, avec le général Blucher.

La colonne commandée par le duc de Weimar était arrivée le 29 octobre à Neustrelitz; mais instruit que la route de Stettin était coupée, et ayant rencontré les avant-postes français, il fit une marche rétrograde, le 29, sur Wistock. Le 30, le maréchal Soult en avait connaissance par ses hussards, et se mettait en marche sur Wertenhausen. Il l'a immanquablement rencontré le 31 ou le 1er. Ces deux colonnes ont donc été prises hier, ou aujourd'hui au plus tard.

Voici leurs forces: le général Blucher a trente pièces de canon, sept bataillons d'infanterie et quinze cents hommes de cavalerie. Il est difficile d'évaluer la force de ce corps; ses équipages, ses caissons, ses munitions ont été pris. Il est dans la plus pitoyable situation.

Le duc de Weimar a douze bataillons et trente-cinq escadrons en bon état; mais il n'a pas une pièce d'artillerie.

Tels sont les faibles débris de toute l'armée prussienne: il n'en restera rien. Ces deux colonnes prises, la puissance de la Prusse est anéantie, et elle n'a presque plus de soldats. En évaluant à dix mille hommes ce qui s'est retiré avec le roi sur la Vistule, ce serait exagérer.

M. Schulenbourg s'est présenté à Strelitz pour demander un passeport pour Berlin. Il a dit au général Savary: «Il y a huit heures que j'ai vu passer les débris de la monarchie prussienne. Vous les aurez aujourd'hui ou demain. Quelle destinée inconcevable et inattendue! La foudre nous a frappés.» Il est vrai que depuis que l'empereur est entré en campagne, il n'a pas pris un moment de repos. Toujours en marches forcées, devinant constamment les mouvemens de l'ennemi. Les résultats en sont tels qu'il n'y en a aucun exemple dans l'histoire. De plus de cent cinquante mille hommes qui se sont présentés à la bataille de Jéna, pas un ne s'est échappé pour en porter la nouvelle au-delà de l'Oder. Certes, jamais agression ne fut plus injuste; jamais guerre ne fut plus intempestive. Puisse cet exemple servir de leçon aux princes faibles, que les intrigues, les cris et l'or de l'Angleterre excitent toujours à des entreprises insensées.

 

La division bavaroise, commandée par le général Wrede, est partie de Dresde le 31 octobre. Celle commandée par le général Deroi est partie le 1er novembre. La colonne wurtembergeoise est partie le 3. Toutes ces colonnes se rendent sur l'Oder; elles forment le corps d'armée du prince Jérôme.

Le général Durosnet a été envoyé à Odesberg avec un parti de cavalerie immédiatement après notre entrée à Berlin, pour intercepter tout ce qui se jetterait du canal dans l'Oder. Il a pris plus de quatre-vingts bateaux chargés de munitions de toute espèce qu'il a envoyés à Spandau.

On a trouvé à Custrin des magasins de vivres suffisans pour nourrir l'armée pendant deux mois.

Le général de brigade Macon, que l'empereur avait nommé commandant de Leipsick, est mort dans cette ville d'une fièvre putride. C'était un brave soldat et un parfait honnête homme. L'empereur en faisait cas, et a été très-affligé de sa mort.

Berlin, le 6 novembre 1806.
Vingt-septième bulletin de la grande armée

On a trouvé à Stettin une grande quantité de marchandises anglaises, à l'entrepôt sur l'Oder; on y a trouvé cinq cents pièces de canon et des magasins considérables de vivres.

Le 1er novembre, le grand-duc de Berg était à Demmin: le 2 à Tetetow, ayant sa droite sur Rostock. Le général Savary était le 1er à Kratzebourg, et le 2, de bonne heure, à Wharen et à Jabel. Le prince de Ponte-Corvo attaqua, le soir du 1er à Jabel, l'arrière-garde de l'ennemi. Le combat fut assez soutenu; le corps ennemi fut plusieurs fois mis en déroute: il eût été entièrement enlevé si les difficultés de passer le pays de Mecklembourg ne l'eussent encore sauvé ce jour-là. Le prince de Ponte-Corvo, en chargeant avec la cavalerie, a fait une chute de cheval, qui n'a eu aucune suite. Le maréchal Soult est arrivé le 2 à Plauer.

