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Avant qu’il ne tue

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Aus der Reihe: Un mystère Mackenzie White #1
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Avant qu’il ne tue
Avant qu’il ne tue
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Wird gelesen Gabrielle Chiararo
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« Oui, bien sûr. »

« Pourquoi est-ce que Dieu créerait des villes où les pécheurs peuvent se réfugier ? N’est-ce pas un peu le travail de Dieu de punir les pécheurs ? »

« C’est sujet à débat. Ce que je pense personnellement, c’est que Dieu voulait voir ses enfants réussir. Il voulait leur permettre d’avoir une chance de venir à sa rencontre. »

« Et ces pécheurs croyaient qu’ils pouvaient trouver Dieu dans ces villes ? Ils pensaient qu’ils pourraient trouver là-bas grâce à ses yeux ? »

« D’une certaine manière, oui. Mais ils savaient aussi que Dieu est au centre de toutes choses. C’était à eux de le chercher. Et ces villes étaient les endroits désignés pour qu’ils le fassent. »

Mackenzie réfléchit à ces mots en se dirigeant vers la porte. Elle accompagna Hooks dans les démarches de sortie mais son esprit était ailleurs. Elle pensa aux six villes situées en cercle et comment un Dieu parfois courroucé mais en fin de compte clément supervisait le tout.

Comment Hooks l’avait-il exprimé ?

Mais ils savaient aussi que Dieu est au centre de toutes choses.

Soudain, Mackenzie eut l’impression qu’on lui retirait un filtre de son esprit. Avec cette seule phrase, la connexion qu’elle avait presque faite dans la salle d’interrogation lui apparut clairement.

Cinq minutes plus tard, elle était en route pour chez elle, laissant cette pensée imprégner chaque recoin de son esprit.

Dieu est au centre de toutes choses

L’horloge de son tableau de bord affichait vingt heures quarante-six mais Mackenzie savait que sa soirée ne faisait que commencer.

Car, s’il avait vu juste, elle savait comment découvrir où vivait le tueur.

CHAPITRE TRENTE

Dès qu’elle arriva chez elle, Mackenzie se dirigea immédiatement vers le divan et le fouillis de papiers qu’elle avait laissés sur la table du salon. D’une certaine manière, c’était ironique. Elle avait pensé que la maison serait beaucoup mieux rangée après le départ de Zack mais au lieu de ça, son désordre avait remplacé le sien. Durant un instant, elle se demanda où il était et ce qu’il faisait. Mais cette pensée ne dura que quelques secondes. Elle fut très vite remplacée par la pensée qu’il l’avait accompagnée jusque chez elle et qui continuait à hanter son esprit.

Dieu est au centre de toutes choses.

Elle fouilla dans les papiers sur la table et s’empara des deux cartes, celle des villes de refuge de l’ancien testament et la carte du coin marquant la zone d’un rayon de cent soixante kilomètres. Elle les superposa et les regarda d’un air songeur. Puis elle concentra son attention sur la carte de la région et fixa des yeux les X qu’elle y avait tracés avec un marqueur noir, en repassant dessus avec son doigt. Elle entoura les X et traça des lignes entre eux, dessinant le cercle implicite créé par la localisation des différents sites.

Quand elle eût terminé de dessiner le cercle, elle concentra son attention sur l’intérieur. Elle prit un stylo et traça une légère ligne à partir de chacune des six « villes » à la manière des rayons d’une roue, en partant des bords du cercle.

Dieu est au centre de toutes choses.

Les lignes se croisaient toutes au centre du cercle. Elle dessina un autre cercle, beaucoup plus petit, à l’endroit où les lignes se croisaient. Ça englobait une zone du centre ville pas très éloignée de l’endroit où ils avaient arrêté Clive Traylor quelques jours plus tôt. Le long du bord de ce petit cercle, elle remarque la ligne ondulante qui indiquait la présence d’une rivière. Il s’agissait de la rivière Danvers, le petit cours d’eau qui coulait à travers un parc du centre ville, à l’arrière de nombreuses propriétés délabrées du centre et qui finissait sa course dans le lac Sapphire.

