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La maison d’à côté

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La maison d’à côté
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La maison d’à côté
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Wird gelesen Nicole Forup
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CHAPITRE VINGT-TROIS



Des deux sœurs Fine, Chloé était définitivement la plus sentimentale et émotionnelle. Mais il arrivait un moment où les sentiments et les émotions ne menaient nulle part. Il était très rare qu’ils donnent des résultats. Ce fut dans cet état d’esprit que Chloé quitta la prison de Riverside un quart d’heure après y être arrivée. Le visage rempli de larmes à peine séchées, elle roula en direction du bureau. Elle entra dans l’édifice, en oubliant même d’aller voir Greene. Elle alla directement au labo qui était à disposition des stagiaires, juste à côté du labo principal destiné aux agents de terrain. Vu qu’on était samedi, c’était très calme. Et elle eut tout l’espace et le silence nécessaires pour réfléchir.



Elle sortit les lettres qu’elle avait trouvées à l’appartement de Danielle de la pochette de son ordinateur et elle s’appliqua à essayer d’y trouver des réponses. Elle utilisa l’un des kits de base d’analyse pour examiner de plus près les lettres et les enveloppes. Elle n’avait fait ça qu’une seule fois en situation réelle, quand elle avait relevé des empreintes sur un pied de biche un peu plus tôt cette année. Mais elle avait effectué ces gestes plus d’une dizaine de fois au cours de sa formation et elle était assez à l’aise pour effectuer ces analyses elle-même.



Elle commença par relever soigneusement les empreintes. Elle commença par les lettres, puis passa aux enveloppes. Elle trouva plusieurs empreintes digitales, qui pouvaient toutes facilement appartenir à Danielle. Elle scanna les empreintes et les introduisit dans le système. En attendant les résultats – ce qui pouvait prendre entre dix minutes et deux heures – elle examina à nouveau les lettres. Est-ce qu’il y avait un quelconque symbole ou même des indices qui permettraient d’en identifier l’auteur ?



Elle ne vit rien de particulier qui attirait son attention et elle se dit que ça devait juste être des notes écrites par un détraqué avec de sérieux problèmes mentaux.



Elle sortit ensuite son ordinateur portable et chercha les dossiers numériques qui avaient été accumulés jusqu’à maintenant sur le meurtre de Martin Shields. Elle trouva des rapports assez détaillés, incluant des photos de la voiture, du lac et du corps. Elle fut attirée par les photos qui montraient les coups de couteau, et elle était incapable d’imaginer Danielle enfoncer sauvagement un couteau dans la poitrine de quelqu’un.



Ça lui semblait tout à fait impossible.



Mais elle a confessé avoir conduit la voiture dans le lac, pensa-t-elle. Est-ce qu’on est si loin que ça, mentalement parlant, de l’acte de poignarder quelqu’un dans le cœur ?



« Non, » dit-elle tout haut, dans la pièce vide.



Danielle est innocente. On se comporte parfois comme des étrangères, mais je la connais, tout de même.



Elle prit de nouveau les enveloppes de ses mains gantées. Elle examina les rabats et le collant sur le bord intérieur. Elle cherchait toute trace qui pourrait indiquer que quelqu’un ait léché les enveloppes pour les fermer. Mais elle ne vit rien de tel. L’auteur avait là aussi été prudent, en utilisant l’autocollant pour fermer les enveloppes plutôt que fournir un échantillon de son ADN en les léchant.



Alors qu’elle empilait soigneusement les lettres, elle reçut le résultat des empreintes. Elle les examina, sans aucune surprise.



Les seules empreintes sur les enveloppes et les lettres étaient celles de Danielle. Elle les avait bien entendu tenues en main. Elle n’avait certainement jamais imaginé que ses empreintes pourraient être un jour relevées dans le cadre d’une enquête pour meurtre.