Ainsi, l'ennemi a renoncé à se porter sur l'Oder. Il change tous les jours de projets. Voyant que la route de l'Oder lui était fermée, il a voulu se retirer sur la Poméranie suédoise. Voyant celle-ci également interceptée, il a voulu retourner sur l'Elbe; mais le maréchal Soult l'ayant prévenu, il paraît se diriger sur le point le plus prochain des côtes. Il doit avoir été à bout le 4 ou le 5 novembre. Cependant tous les jours un ou deux bataillons, et même des escadrons de cette colonne tombent en notre pouvoir. Elle n'a plus ni caissons, ni bagages.

Le maréchal Lannes est à Stettin; le maréchal Davoust à Francfort; le prince Jérôme en Silésie. Le duc de Weimar a quitté le commandement pour retourner chez lui, et l'a laissé à un général peu connu.

L'empereur a passé aujourd'hui la revue de la division de dragons du général Beaumont, sur la place du palais de Berlin. Il a fait différentes promotions.

Tous les hommes de cavalerie qui se trouvaient à pied, se sont rendus a Potsdam, où l'on a envoyé les chevaux de prise. Le général de division Bourcier a été chargé de la direction de ce grand dépôt. Deux mille dragons à pied qui suivaient l'armée, sont déjà montés.

On travaille avec activité à armer la forteresse de Spandau, et à rétablir les fortifications de Wittemberg, d'Erfurt, de Custrin et de Stettin.

Le maréchal Mortier, commandant le huitième corps de la grande armée, s'est mis en marche le 30 octobre sur Cassel: il y est arrivé le 31.

Berlin, 7 novembre 1806.
Vingt-huitième bulletin de la grande armée

Sa majesté a passé aujourd'hui, sur la place du palais de Berlin, depuis onze heures du matin jusqu'à trois après-midi, la revue de la division de dragons du générai Klein. Elle a fait plusieurs promotions. Cette division a donné avec distinction à la bataille de Jéna et a enfoncé plusieurs carrés d'infanterie prussienne. L'empereur a vu ensuite défiler le grand parc de l'armée, l'équipage de pont et le parc du génie: le grand parc est commandé par le général d'artillerie Saint-Laurent; l'équipage de pont, par le colonel Boucher, et le parc de génie, par le général du génie Casals.

S.M. a témoigné au général Songis, inspecteur-général, sa satisfaction de l'activité qu'il mettait dans l'organisation des différentes parties du service de l'artillerie de cette grande armée.

Le général Savary a tourné près de Wismar sur la Baltique, à la tête de cinq cents chevaux du premier de hussards et du septième de chasseurs, le général prussien Husdunne, et l'a fait prisonnier avec deux brigades de hussards et deux pièces de canon. Cette colonne appartient au corps que poursuivent le grand-duc de Berg, le prince de Ponte-Corvo et le maréchal Soult, lequel corps, coupé de l'Oder et de la Poméranie, paraît acculé du côté de Lubeck.

Le colonel Excelmans, commandant le premier régiment de chasseurs du maréchal Davoust, est entré à Posen, capitale de la Grande-Pologne. Il a été reçu avec un enthousiasme difficile à peindre; la ville était remplie de monde, les fenêtres parées comme en un jour de fête;: à peine la cavalerie pouvait-elle se faire jour pour traverser les rues.

Le général du génie Bertrand, aide-de-camp de l'empereur, s'est embarqué sur le lac de Stettin, pour faire la reconnaissance de toutes les passes.

On a formé à Dresde et à Wittemberg un équipage de siège pour Magdebourg: l'Elbe en est couvert. Il est à espérer que cette place ne tiendra pas long-temps. Le maréchal Ney est chargé de ce siège.