C’était difficile à voir sur la carte mais elle était presque certaine que ce petit cercle incluait deux ou trois rues et une petite zone boisée qui séparait la zone Ouest du centre ville de la rive du lac Sapphire.

C’était le centre des meurtres, le point central des lieux choisis par le tueur, ses soi-disant villes. Si l’homme se prenait d’une certaine manière pour Dieu, ou avait l’impression d’oeuvrer sous sa direction, il pensait probablement que Dieu existait au centre de tout. Et si Dieu était le centre de toutes choses, ce point central était très probablement l’endroit où il vivait.

Elle resta assise là durant un instant et sentit un tiraillement familier d’excitation grandir en elle. Elle savait qu’elle avait une décision à prendre qui déterminerait très probablement ses futures possibilités de carrière. Elle pouvait appeler Nelson et lui fournir cette information mais elle était quasiment certaine qu’il ne répondrait pas à son appel. Et même s’il la prenait au sérieux, elle craignait que l’idée ne soit reléguée à un second plan.

Le site où ils avaient découvert le poteau prêt à être utilisé signifiait que le tueur était sur le point de frapper à nouveau. Et s’il avait déjà enlevé une femme pour son prochain sacrifice ? Et s’il devait agir différemment vu que ses trois autres sites de meurtre étaient sous surveillance ?

Tant pis, au diable avec tout ça, pensa-t-elle

Mackenzie se leva brusquement en faisant tomber une bonne partie des papiers de la table dans sa hâte et son enthousiasme. Elle se rendit dans la chambre à coucher pour prendre son arme de service et au moment où elle l’insérait dans son étui, son téléphone se mit à sonner. Le son inattendu et soudain de la sonnerie la fit sursauter légèrement et elle eut besoin d’un moment pour calmer ses nerfs avant de décrocher. En regardant l’écran, elle vit que c’était à nouveau Ellington.

« Allô ? » dit-elle.

« Oh waouw, » dit Ellington. « Je ne m’attendais pas à ce que tu répondes. J’allais te laisser un message pour te dire que j’allais rentrer chez moi et pour te demander de m’appeler demain pour me donner des nouvelles concernant l’arrestation. Tu n’y es pas encore allée ? »

« Si, j’y suis déjà allée et je suis déjà rentrée. Ce n’était pas le tueur. »

Il fit une pause.

« Et tu as pu le déduire en moins d’une demi-heure ? »

« Oui. Ça crevait les yeux. Nelson et ses hommes… ils n’ont pas vraiment bien géré l’histoire. »

« Trop impatients de procéder à une arrestation ? »

« Quelque chose dans le genre, » dit-elle, tout en terminant d’insérer son arme dans son étui.

« Tout va bien ? » demanda Ellington. « Tu as l’air d’être pressée. »

Elle était sur le point de ne pas répondre et de ne pas divulguer sa nouvelle théorie. Si elle avait tort sur ce coup-là, ça pourrait vraiment tourner mal et encore plus si quelqu’un était au courant à l’avance de ce qu’elle comptait faire. Mais, d’un autre côté, elle sentait qu’elle n’avait pas tort. Elle le sentait au fond d’elle. Son instinct lui disait qu’elle avait raison. Et si elle avait omis quelque chose ou sauté à des conclusions, Ellington était la personne la plus cohérente qu’elle connaisse.

« White ? »

« Je pense avoir découvert quelque chose, » dit Mackenzie. « Au sujet du tueur. Concernant l’endroit où il vit. »

« Quoi ? » Il avait l’air sous le choc. « Comment ça ? »

Elle lui raconta rapidement la conversation avec le pasteur Hooks et la manière dont elle avait localisé le centre de toutes choses avec la carte. En l’expliquant à haute voix, elle était de plus en plus convaincue d’avoir raison. C’était le chemin à suivre pour arriver jusqu’au tueur.

Quand elle eût terminé, il y eut un moment de silence sur la ligne. Elle se prépara à recevoir les critiques habituelles qu’elle recevait d’habitude.

« Tu penses que je me trompe ? » demanda-t-elle.

