Avant Qu’il Ne Blesse

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Aus der Reihe: Un mystère Mackenzie White #14
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CHAPITRE SIX

La première chose que fit Mackenzie lorsqu’ils arrivèrent au quartier général fut d’aller examiner les dossiers papier afin de voir les vraies photos de la scène de crime plutôt que les numériques qui lui avaient été fournies ainsi qu’à Ellington. Elle les étala sur la grande table qui occupait presque tout l’espace du bureau qui leur avait été alloué, se penchant au-dessus d’elles pour un moment. Tandis qu’elle les étudiait, Ellington commença à prendre des notes sur son téléphone.

La fille était plutôt jeune. Mackenzie doutait qu’elle ait plus de trente ans. Elle était blonde et avait un visage que la plupart aurait considéré comme joli. Mais celui-ci avait aussi une autre caractéristique, que l’on remarquait même sur son visage mort dénué d’émotions, et Mackenzie se dit qu’elle avait peut-être été une sans domicile fixe ou une personne en fuite. Ca, ou bien qu’elle avait vécu récemment un traumatisme. Sa peau était d’une pâleur telle qu’elle évoquait une vie de misère et de saleté.

« Pas d’identité, dit-elle, se parlant plus à elle-même qu’à Ellington. Je me demande si elle était sous le régime de protection des témoins.

– Protection des témoins ? dit Ellington. C’est s’avancer un peu loin. En particulier avec ce permis de conduire que tu penses être faux.

– Eh bien, elle n’a pas de vraie carte d’identité et elle courait de toutes ses forces pour fuir quelqu’un. Si elle était un témoin protégé et en fuite, voilà qui nous donnerait au moins une piste par où commencer. Peut-être qu’une personne de son passé l’a retrouvée.

– Voilà pourquoi je t’aime, dit Ellington. Tu préfère envisager n’importe quelle théorie plutôt que d’admettre que tu n’a rien sur quoi te baser.

– Il y a toujours quelque chose sur quoi se baser, dit Mackenzie, observant toujours les photos. C’est juste que quelquefois, l’endroit par où commencer est plus difficile à trouver. »

Elle prit son téléphone, ses yeux passant de la liste de ses contacts aux photographies de la fille morte sur la table.

« Tu appelles qui ? demanda Ellington.

– Les autorités compétentes pour leur demander de me mettre en communication avec les bureaux des US Marshals afin qu’on voie s’ils peuvent me fournir une liste.

Ellington fut clairement surpris par cette idée et hocha la tête de façon comique. « Eh bien, bonne chance avec ça. »

On répondit au téléphone et elle fut mise en attente avant qu’on puisse enfin lui passer les bureaux des US Marshals. Elle continua d’examiner les photos pendant ce temps. Les blessures provoquées par le véhicule qui l’avait percutée n’étaient pas très visibles sur les photos, mais l’horrible déchirure à sa gorge était flagrante.

La route qu’on voyait sur les photos était légèrement mouillée et luisante, rendant le sang rouge sombre qui s’échappait de son cou presque irréel.

« C’est le directeur adjoint Manning à l’appareil, dit une voix épaisse à l’autre bout du téléphone. Qui est là ?

– Agent spécial Mackenzie White, du FBI. Je travaille sur une affaire à Salt Lake City qui, je pense, pourrait impliquer une jeune femme sous le régime de protection des témoins. Nous n’avons aucune identité pour elle. Ses empreintes ne figurent dans aucune base de données et le permis de conduire retrouvé sur son corps était un faux. Je demande à tout hasard en espérant qu’elle pourrait faire partie de votre système.

– Agent White, vous savez que je ne puis vous fournir l’identité des personnes dont nous assurons la sécurité. Cela enfreindrait environ une douzaine de lois et règlements.

– J’en ai conscience. Et si je vous envoyais une des photos ? En utilisant la reconnaissance faciale, vous pourriez peut-être trouver quelque chose et…

– Veuillez m’excuser mais même si vous ne faites que soupçonner qu’elle pourrait être sous le régime de protection des témoins, faire circuler ainsi une photo enfreindrait encore plus les règles.