Berlin, le 9 novembre 1806.
Vingt-neuvième, bulletin de la grande armée

La brigade de dragons du général Beker a paru aujourd'hui à la parade.

S.M. voulant récompenser la bonne conduite des régimens qui la composent, a fait différentes promotions.

Mille dragons, qui étaient venus à pied à l'armée, et qui ont été montés au dépôt de Potsdam, ont passé hier la revue du général Bessières; ils ont été munis de quelques objets d'équipement qui leur manquaient, et ils partent aujourd'hui pour rejoindre leurs corps respectifs, pourvus de bonnes selles et montés sur de bons chevaux, fruits de la victoire.

S.M. a ordonné qu'il serait frappé une contribution de cent cinquante millions sur les états prussiens et sur ceux des alliés de la Prusse.

Après la capitulation du prince Hohenlohe, le général Blucher, qui le suivait, changea de direction, et parvint à se réunir à la colonne du duc de Weimar, à laquelle s'était jointe celle du prince Frédéric-Guillaume Brunswick-Oels, fils du duc de Brunswick. Ces trois divisions se trouvèrent ainsi sous les ordres du général Blucher. Différentes petites colonnes se joignirent également à ce corps. Pendant plusieurs jours, ces troupes essayèrent de pénétrer par des chemins que les Français pouvaient avoir laissés libres; mais les marches combinées du grand-duc de Berg, du maréchal Soult et du prince de Ponte-Corvo avaient obstrué tous les passages. L'ennemi tenta d'abord de se porter sur Anklam, et ensuite sur Rostock: prévenu dans l'exécution de ce projet, il essaya de revenir sur l'Elbe; mais s'étant trouvé encore prévenu, il marche devant lui pour gagner Lubeck.

Le 4 novembre, il prit position à Crevismulen; le prince de Ponte-Corvo culbuta l'arrière-garde, mais il ne put entamer ce corps, parce qu'il n'avait que six cents hommes de cavalerie, et que celle de l'ennemi était beaucoup plus forte. Le général Vattier a fait, dans cette affaire, de très-belles charges, soutenues par les généraux Pactod et Maisons, avec le vingt-septième régiment d'infanterie légère et le huitième de ligne.

On remarque, dans les différentes circonstances de ce combat, qu'une compagnie d'éclaireurs du quatre-vingt-quatorzième régiment, commandée par le capitaine Razout, fut entourée par quelques escadrons ennemis: mais les voltigeurs français ne redoutent point le choc des cuirassiers prussiens; ils les reçurent de pied-ferme, et firent un feu si bien nourri, et si adroitement dirigé, que l'ennemi renonça à les enfoncer. On vit alors les voltigeurs à pied poursuivre la cavalerie à toute course: les Prussiens perdirent sept pièces de canon, et mille hommes.