Chloé laissa échapper un juron et frappa la table de la main. Elle était à la fois en colère et effrayée, deux émotions qui ne faisaient pas bon ménage. Ne sachant pas quoi faire d’autre et ayant l’impression d’être dépassée par les événements, elle prit son téléphone et appela Greene.



« Salut, Fine, » dit-il. « Comment va ta sœur ? »



« Terrifiée à mort, » dit Chloé. « Mais avec une bonne raison. Agent Greene… je sais que vous ne me connaissez pas bien mais j’ai besoin que vous me fassiez confiance. Ma sœur est innocente. Et je ne sais pas comment vous l’expliquer d’autre que par une intuition de sœur. Je la connais. Elle n’a pas fait ça. »



« Alors il faut que tu le prouves. Je veux que tu penses comme un agent… pas comme une stagiaire mais comme un véritable agent de terrain. Si tu veux prouver son innocence, quel est le moyen le plus sûr de le faire ? »



« Il faut que je trouve la preuve que quelqu’un d’autre a un lien avec la scène de crime, » dit-elle. Elle était vaguement consciente que Greene lui parlait d’une manière plus stricte qu’il le faisait d’habitude – mais que c’était bénéfique. Elle se demanda s’il s’était déjà fait sa propre idée concernant Danielle et cette affaire.



« Un bon raisonnement. Alors comment est-ce que tu t’y prendrais pour y arriver ? »



« Eh bien, je retournerais sur les lieux. Mais maintenant, la voiture n’est plus là. Et le temps que j’aie l’autorisation d’aller jeter un coup d’œil à l’intérieur – si elle est déjà arrivée à la casse – Danielle sera probablement déjà inculpée. Alors… »



Elle s’interrompit, en réfléchissant. Alors quoi ? Quelle serait la prochaine étape ?



La réponse s’imposa à elle et ce faisant, elle se rendit compte qu’elle avait vraiment franchi un grand pas au-delà du niveau de stagiaire.



« Agent Greene, où êtes-vous maintenant ? »



« En ville, je suis sur le point d’interroger un témoin dans une affaire d’effraction. Pourquoi ? »



« Quand pouvez-vous me retrouver à la morgue ? »



« Et pourquoi est-ce que je vous y retrouverais ? » demanda Greene, sur un ton espiègle.



« Parce que je voudrais jeter un coup d’œil au corps. »



« Beau travail, Fine. Et oui… je peux vous y retrouver dans une heure. »





CHAPITRE VINGT-QUATRE



Chloé avait dû suivre ce que les étudiants appelaient une « période de morgue » au cours de sa deuxième année de cours, pour s’habituer à l’idée d’avoir à examiner des cadavres à la recherche d’indices ou de preuves. Ça avait été une expérience inconfortable mais ça ne l’avait pas vraiment dérangée.



Ce qu’elle découvrit quand elle retrouva Greene à la morgue pour examiner le corps de Martin, c’était que ces classes étaient une chose – mais que se retrouver face à un cadavre récent – une personne qu’elle avait par ailleurs rencontrée il y a peu alors qu’elle était encore vivante – était une toute autre chose. Quand on leur permit d’entrer dans la salle d’examen, elle eut l’impression que le monde autour d’elle devenait silencieux. Elle examina le corps complètement nu et exposé aux lumières halogènes du plafond.



Les coups de couteau avaient été légèrement nettoyés, mais de manière superficielle. Chloé pouvait maintenant clairement voir les plaies. Elle fut surprise par le fait qu’elles aient l’air presque fausses. Mais tout était bien réel… et il allait falloir qu’elle s’y habitue.



« Dis-moi ce que tu cherches, » dit Greene, qui la testait visiblement.