« Non. Pas du tout. Je pense que c’est un trait de génie. »

Elle fut surprise et se sentit d’autant plus motivée.

« Qu’est que Nelson en pense ? » demanda-t-il.

« Je ne l’ai pas appelé et je ne vais pas le faire. »

« Tu dois le faire, » lui dit-il vivement.

« Non, je ne dois pas. Il ne veut pas que je m’occupe de l’affaire. Et après la discussion que nous avons eue au commissariat, je doute qu’il ne réponde à mon appel de toute façon. »

« Alors laisse-moi faire passer l’info aux types de la police d’état. »

« Trop risqué, » dit-elle. « S’il s’avère que c’est un cul-de-sac, qui va être tenu responsable ? Toi ? Moi ? Aucun de ces cas de figure ne serait une bonne chose. »

« C’est vrai, » dit Ellington. « Mais si ce n’était pas un cul-de-sac ? Et si tu finissais par arrêter le tueur ? Tu devras de toute façon appeler Nelson. »

« Mais au moins j’aurai des résultats. Et tant que je peux attraper ce salopard, le reste m’importe peu. »

« Écoute, » dit-il sur un ton frustré, « tu ne peux pas faire ça. Pas toute seule. »

« Je n’ai pas le choix, » dit-elle. « On ne sait pas quand il va se remettre à tuer. Je ne peux pas laisser passer cette piste en attendant que Nelson soit prêt à me reparler ou en attendant que vos gars décident que ça vaut la peine de venir nous donner un coup de main. »

« Je peux présenter l’idée comme si c’était la mienne, » dit Ellington. « Peut-être que ça accélérerait les choses du côté du Bureau. »

« J’y ai pensé, » dit Mackenzie. « Mais quand est-ce que les agents arriveraient ? »

Le soupir qu’elle entendit de l’autre côté de la ligne lui indiqua qu’il savait qu’elle avait raison.

« Probablement dans cinq à six heures, » répondit-il. « Et ça, c’est en étant optimiste. »

« Alors tu vois ce que je veux dire. »

« Et tu vois dans quelle situation gênante tu me mets, » riposta-t-il. « Si tu y vas et que quelque chose t’arrive, je devrai le raconter à mon directeur. Si tu es blessée ou tuée et qu’on apprend que j’étais au courant de tes projets, c’est sur moi que ça va retomber. »

 

« Alors j’imagine que ferais mieux de ne pas être blessée ou tuée. »

« Bon dieu, White… »

« Je te remercie de te soucier pour moi, Ellington. Mais il faut que ce soit fait maintenant. »

Elle raccrocha avant qu’il ne puisse dire autre chose qui pourrait lui faire changer d’avis. Mais même maintenant que l’appel était terminé, elle se demandait si ce n’était pas imprudent et risqué. Elle serait toute seule, s’aventurant vers l’inconnu après avoir reçu l’ordre spécifique de rester éloignée de l’enquête. Et pire que ça, elle se retrouverait probablement sur le terrain d’un tueur dont ils ne savaient presque rien.

Elle traversa le salon et sortit de chez elle avant de changer d’avis. Respirer l’air frais du soir finit par éloigner tous ses doutes. Elle caressa de la main l’arme qu’elle portait à la taille et ça la calma un peu.

Ne perdant plus une seconde, elle se précipita à sa voiture et démarra. Elle sortit de l’allée et se dirigea vers l’Ouest. La nuit lui apparaissait tel un rideau sombre de scène, prêt à s’ouvrir.

CHAPITRE TRENTE ET UN

Elle l’avait entendu farfouiller dans la maison toute la journée. À certains moments, il avait chanté des hymnes, dont l’un d’entre eux lui était familier car elle l’avait déjà entendu un jour où elle était assise sur les genoux de sa grand-mère sur le banc d’une église baptiste de village. Elle était presque certaine que c’était l’hymne « Que ton oeuvre est grande ». À chaque fois qu’il le fredonnait, elle sentait une vague de nausée et de peur l’envahir, en sachant ce qu’il lui avait fait et ce qu’il allait lui faire.