Mais le 4 au soir, le grand-duc de Berg, qui s'était porté sur la droite, arriva avec sa cavalerie sur l'ennemi, dont le projet était encore incertain. Le maréchal Soult marcha par Ratzbourg; le prince de Ponte-Corvo marcha par Rebna. Il coucha du 5 au 6 à Schoenberg, d'où il partit à deux heures après minuit. Arrivé à Schlukup sur la Trave, il fit environner un corps de seize cents Suédois, qui avaient enfin jugé convenable d'opérer leur retraite du Lauenbourg, pour s'embarquer sur la Trave. Des coups de canon coulèrent les bâtimens préparés pour l'embarquement. Les Suédois, après avoir riposté, mirent bas les armes. Un convoi de trois cents voitures que le général Savary avait poursuivi de Wismar, fut enveloppé par la colonne du prince de Ponte-Corvo, et pris.—Cependant l'ennemi se fortifiait à Lubeck. Le maréchal Soult n'avait pas perdu de temps dans sa marche de Ratzbourg; de sorte qu'il arriva à la porte de Mullen lorsque le prince de Ponte-Corvo arrivait à celle de la Trave. Le grand-duc de Berg, avec sa cavalerie, était entre deux. L'ennemi avait arrangé à la hâte l'ancienne enceinte de Lubeck; il avait disposé des batteries sur les bastions; il ne doutait pas qu'il ne pût gagner là une journée; mais le voir, le reconnaître et l'attaquer fut l'affaire d'un instant. Le général Drouet, à la tête du vingt-septième régiment d'infanterie légère, et des quatre-vingt-quatorzième et quatre-vingt-quinzième régimens, aborda les batteries avec ce sang-froid et cette intrépidité qui appartiennent aux troupes françaises. Les portes sont aussitôt enfoncées, les bastions escaladés et l'ennemi mis en fuite; et le corps du prince de Ponte-Corvo entre par la porte de la Trave. Les chasseurs corses, les tirailleurs du Pô et le vingt-sixième d'infanterie légère, composant la division d'avant-garde du général Legrand, qui n'avaient point encore combattu dans cette campagne, et qui étaient impatiens de se mesurer avec l'ennemi, marchèrent avec la rapidité de l'éclair: redoutes, bastions, fossés, tout est franchi, et le corps du maréchal Soult entre par la porte de Mullen. C'est en vain que l'ennemi voulut se défendre dans les rues, dans les places, il fut poursuivi partout. Toutes les rues, toutes les places furent jonchées de cadavres. Les deux corps d'armée arrivant de deux côtés opposés, se réunirent au milieu de la ville. A peine le grand-duc de Berg put-il passer, qu'il se mit à la poursuite des fuyards: quatre mille prisonniers, soixante pièces de canon, plusieurs généraux, un grand nombre d'officiers tués ou pris, tel est le résultat de cette belle journée.

Le 7, avant le jour, tout le monde était à cheval, et le grand-duc de Berg cernait l'ennemi près de Schwartau avec la brigade Lasalle et la division de cuirassiers d'Hautpoult, Le général Blucher, le prince Frédéric-Guillaume de Brunswick-Oels, et tous les généraux se présentent alors aux vainqueurs, demandent à signer une capitulation, et défilent devant l'armée française.

Ces deux journées ont détruit le dernier corps qui restait de l'armée prussienne, et nous ont valu le reste de l'artillerie de cette armée, beaucoup de drapeaux et seize mille prisonniers, parmi lesquels se trouvent quatre mille hommes de cavalerie.

Ainsi ces généraux prussiens qui, dans le délire de leur vanité, s'étaient permis tant de sarcasmes contre les généraux autrichiens, ont renouvelé quatre fois la catastrophe d'Ulm, la première, par la capitulation d'Erfurt, la seconde, par celle du prince Hohenlohe; la troisième, par la reddition de Stettin, et la quatrième par la capitulation de Schwartau.

La ville de Lubeck a considérablement souffert: prise d'assaut, ses places et les rues ont été le théâtre du carnage. Elle ne doit s'en prendre qu'à ceux qui ont attiré la guerre dans ses murs. Le Mecklembourg a été également ravagé par les armées françaises et prussiennes. Un grand nombre de troupes se croisant en tout sens, et à marches forcées sur ce territoire, n'a pu trouver sa subsistance qu'aux dépens de cette contrée. Ce pays est intimement lié avec la Russie; son sort servira d'exemple aux princes d'Allemagne qui cherchent des relations éloignées avec une puissance à l'abri des malheurs qu'elle attire sur eux, et qui ne fait rien pour secourir ceux qui lui sont attachés par les liens les plus étroits du sang et par les rapports les plus intimes.

 

L'aide-de-camp du grand-duc de Berg, Dery, a fait capituler le corps qui escortait les bagages qui s'étaient retirés derrière la Penne. Les Suédois ont livré les fuyards et les caissons. Cette capitulation a produit quinze cents prisonniers, une grande quantité de bagages et de chariots. Il y a aujourd'hui des régimens de cavalerie, qui possèdent plusieurs centaines de milliers d'écus.

Le maréchal Ney, chargé du siège de Magdebourg, a fait bombarder cette place. Plusieurs maisons ayant été brûlées, les habitans ont manifesté leur mécontentement, et le commandant a demandé à capituler. Il y a, dans cette forteresse, beaucoup d'artillerie, des magasins considérables, seize mille hommes appartenant à plus de soixante-dix bataillons, et beaucoup de caisses des corps.