– Etant donné qu’il s’agit d’une photo de la scène de crime, je pense que c’est autorisé, répliqua sèchement Mackenzie. Elle a été percutée par un véhicule puis on lui a tranché la gorge. Alors je ne compte pas vous envoyer une photo glamour. »

Manning soupira lourdement, faisant ainsi savoir à Mackenzie qu’il s’apprêtait à céder. « Envoyez la photo et je vais demander à quelqu’un de faire une recherche en reconnaissance faciale. Bien entendu, je ne peux rien promettre. Mais je vais voir ce que nous pouvons faire.

– Merci.

– On vous recontacte dès que possible. » Il lui indiqua où envoyer la photo avant de raccrocher.

Ellington avait consulté le dossier du coroner pendant qu’elle parlait avec Manning. « Tu as eu ce que tu voulais, hein ?

– Est-ce qu’il n’y a jamais un doute que ça se passerait ainsi ? »

Il secoua la tête et lui tendit le rapport du coroner. « C’est le plus récent, fraîchement sorti des presses il y a environ cinq heures. Plutôt intéressant, tu ne trouves pas ? »

Elle survola le rapport, parcourant le contenu le plus évident jusqu’à tomber sur les plus récents développements. Ce qu’elle y vit était effectivement intéressant. Selon les dernières mises à jour du coroner et des médecins légistes, il apparaissait que la victime avait souffert de plusieurs fractures par le passé, qui n’avaient pas été soignées correctement. Deux côtes, le poignet droit, ainsi qu’une le long de son bras droit. Selon les notes du coroner, les os de son poignet gauche semblaient même n’avoir jamais été soignés.

« Tu crois qu’elle était victime de violence conjugale ? demanda Mackenzie.

– Je pense qu’elle fuyait quelqu’un et qu’elle a souffert par le passé de fractures multiples qui n’ont pas été guéries correctement. Alors en effet… de la violence conjugale, peut-être même quelque chose d’encore plus dramatique. Je me demande si elle n’était pas retenue prisonnière. Elle n’a pas l’air d’avoir été en très bonne santé, tu vois. Le rapport indique qu’elle pesait environ cinquante kilos. Et tu as vu son visage sur les photos… elle avait l’air de… Je ne sais pas…

– Endurcie, termina Mackenzie à sa place.

– Oui, c’est un bon terme.

– Alors peut-être qu’elle était captive ou prisonnière, qu’elle a réussi à échapper à son bourreau. Et lorsqu’il l’a rattrapée, il s’est dit que mieux valait la tuer plutôt que de la retenir enfermée à nouveau.

– Mais pour qu’il agisse de manière aussi désinvolte, ça veut dire qu’il devait savoir qu’elle n’avait pas d’identité connue. »

C’était un bon point, qui les laissa réfléchir en silence chacun de leur côté. Mackenzie pensa à la fille, qui avait peut-être couru à travers un champ mouillé puis sur une route luisante de pluie. Elle avait été pied nus, portant semble-t-il ses sandales à la main. Cette hypothèse soulevait deux questions.

La première était de savoir ce qu’elle fuyait ?

La seconde, pensa-t-elle, commençait à devenir plus pressante. « Où se rendait-elle ? » demanda Mackenzie à voix haute. Ca ne peut pas être une coïncidence qu’elle ait choisi ce quartier. Je sais qu’il n’y aucune preuve que ce soit elle qui ait traversé le champ dont a parlé le Sheriff Burke, mais si c’était bien le cas ? Elle aurait pu partir dans n’importe quelle direction et choisir n’importe quel quartier. Alors pourquoi celui-ci ? »

Ellington sourit tout en hochant la tête, s’enthousiasmant à son tour. « Et pourquoi ne pas aller enquêter sur tout ça ? »

CHAPITRE SEPT

Ils eurent de la chance car l’on était samedi et la plupart des voitures du voisinage étaient garées dans des allées privées ou des garages ouverts. Ils regagnèrent le quartier de Plainsview vers quinze heures dix et se garèrent au même endroit que là où ils avaient fait connaissance avec le Sheriff Burke. C’était un après-midi ensoleillé de mars, pas très frais mais assurément pas chaud non plus. En tout cas, Mackenzie ne s’attendait pas à avoir de difficultés particulières à trouver des gens avec qui parler.

« Tu prends à droite et moi à gauche » dit Ellington tandis qu’ils sortaient de la voiture.