En écoutant ses chants et ses mouvements, elle avait à nouveau essayé de se mettre debout. Si elle avait porté ses vêtements, ça aurait été plus facile. Elle était parvenue à rouler jusqu’au mur opposé, à plaquer son dos contre le mur et à se soulever lentement. Mais ses mollets se mettaient à tirer et à brûler du fait que ses chevilles étaient attachées de manière si serrée. À ce stade, elle avait tellement transpiré que son dos glissait contre le mur et qu’elle finissait par retomber au sol.

À cet instant même, les poignets ensanglantés par les abrasions des cordes qui lui rentraient dans la peau, elle avait de nouveau plaqué le dos contre le mur. Ses jambes étaient molles et les égratignures le long de son dos brûlaient comme des piqûres d’insectes. En gémissant, elle essaya à nouveau de se lever en poussant contre le mur et en se soulevant en poussant sur ses pieds. Quand elle atteignit le point où ses chevilles et ses mollets se mirent à brûler, elle se força à ignorer la douleur et continua à étendre les jambes.

Quand elle fut debout, ses jambes flageollèrent et elle faillit retomber. Mais elle appuya contre le mur et parvint à garder l’équilibre.

OK, et maintenant ?

Elle ne savait pas. Elle était juste soulagée d’être finalement debout. Elle se disait que si elle parvenait à atteindre la porte qui se trouvait à quelques mètres sur la droite, elle pourrait peut-être trouver un téléphone et appeler la police. Elle l’avait entendu ouvrir et refermer la porte toute la journée. Elle supposait qu’il sortait de temps en temps puis rentrait à nouveau. Si elle pouvait juste entr’apercevoir ce qui se passait dans la maison, peut-être qu’elle pourrait s’en sortir vivante.

Elle se déplaça contre le mur en direction de la porte. Elle avait la chair de poule et son corps était trempé de sueur. Elle sentit son corps trembler et elle eut envie de pleurer et de se laisser retomber au sol. Elle jeta un coup d’œil autour de la pièce, à la recherche d’un outil aiguisé avec lequel elle pourrait trancher les liens de ses poignets.

Mais il n’y en avait pas.

Elle avait envie d’abandonner. C’était trop dur, pensa-t-elle, vraiment trop dur.

Le dos tourné vers la porte, elle chercha la poignée en tâtonnant. Quand elle l’eut en main, elle la tourna lentement. Un léger clic se fit entendre au moment où la porte s’ouvrit.

Elle s’éloigna de la porte pour la laisser lentement s’ouvrir. Elle pouvait sentir l’air frais venant de l’autre côté et rien jusqu’à maintenant ne lui avait jamais semblé aussi agréable.

Elle se retourna lentement, en essayant de faire le moins de bruit possible. Elle trouverait un téléphone pour appeler quelqu’un ou une fenêtre ouverte. C’est vrai que ses mains et ses jambes étaient liées mais elle n’avait pas peur de risquer une chute s’il y avait une chance qu’elle puisse sortir d’ici.

Mais lorsqu’elle se fut totalement retournée, faisant face à la porte ouverte, il était là.

Son cri fut étouffé par le bâillon qu’elle avait sur la bouche. Il lui sourit et entra dans la pièce. Il plaça une main sur son épaule nue et la caressa. Puis, avec un large sourire, il la bouscula. Elle tomba au sol et se heurta l’épaule. Elle hurla à nouveau mais son cri finit en sanglot.

« Tu seras libérée le moment venu, » lui dit-il.

Il s’agenouilla et plaça à nouveau une main sur son épaule, comme pour la rassurer.

« Nous serons tous les deux libérés et ce sera glorieux. »

Il quitta la pièce et lorsqu’il ferma la porte, elle entendit le clic supplémentaire d’un verrou qui se fermait. Elle pleurait et avait l’impression qu’elle allait s’étouffer à cause du bâillon. Et durant tout ce temps, il continuait à se déplacer dans la maison, en chantant des hymnes au même Dieu auquel elle adressait des prières désespérées sur ce sol poussiéreux.