« Tout signe de lutte autre que les coups de couteau, » dit-elle. « Des bleus, des abrasions, ce genre de choses. »



« Et pourquoi ce serait intéressant pour nous ? »



« Parce qu’on pourrait y retrouver des empreintes. »



« Effectivement. N’oublie pas que ses vêtements sont également en cours d’analyse, à la recherche d’empreintes ou de cheveux. Pour l’instant, ça n’a rien donné. »



Greene resta en arrière et la laissa examiner le corps. La seule chose hors de l’ordinaire qu’elle remarqua, c’était un petit bleu entre la nuque et la base de l’épaule. C’était le genre de bleu qui pouvait avoir été causé par n’importe quoi de petit et léger.



« Dis-moi ce que tu penses au fur et à mesure de tes observations, » dit Greene. « Comme si tu enregistrais tes notes. »



« Rien de spécial au premier coup d’œil, » dit-elle. « Mais le fait que les coups de couteau aient été donnés de l’avant indique qu’il y a de plus grandes chances qu’il y ait eu une lutte. Cela dit, j’ai examiné les poignets et le dos des mains pour voir s’il y avait des signes de lutte. Le fait qu’il n’y en ait pas m’amène à croire que l’assassin était avec lui quand c’est arrivé. Je doute que le tueur l’ait pris par surprise. L’assassin est donc probablement quelqu’un qu’il connaissait.



Quelqu’un comme Danielle, pensa-t-elle.



Elle se croisa les bras et réfléchit. « Bien sûr, il est tout à fait possible qu’il y ait eu une sorte de lutte, mais peut-être pas très efficace. Mais j’ai vu comment Martin bougeait. Il se déplaçait comme quelqu’un d’entraîné… un boxeur ou un lutteur en arts martiaux. La prise qu’il a faite pour prendre la tête de Steven en étau était professionnelle. Alors peut-être qu’il a pris une position défensive pour essayer de parer une attaque – mais trop tard. »



Elle se pencha en avant et examina à nouveau ses mains. Elle ne vit toujours rien qui puisse indiquer qu’il ait été impliqué récemment dans une lutte. En revanche, elle trouva de la terre sous ses ongles. Et elle avait l’air d’être récente.



« Il a de la terre sous les ongles, » dit-elle.



Elle se pencha plus près, pendant que Greene ouvrait un tiroir sur sa droite et cherchait à l’intérieur. « Techniquement, nous ne sommes pas autorisés à faire ça… » dit-il, mais il sortit tout de même un objet du tiroir. C’était une petite raclette, aussi fine qu’une feuille de carton mais ressemblant à un scalpel.



Chloé l’utilisa pour racler un peu de la terre qui se trouvait en-dessous des ongles de Martin. C’était assez compact mais d’après ce qu’elle pouvait en voir, il y avait visiblement du sang qui y était mélangé.

 



« On dirait qu’il y a du sang mélangé à la terre, » dit-elle. « Ça pourrait être le sien, mais s’il a tenté de se défendre, ça pourrait être aussi celui de l’assassin. »



« Beau travail, » dit Greene. « Je vais demander à quelqu’un d’envoyer ça au labo pour analyse. Je demanderai que ce soit fait en priorité et nous devrions recevoir les résultats dans quatre à six heures. »



L’idée était prometteuse mais elle se rendit soudain compte qu’il se pourrait que ce soit le sang de Danielle. Et si c’était le cas, son travail n’aurait fait que confirmer sa peine de prison.



Apparemment, l’expression de son visage changea. Greene s’arrêta à la porte et hésita. « Tu es sûre que je l’envoie au labo ? »



« Oui, je suis sûre. Même si…eh bien, même si les résultats apportent de mauvaises nouvelles, au moins je saurai. Et si c’est elle, alors il faut que je sache pourquoi. Il faut que je comprenne. »



« Sans vouloir te vexer, » dit Greene, « c’est quelque chose qu’il va falloir que tu laisses tomber. D’après mon expérience, c’est parfois mieux de ne pas comprendre pourquoi les gens tuent. »



Il sortit de la pièce, en laissant Chloé réfléchir à ce qu’il venait de dire, bien qu’elle continue à être certaine d’une chose.