Mackenzie acquiesça, sachant que la plupart des coéquipiers choisissaient souvent de ne pas se séparer ainsi. Mais Ellington et elle se faisait réciproquement confiance à ce niveau pour s’autoriser cela. Cela provenait non seulement de leur forte relation de travail mais également du lien créé par leur mariage. Ils se séparèrent sans tambour ni trompette et partirent chacun d’un côté de la rue.

La première maison du côté de Mackenzie n’était pas des plus faciles – puisqu’une mère et sa fille se trouvaient dans le jardin. La petite fille devait avoir six ans et faisait du tricycle, descendant et remontant l’allée. La mère était assise sur le porche en train de scroller son téléphone. Lorsque Mackenzie s’approcha, elle leva la tête et sourit.

« Puis-je vous aider ? » demanda-t-elle. Son ton de voix indiquait qu’elle n’avait aucune envie de faire cela, en particulier si Mackenzie était là pour vendre quelque chose.

Mackenzie s’écarta un peu de la petite fille avant de sortir son badge et de se présenter. « Je suis l’agent Mackenzie White du FBI. Mon collège et moi faisons une enquête de voisinage pour voir si nous pouvons apprendre quoi que ce soit au sujet de l’accident qui s’est déroulé il y a deux jours.

– Je n’ai rien vu, dit-elle. J’ai déjà raconté la même chose aux policiers. D’après ce qu’ils disent, ils pensent que cela s’est passé après minuit et tout le monde chez moi dort déjà à vingt-trois heures.

– Savez-vous qui a retrouvé le corps ?

– Je ne sais pas trop. Toutes sortes de rumeurs circulent et je ne sais laquelle croire. Au bout d’un moment, j’ai juste arrêté d’y prêter attention, vous comprenez ?

– Certaines provenant de personnes à qui vous feriez confiance concernant ce genre d’informations ?

 

– Je crains que non.

– Eh bien, merci de m’avoir accordé votre temps. »

Elle se retourna et salua la petite fille de la main tandis qu’elle se dirigeait vers la maison suivante. Elle frappa trois fois mais n’eut aucune réponse. Elle eut le même résultat à la troisième. Ce fut différent à la quatrième. La porte s’ouvrit juste après qu’elle eut sonné.

Mackenzie se retrouva en face d’une dame plus âgée, peut-être proche des soixante ans. Elle tenait à la main une bouteille de nettoyant ménager et un chiffon. On entendait du rock des années 70 derrière elle, du Peter Frampton, si Mackenzie ne se trompait pas dans ses connaissances musicales, qui étaient plutôt étendues. La femme avait visiblement été interrompue dans son ménage mais accueillit néanmoins Mackenzie avec le sourire.

« Excusez-moi de vous déranger, dit Mackenzie. Je suis l’agent White, du FBI. » Elle présenta son badge et la femme le regarda comme si Mackenzie venait juste de faire un tour de magie. Je fais du porte-à-porte dans le voisinage pour obtenir des informations au sujet de l’accident qui s’est déroulé dans votre rue il y a deux soirs.

– Oh, bien entendu » dit la femme. Elle oublia aussitôt son nettoyage. « Avez-vous trouvé qui est le responsable ?

– Pas encore. C’est pour ça que nous sommes ici, à tenter de trouver des indices. Avez-vous vu ou entendu quoi que ce soit pendant cette nuit-là ?

– Non, et je ne connais personne pour qui ce soit le cas. Ce qui est d’ailleurs le plus effrayant.

– Comment ça ?

– Eh bien, c’est un quartier très tranquille. Mais nous sommes aussi un peu au milieu de nulle part. Bien sûr, Salt Lake City n’est qu’à moins de trente kilomètres mais comme vous pouvez le voir, ce n’est pas vraiment l’atmosphère d’une grande ville par ici.

– Quelle genre de rumeurs a circulé ? demanda Mackenzie.