*

Il n’aimait pas travailler sous pression. Il n’aimait pas non plus les changements, spécialement quand les choses avaient été si minutieusement planifiées et pensées. Mais il en était là. Il devait modifier ses plans à mi-chemin de son œuvre. Il y avait encore trois autres villes à ériger, trois autres sacrifices. L’un d’entre eux était prêt à être exécuté mais il ne savait pas encore comment il allait réaliser les deux autres.

Pour le moment, il devait procéder petit à petit. Pour l’instant, la quatrième ville était sa préoccupation principale.

Il pensa qu’il avait bien fait de procéder à des changements au vu des récents événements. C’était Dieu qui l’avait conduit à proximité du site prévu pour la quatrième ville juste à temps pour y voir la présence policière. Les hommes de ce monde étaient à sa poursuite et feraient tout leur possible pour arrêter son œuvre. Mais Dieu, souverain et omniscient, le protégeait. Il avait alors prié et Dieu lui avait dit que c’était la tâche qui comptait, et non pas le lieu du sacrifice.

Il s’était adapté en conséquence. Et à son avis, il avait bien fait.

Par exemple, la femme n’était plus dans la chambre du haut, l’endroit où il l’avait laissée une heure auparavant. Maintenant, elle était dans l’abri de jardin. Elle se trouvait en position foetale, les bras dans le dos et les genoux relevés. Ses chevilles et ses poignets étaient attachés ensemble et il avait laissé la corde un peu détendue pour qu’elle ne se déboîte pas l’épaule par accident. Elle devait être parfaite au moment de l’attacher au poteau. Dieu n’accepterait pas un sacrifice avec des imperfections.

Il la regarda durant un instant en s’appuyant contre le poteau qu’il venait de terminer d’ériger dans l’abri. Cette femme était assez jolie, définitivement plus jolie que les autres. Son permis de conduire indiquait qu’elle avait dix-neuf ans et qu’elle venait à l’origine de Los Angeles. Il ne savait pas pourquoi cette femme était venue ici mais il savait que Dieu l’avait placée sur sa route. Cette fille n’en avait pas conscience mais elle devrait se sentir honorée. Elle ne réalisait pas qu’elle avait été choisie bien avant sa naissance pour être sacrifiée à la gloire de Dieu.

Il ne prenait jamais la peine d’essayer d’expliquer ça aux femmes. Elles ne voulaient pas écouter.

Il avait complètement déshabillé celle-ci. Il avait laissé le soutien-gorge et la culotte aux autres car il ne voulait pas risquer d’être tenté. Mais celle-ci était un sacrifice tellement parfait qu’il n’avait pas pu s’en empêcher. Il n’avait jamais vu de seins aussi parfaits, pas même dans des films ou des magazines.

Il savait qu’il devait être puni pour admirer sa chair comme il le faisait. Il s’assurerait de se repentir de ce péché et de se punir à plusieurs reprises ce soir.

Après avoir mis le poteau en place, il était allé à la quincaillerie et avait acheté un rouleau de revêtement en plastique. Il avait passé une demi-heure à en recouvrir le sol de l’abri, en utilisant des agrafes plutôt que des clous car ce serait plus facile à retirer par la suite. Installer le poteau dans l’abri et recouvrir le sol de plastique avaient été un travail laborieux, mais ça lui avait fait du bien. D’une certaine façon, ça lui permettait d’apprécier d’autant plus le sacrifice à venir. Travailler aussi dur pour réaliser un sacrifice lui permettait de se sentir digne.

Il s’arrêta et inspira profondément, en admirant son bricolage.

Il était presque temps maintenant.

Il devait d’abord aller prier, puis il attacherait la femme. Il devra bien lui serrer son bâillon car il n’avait jamais exécuté un sacrifice dans une zone aussi peuplée. Une seule erreur et un voisin entendrait ses cris lorsque le fouet s’abattrait. Mais il se tracasserait de ça une fois qu’elle serait attachée au poteau.

D’abord la prière et la pénitence. Il devait prier pour que ses villes, ses sacrifices, plaisent à Dieu et pour que son œuvre incarne Sa gloire et son amour pour les hommes.