Ce n’est pas Danielle. Ce n’est pas possible…





***





Chloé était de retour au bureau. Elle se trouvait dans la salle des dossiers et consultait les rapports les plus récents sur la scène de crime du lac, quand la porte s’ouvrit tout grande. Deux hommes entrèrent, Greene était l’un d’entre eux. Il avait l’air tout petit à côté de l’autre homme, qui était grand et bâti comme un lutteur professionnel, une carrure qui était bien visible même en-dessous de son costume. Chloé l’avait déjà vu auparavant et savait qui il était, bien qu’elle ne lui ait jamais parlé.



Le directeur L.J. Johnson s’assit directement en face de Chloé, tandis que Greene resta debout. Johnson la regardait avec une expression difficile à déchiffrer. Ses yeux allaient de Chloé aux dossiers, puis des dossiers à Chloé.



« J’imagine que l’agent Greene vous a parlé du programme qui consiste à permettre à certains de nos stagiaires d’être plus proches de l’action, n’est-ce pas ? » demanda Johnson.



« Oui, monsieur. »



« Je maintiens cette décision mais il faut que je vous dise que ça m’a irrité au plus haut point quand j’ai découvert que vous aviez soumis un autre test ADN dans l’affaire Martin Shields. J’ai convoqué Greene et je lui ai fait savoir mon point de vue. J’avais l’intention de vous convoquer également pour vous demander pour qui vous vous prenez. Après tout, ce n’est même pas une enquête du FBI. La police locale de Pinecrest me fait une fleur en raison de votre lien avec l’affaire. Alors j’étais très en colère. Puis, les résultats du test sont arrivés. »



« Ce n’est pas le sang de Danielle Fine, c’est bien ça ? » demanda Chloé.



« Non, ce n’est pas son sang. D’après les résultats, il s’agit d’un homme du nom de Alan Short. Et c’est une info qu’on va pour l’instant garder pour nous. Quand je sortirai de cette pièce, j’enverrai deux agents retrouver ce type. Puis je vais personnellement demander que votre sœur soit mise en liberté. En revanche… il faut que vous restiez réaliste. Elle est toujours suspectée de meurtre jusqu’à ce qu’on retrouve cet Alan Short. Elle ne peut pas quitter l’état et devra se soumettre à d’autres interrogatoires. »



« Bien sûr, » dit Chloé. « Merci. »



« Non, merci à vous. C’était du bon travail, Fine. J’ai hâte de commencer à travailler avec vous, quand vous ne serez plus stagiaire. Agent Greene, continuez comme ça avec elle. »



Sur ces mots, Johnson se leva et sortit de la pièce. Greene regarda Chloé, avec l’air de lui dire est-ce que tu peux y croire.



« Mais il y a quand même quelque chose que j’ai remarqué, » dit Chloé, « c’est qu’il envoie deux autres agents pour retrouver ce type. J’ai l’impression d’avoir été rétrogradée. »



« Hé, tu ne peux pas tout avoir. Franchement… le fait qu’il soit venu te féliciter, c’est déjà énorme en soi. Avec en plus la présomption d’innocence de ta sœur, prends ça comme une victoire. Je te maintiendrai informée des avancées concernant Alan Short. Si c’est un type du coin, on devrait le retrouver assez vite. »



« Super, » dit Chloé, en ayant soudain l’impression de se sentir plus légère.