Pendant ces événemens importans, plusieurs corps de notre armée arrivent sur la Vistule.

La malle de Varsovie a apporté beaucoup de lettres de Russie qui ont été interceptées. On y voit que dans ce pays les fables des journaux anglais trouvent une grande croyance; ainsi, l'on est persuadé en Russie que le maréchal Masséna a été tué; que la ville de Naples s'est soulevée; qu'elle a été occupée par les Calabrais; que le roi s'est réfugié à Rome, et que les Anglais, avec cinq ou six mille hommes, sont maîtres de l'Italie. Il ne faudrait cependant qu'un peu de réflexion pour rejeter de pareils bruits. La France n'a-t-elle donc plus d'armée en Italie? Le roi de Naples est dans sa capitale; il a quatre-vingt mille Français; il est maître des deux Calabres; et à Pétersbourg on croit les Calabrais à Rome. Si quelques galériens armés et endoctrinés par cet infâme Sidney-Smith, la honte des braves militaires anglais, tuent des hommes isolés, égorgent des propriétaires riches et paisibles, la gendarmerie et l'échafaud en font justice.

La marine anglaise ne désavouera point le titre d'infamie donnée à Sidney-Smith. Les généraux Stuart et Fox, tous les officiers de terre s'indignent de voir le nom anglais associé à des brigands. Le brave général Stuart s'est même élevé publiquement contre ces menées aussi impuissantes qu'atroces, et qui tendent à faire du noble métier de la guerre, un échange d'assassinats et de brigandages. Mais quand Sidney-Smith a été choisi pour seconder les fureurs de la reine, on n'a vu en lui qu'un de ces instrumens que les gouvernemens emploient trop souvent, et qu'ils abandonnent au mépris qu'ils sont les premiers à avoir pour eux. Les Napolitains feront connaître un jour avec détail les lettres de Sidney-Smith, les missions qu'il a données, l'argent qu'il a répandu pour l'exécution des atrocités dont il est l'agent en chef.

On voit aussi dans les lettres de Pétersbourg, et même dans les dépêches officielles, qu'on croit qu'il n'y a plus de Français dans l'Italie supérieure: on doit savoir cependant que, indépendamment de l'armée de Naples, il y a encore en Italie cent mille hommes prêts à punir ceux qui voudraient y porter la guerre.

On attend aussi de Pétersbourg des succès de la division de Corfou; mais ou ne tardera pas à apprendre que cette division, à peine débarquée aux bouches de Cattaro, a été défaite par le général Marmont; qu'une partie a été prise, et l'autre rejetée dans ses vaisseaux. C'est une chose fort différente d'avoir affaire à des Français, ou à des Turcs que l'on tient dans la crainte et dans l'oppression, en fomentant avec art la discorde dans les provinces. Mais quoi qu'il en puisse être, les Russes ne seront point embarrassés pour détourner d'eux l'opprobre de ces résultats.

Un décret du sénat-dirigeant a déclaré qu'à Austerlitz, ce n'étaient point les Russes, mais leurs alliés, qui avaient été battus. S'il y a sur la Vistule une nouvelle bataille d'Austerlitz, ce sera encore d'autres qu'eux qui auront été vaincus, quoiqu'aujourd'hui, comme alors, leurs alliés n'aient point de troupes à joindre à leurs troupes, et que leur armée ne puisse être composée que de Russes. Les états de mouvemens et ceux des marches de l'armée russe seul tombés dans les mains de l'état-major français. Il n'y aurait rien de plus ridicule que les plans d'opérations des Russes, si leurs vaines espérances n'étaient plus ridicules encore.

Le général Lagrange a été déclaré gouverneur-général de Cassel et des états de Hesse.

Le maréchal Mortier s'est mis en marche pour le Hanovre et pour Hambourg, avec son corps d'armée.