Il s’agenouilla devant le poteau. Avant de fermer les yeux pour prier, il regarda de nouveau en direction de la femme. Une compréhension tranquille semblait envahir son visage et en voyant ça, il se mit à prier en paix.

C’était comme si elle savait qu’une grande récompense l’attendait par la suite, comme si elle savait qu’elle recevrait cette récompense et serait libérée de ce monde vil avant la prochaine heure.

CHAPITRE TRENTE-DEUX

Mackenzie gara sa voiture à l’entrée d’un quartier délabré et afficha sur son téléphone une carte rapprochée de la zone avant de sortir de la voiture. Elle savait qu’elle devait effectuer ses recherches sur un rayon de la grandeur d’un pâté de maisons le long de trois rues : Harrison, Colegrove et Inge.

Elle savait que la rue Inge pouvait être éliminée de sa liste car les maisons le long de cette rue y étaient vides vu qu’elles avaient été condamnées quelques années plus tôt. Elle le savait car c’était un endroit populaire pour le trafic de drogue et les gangs. Elle avait procédé à son premier coup de filet de trafic de stupéfiant ici et elle avait également sorti son arme pour la première fois de sa carrière à quelques rues de là.

Les rues Colegrove et Harrison, par contre, étaient entièrement occupées et parvenaient à tenir le coup dans cette partie délabrée de la ville. Y vivaient surtout des gens avec des boulots ingrats qui dépensaient leur salaire en alcool, en billets de loterie et en fastfood, s’il leur restait de l’argent.

Avant de sortir de la voiture, elle afficha le numéro d’Ellington. Elle lui envoya un message avec le nom des rues et finit en disant : Si tu n’as pas de mes nouvelles d’ici quelques heures, appelle quelqu’un et envoie des renforts.

Puis elle mit son téléphone en mode silencieux et sortit dans la nuit.

Mackenzie s’avança dans la rue Harrison d’un pas ferme, ne souhaitant pas avoir l’air suspecte à une heure aussi tardive, bien que toute femme marchant dans ces rues le soir soit considérée comme imprudente. Elle cherchait à repérer les maisons avec un pickup ou une camionnette sur la propriété et elle repéra deux maisons qui correspondaient à cette description.

L’une d’entre elles avait une camionnette garée dans l’allée devant la maison. Des lettres en vinyl usé annonçaient Plomberie Frères Smith sur le côté de la camionnette blanche.

Se déplaçant aussi furtivement et aussi rapidement que possible dans l’ombre, Mackenzie s’approcha du côté de la camionnette et jeta un coup d’oeil par la vitre du côté passager. Elle ne pouvait pas très bien voir à l’arrière mais elle parvint à distinguer le coin d’une boîte à outils. À l’avant, glissées entre le tableau de bord et le pare-brise, elle vit plusieurs factures. En haut de certaines d’entre elles, elle distingua la même illustration que celle qui ornait les côtés de la camionnette, marquant les factures de l’entreprise de plomberie des frères Smith.

 

Après avoir éliminé cette première maison de ses recherches, elle passa à la maison suivante. Un pickup noir était garé au bord du trottoir. C’était un modèle plus récent, décoré d’un autocollant Ne me marche pas sur les pieds et d’un décalc sur la vitre arrière indiquant que le propriétaire était un vétéran de la guerre du Vietnam. Elle regarda à l’arrière du pickup à la recherche de tout signe indiquant qu’un grand poteau en cèdre ait pu y être transporté récemment mais elle ne vit rien de spécial. Bien qu’elle ne veuille pas spécialement écarter un vétéran du Vietnam juste à cause des services rendus à la patrie, Mackenzie avait du mal à imaginer un homme de soixante-dix ans traîner et mettre en place ces poteaux.

Elle atteignit le bout de la rue et tourna à droite vers la rue Colegrove. Le bruit sourd de basses tonitruantes lui parvenait d’une maison proche où de la musique rap était à son maximum. Pendant qu’elle passait chaque maison en cherchant un pickup ou une camionnette, elle entr’aperçut loin derrière les maisons les eaux troubles de la rivière Danvers sur lesquelles se reflétait la lune.