« Mais il ne faut pas que tu oublies qu’elle finira probablement par être accusée de quelque chose. Se débarrasser comme ça de sa voiture, c’est très suspect. Pour l’instant, elle est hors de cause… mais je m’attends à ce qu’il y ait une enquête plus approfondie. »



« Oui, bien sûr, » dit Chloé. Mais elle était simplement soulagée que Danielle ne soit plus le principal suspect. « Alors maintenant, qu’est-ce qu’on fait ? »



« Pour cette affaire ? Rien. Tu as fait tout ce que tu pouvais. Je pense que tu devrais en rester là pour aujourd’hui et rentrer chez toi. Quand Danielle sera relâchée, j’imagine que tes journées risquent d’être bien remplies. Comme le directeur Johnson te l’a dit… pour l’instant, on reste discret. Ce qui veut dire que les médias ne seront informés de rien jusqu’à ce que Alan Short soit arrêté. »



« Est-ce que je peux annoncer la bonne nouvelle à Danielle ? »



« Pas encore. Il faut qu’on attende que la paperasserie soit faite. Mais si le directeur Johnson s’en occupe, ça ne devrait pas tarder. Sérieusement, Chloé. Rentre chez toi. Tu as fait du bon boulot aujourd’hui. »



Elle se leva et commença à ranger les dossiers qu’elle avait consultés. Elle tremblait légèrement en essayant d’assimiler tout ce qui s’était passé au cours de cette journée – et plus particulièrement au cours des cinq dernières minutes.



Elle était parvenue à remettre Danielle en liberté.



Le directeur Johnson – un homme qui serait dans un futur proche son supérieur hiérarchique – était venu en personne la remercier et la féliciter.



L’avenir semblait soudain prometteur. Le lourd passé qui l’avait poussée jusqu’à cet instant semblait enfin se dissiper.



Mais elle découvrirait bientôt que le passé ne disparaissait jamais vraiment et finissait toujours par vous surprendre et réduire à néant tous les projets d’avenir. Ces lettres qui avaient été envoyées à Danielle en étaient bien la preuve. La preuve que le passé n’était jamais très loin.



Mais qui a bien pu les envoyer ? se demanda Chloé. Et surtout, pourquoi ?





CHAPITRE VINGT-CINQ



Malgré la tension qu’il y avait entre eux depuis la fête de quartier, Chloé et Steven avaient réussi à rester courtois l’un envers l’autre. Chloé était encore toute excitée et heureuse par le fait que son travail et sa perspicacité – avec les conseils de Greene – allaient permettre de libérer Danielle. Elle était tellement enthousiaste que lorsqu’elle vit Steven sur le divan, occupé à consulter ses emails, elle eut envie de lui sauter dessus. Ça faisait une semaine qu’ils n’avaient pas eu de relations sexuelles – et c’était un peu du gâchis vu qu’ils avaient une maison entière pour batifoler.



Mais cette envie fut arrêtée net quand elle essaya de partager son enthousiasme avec lui. Elle se sentait un peu stupide en le faisant, car elle rayonnait de joie et avait l’impression de se vanter un petit peu. Elle commença par lui expliquer la découverte du sang sous les ongles de Martin, puis la brève réunion avec le directeur Johnson. Mais avant qu’elle n’ait eu le temps de lui parler de l’éventuelle mise en liberté de Danielle, elle se rendit compte qu’il était clair qu’il n’allait pas partager son enthousiasme.



« Attends une seconde, » dit Steven. Un air fasciné mais également de dégoût avait envahi son visage. « Tu veux dire que tu t’es retrouvée face au cadavre de Martin ? »



« Oui, comme je te l’ai dit… je participe à un programme expérimental qui cherche à donner plus de liberté et de responsabilités aux stagiaires. »



« Oui, je sais ça, » dit-il, sur un ton agacé. « Mais tu étais en présence du cadavre… et tu n’as eu aucun problème à vouloir toujours la défendre ? »



« Non, aucun, » dit-elle, en se mettant tout de suite sur la défensive. « Peu importe ce que tu penses de Danielle, même ton mépris pour elle ne peut contredire une preuve ADN. Désolée que sa mise en liberté vienne déranger l’image parfaite que ta mère s’est faite de notre mariage. »



« Je n’ai pas dit ça. »