Le roi de Hollande a fait bloquer Hamelin. Il faut que cette guerre soit la dernière, et que ses auteurs soient si sévèrement punis, que quiconque voudra désormais prendre les armes contre le peuple Français, sache bien, avant de s'engager dans une telle entreprise, quelles peuvent en être les conséquences.

Berlin, le 10 novembre 1806.
Trentième bulletin de la grande armée

La place de Magdebourg s'est rendue le 8: le 9, les portes ont été occupées par les troupes françaises.

Seize mille hommes, près de huit cents pièces de canon, des magasins de toute espèce tombent en notre pouvoir.

Le prince Jérôme a fait bloquer la place de Glogau, capitale de la Haute-Silésie, par le général de brigade Lefebvre, à la tête de deux mille chevaux bavarois. La place a été bombardée le 8 par dix obusiers servis par de l'artillerie légère. Le prince fait l'éloge de la conduite de la cavalerie bavaroise. Le général Deroy, avec sa division, a investi Glogau le 9: on est entré en pourparler pour sa reddition.

Le maréchal Davoust est entré à Posen avec un corps d'armée le 10. Il est extrêmement content de l'esprit qui anime les Polonais. Les agens prussiens auraient été massacrés, si l'armée française ne les eût pris sous sa protection.

La tête de quatre colonnes russes, fortes chacune de quinze mille hommes, entrait dans les états prussiens par Georgenbourg, Olita, Grodno et Jalowka. Le 25 octobre, ces têtes de colonnes avaient fait deux marches, lorsqu'elles reçurent la nouvelle de la bataille du 14 et des événemens qui l'ont suivie; elles rétrogradèrent sur-le-champ. Tant de succès, des événemens d'une si haute importance, ne doivent pas ralentir en France les préparatifs militaires; on doit, au contraire, les poursuivre avec une nouvelle énergie, non pour satisfaire une ambition insatiable, mais pour mettre un terme à celle de nos ennemis. L'armée française ne quittera pas la Pologne et Berlin que la Porte ne soit rétablie dans toute son indépendance, et que la Valachie et la Moldavie ne soient déclarées appartenant en toute suzeraineté à la Porte.

L'armée française ne quittera point Berlin, que les possessions des colonies espagnoles, hollandaises et françaises ne soient rendues, et la paix générale faite.

On a intercepté une malle de Dantzick, dans laquelle on a trouvé beaucoup de lettres venant de Pétersbourg et de Vienne. Ou use à Vienne d'une ruse assez simple pour répandre de faux bruits. Avec chaque exemplaire des gazettes, dont le ton est fort réservé, on envoie, sous la même enveloppe, un bulletin à la main, qui contient les nouvelles les plus absurdes. On y lit que la France n'a plus d'armée en Italie; que toute cette contrée est en feu; que l'état de Venise est dans le plus grand mécontentement et a les armes à la main; que les Russes ont attaqué l'armée française en Dalmatie, et l'ont complètement battue.

Quelque fausses et ridicules que soient ces nouvelles, elles arrivent de tant de côtés à la fois, qu'elles obscurcissent la vérité. Nous sommes autorisés à dire que l'empereur a deux cent mille hommes en Italie, dont quatre-vingt mille à Naples, et vingt-cinq mille en Dalmatie; que le royaume de Naples n'a jamais été troublé que par des brigandages et des assassinats; que le roi de Naples est maître de toute la Calabre; que si les Anglais veulent y débarquer avec des troupes régulières, ils trouveront a qui parler; que le maréchal Masséna n'a jamais eu que des succès, et que le roi est tranquille dans sa capitale, occupé des soins de son armée et de l'administration de son royaume; que le général Marmont, commandant l'armée française en Dalmatie, a complètement battu les Russes et les Monténégrins, entre lesquels la division règne; que les Monténégrins accusent les Russes de s'être mal battus, et que les Russes reprochent aux Monténégrins d'avoir fui; que de toutes les troupes de l'Europe, les moins propres à faire la guerre en Dalmatie sont certainement les troupes russes. Aussi y font-elles en général une fort mauvaise figure.