Il y avait un pickup garé le long de la rue juste devant elle. Même avant de s’en approcher, elle vit que ce n’était pas le véhicule qu’elle recherchait. Les pneus arrière étaient à plat et le pickup montrait des signes de laisser-aller qui lui firent penser qu’il n’avait plus été utilisé depuis des années.

Elle avait parcouru la moitié de la rue, en regardant devant elle et en ne voyant rien d’autre que des voitures sur le reste de la rue. Certaines étaient garées dans des allées mais la plupart se trouvaient le long du trottoir. Il y en avait six au total, un modèle récent et cinq tas de ferraille.

Elle commençait à avoir l’impression qu’elle avait à nouveau monté une théorie tirée par les cheveux quand elle repéra la maison sur sa gauche. Un ancien modèle de Honda Accord était garé le long du trottoir. Un petit bout de jardin envahi par les mauvaises herbes menait à une clôture grillagée mal entretenue qui se prolongeait par une clôture en bois tout aussi mal entretenue, séparant le jardin de la propriété voisine. Elle s’avança le long de la propriété et s’immobilisa lorsqu’elle parvint de l’autre côté de la maison.

La clôture grillagée avait disparu, se terminant apparemment quelque part dans le jardin arrière. Mais ce qu’elle vit, par contre, c’était une allée improvisée faite d’herbe aplatie et de fines pistes en terre. Elle suivit les pistes des yeux et vit qu’elles se terminaient là où était garé un vieux Ford pickup vert. L’avant lui faisait face, la calandre et les phares éteints la fixant du regard.

Mackenzie jeta un coup d’oeil en direction de la maison et vit qu’une seule lumière était allumée. Elle donnait peu de lumière, ce qui lui fit penser qu’il s’agissait d’une lampe ou d’une lumière provenant d’une pièce à l’arrière de la maison.

Rapidement, elle se précipita dans le jardin, en suivant la trace de l’herbe aplatie jusqu’au pickup. Elle regarda à l’intérieur du véhicule à travers la vitre du côté conducteur et aperçut de vieux sachets de fastfood et d’autres déchets.

Au milieu de tout ça, au centre du siège en forme de banc, se trouvait une Bible.

Elle ressentit une montée d’adrénaline et tendit la main vers la portière du côté conducteur. Elle ne fut pas du tout surprise qu’elle soit verrouillée.

Elle se dirigea vers l’arrière du pickup et vit que le hayon était baissé. Elle jeta un coup d’œil à l’intérieur et ne vit aucun signe évident de ce qu’il avait pu transporter récemment, mais il était assez difficile de distinguer quoi que ce soit dans l’obscurité.

Elle regarda vers le jardin derrière elle et elle vit qu’elle avait bien deviné. La clôture grillagée longeait le jardin puis bifurquait pour se terminer près d’un abri de jardin. Elle ne voyait aucune fenêtre mais elle vit de la lumière filtrer à travers un espace le long de la porte d’entrée.

Elle s’avança dans le jardin, s’approchant doucement de la clôture grillagée. Lorsqu’elle fut à proximité de l’abri, elle remarqua que la lumière était vraiment faible, provenant d’une bougie peut-être. En arrivant au bout de la clôture, sa curiosité se transforma en prudence. Elle s’accroupit au sol en s’approchant de la faible lueur qui filtrait à travers les fentes le long de la porte.

Elle se mit à chercher un moyen de passer à travers la clôture, craignant que passer au-dessus fasse trop de bruit. Alors qu’elle cherchait, son regard tomba sur une autre forme le long de l’abri. Elle ne l’avait pas remarqué auparavant vu que c’était trop près du sol et dissimulé dans l’ombre. Mais maintenant qu’elle n’était plus qu’à trois mètres de l’abri, la forme était bien nette et bien définie.

En fait, c’était deux formes.

Deux poteaux en cèdre, d’environ deux mètres cinquante de haut.

Elle savait qu’elle devrait attendre les renforts.

Mais elle sentit au fond de son âme qu’il n’y avait pas assez de temps pour ça.

Alors avec les muscles en feu et les nerfs à plein régime, elle se releva et agrippa la clôture grillagée.

Et elle commença à grimper.