« Tu n’avais pas besoin de le faire. C’est ce que tu penses depuis la première fois où ta mère s’est plainte à son sujet. »



« Chloé, ce n’est pas juste… et en plus, ce n’est pas vrai. »



« Eh bien, je suis contente de le savoir car, quand elle sera remise en liberté demain, il est hors de question qu’elle retourne chez elle. C’est trop risqué et il va y avoir des journalistes partout. Alors je veux qu’elle reste ici pendant quelques jours. »



« Quoi ? » dit Steven, sur un ton incrédule. « Tu as perdu la tête ou quoi ? »



« Non. Pourquoi ? Tu as un problème avec ça ? » Elle savait qu’ils étaient sur le point de se disputer et elle était prête à se battre. Elle n’était plus du tout préoccupée par ce que Sally Brennan pouvait penser. Il s’agissait de l’avenir de sa sœur. Et en ce qui la concernait, Sally pouvait tout aussi bien garder l’argent du mariage pour elle.



« On aurait une accusée pour meurtre sous notre toit ! »



« Non… pas accusée. Il y a quelque chose que tu n’as pas compris quand je t’ai dit qu’elle allait être remise en liberté ? »



« Et tu crois que ça a une quelconque importance ? » demanda Steven, en hurlant. « Libérée ou pas, ça va lui coller à la peau pendant des années – peut-être même toute sa vie. »



« Et en quoi est-ce que ça te concerne, exactement ? »



« Chloé… tu n’as pas les idées claires. Je sais que c’est ta sœur. Mais elle ne peut pas rester chez nous. »



« Eh bien, c’est tout de même ce qui va arriver. Elle va rester ici. Ce n’est même pas sujet à discussion. »



Il la regarda comme s’il ne la reconnaissait pas. Ce qui la mettait le plus en colère, c’était qu’elle savait qu’il était surtout préoccupé par ce que ses parents allaient penser. C’était la seule raison pour laquelle il était aussi entêté.



« Tu as dit que ce nouvel échantillon de sang prouvait que quelqu’un d’autre était impliqué, » dit-il calmement. « Jusqu’à ce qu’on me prouve le contraire, elle pourrait tout aussi bien être coupable. Il est toujours possible qu’elle soit un assassin. »



« Tu voudrais que ce soit elle, c’est ça ? Du coup, tu en serais débarrassé. Et ta mère aussi, par la même occasion. »



« Tu as perdu la tête, » dit-il, à voix basse et sur un ton calme. « Et tu sais quoi ? Ça fait un moment que mes parents essaient de me le faire comprendre. »



« Comprendre quoi, Steven ? »



« La loyauté pour ta sœur, envers et contre tout. Je sais que vous avez traversé des moments très difficiles mais c’est complètement dingue. Et Chloé… peut-être que tout ça, c’est une erreur. Les fiançailles, le mariage. Finalement, mes parents avaient peut-être raison… nous ne sommes pas faits l’un pour l’autre. »



« Parce que je suis loyale à ma sœur ? » demanda-t-elle. Ça lui faisait mal d’entendre ça, mais elle était surtout surprise et en colère.



« Parce qu’il y a trop de poids derrière tout ça. Et oui… en partie parce que tu vas toujours faire passer ta fantasque de sœur avant moi. Et si c’est comme ça que notre vie de couple va être, je ne veux pas en faire partie. »



Alors c’est finalement à ça qu’on en arrive, pensa Chloé. Il me demande de choisir entre lui et Danielle.



Elle l’aimait. Elle en était sûre.



Mais elle revoyait toujours l’image de sa sœur, alors qu’elles étaient assises sur les marches de cet immeuble d’appartement avec un policer à leurs côtés. Elle se rappelait clairement cette journée et elle savait qu’elle verrait toujours sa sœur comme cette petite fille, peu importe où la vie les menait. Et qu’elle ferait toujours son possible pour la protéger.



« Je suis