– Aucune dont je sois au courant. C’est une chose trop dramatique pour qu’on en discute. » Elle s’avança d’un pas en travers de la porte, se rapprochant de Mackenzie afin de pouvoir parler d’un air de conspiratrice. « J’ai l’impression que la plupart des gens du quartier croient que si l’on n’en parle pas, toute cette histoire va juste disparaître – que tout le monde va l’oublier. »

Mackenzie acquiesça. Elle avait mené plusieurs enquêtes dans des villes similaires. Cependant, elle savait également que c’était l’un de ces quartiers de petite taille où les commérages ont tendance à s’enraciner et à se répandre largement.

Mais tandis qu’elle poursuivait son chemin le long de la rue, elle n’était pas si sûre que cela allait être le cas à Plainsview. Il y avait deux attitudes principales parmi les habitants : ceux qui étaient irrités de la venue du FBI parce qu’ils avaient déjà parlé de tout cela à la police, et ceux qui étaient sincèrement effrayés de la situation dans leur quartier, maintenant que le FBI était impliqué.

La huitième maison où elle se rendit ne se remarquait pas beaucoup. Il n’y avait pas de fleurs dans les parterres, uniquement du paillis ancien qui s’était depuis longtemps complètement décoloré. Il y avait des meubles de jardin sur le porche, mais ils étaient dans un fort état de délabrement, l’une des chaises étant parsemée de toiles d’araignées. A deux maisons de la première intersection du quartier, cela ne se remarquait pas beaucoup, mais Mackenzie supposa que certains des plus anciens propriétaires dans le quartier pourrait froncer du nez devant cette habitation.

Elle frappa à la porte et entendit des pas légers à l’intérieur. Dix secondes supplémentaires s’écoulèrent avant que quelqu’un n’apparaisse à la porte. Et lorsque ce fut le cas, celle-ci ne fit que s’entrebâiller. Une jeune femme jeta un œil dehors, ses yeux sombres observant Mackenzie avec un air scrutateur qui suggérait qu’elle devait être quelqu’un de soupçonneux.

« Ouais ? » demanda la jeune femme.

Mackenzie montra son badge et sa plaque et sentit aussitôt une étrange vibration émaner de cette femme. Tous les autres avaient ouvert grand leur porte mais elle avait l’air de vouloir s’en servir comme d’un bouclier. Peut-être faisait-elle partie de ces habitants qui avaient choisi de réagir de façon totalement paniquée par rapport au meurtre.

« Je suis l’agent White, du FBI. J’espérais vous poser quelques questions au sujet de l’accident qui s’est déroulé il y a deux nuits.

– A moi ? demanda la femme, confuse.

– Non, pas uniquement vous. Mon collège et moi allons de porte en porte pour interroger tous les habitants. Pardonnez-moi de vous poser cette question, mais vous semblez un peu jeune. Est-ce que c’est la maison de vos parents ? » Un léger air d’irritation traversa le visage de la jeune femme. « J’ai vingt ans, dit-elle. J’habite ici avec mes deux colocataires…

– Oh, toutes mes excuses. Donc… est-ce que vous vous souvenez de quoi que ce soit d’intéressant à signaler concernant cette nuit-là ?

– Non. Je veux dire, d’après ce que j’en ai entendu, cela s’est passé très tard. D’habitude je suis couchée vers vingt-deux ou vingt-trois heures.

– Vous n’avez rien entendu ?

– Non. »

La jeune femme continuait à ne pas ouvrir la porte en entier. Elle parlait également très vite. Mackenzie ne pensait pas qu’elle cachait quelque chose mais son comportement lui fit quand même commencer à se poser des questions.

« Comment vous appelez-vous ? demanda-t-elle.

– Amy Campbell.

– Amy, vos colocataires sont ici ?

– L’une d’entre elle. L’autre fait des courses actuellement.

– Savez-vous  si elles ont vu ou entendu quelque chose d’inhabituel la nuit de l’accident ?

– Non, rien. Nous en avons discuté, pour essayer de trouver quelque chose. Mais nous étions toutes endormies passé vingt-deux heures trente cette nuit-là. »

Mackenzie faillit demander à entrer à l’intérieur mais décida finalement que non. Amy était clairement paniquée par toute cette situation et il n’y avait aucune raison de l’effrayer davantage. Tandis qu’un moment de tension passait entre elles deux, Mackenzie aperçut quelqu’un bouger derrière Amy. Une autre femme marchait dans le vestibule, prenant à gauche pour aller dans une autre pièce. Elle semblait avoir l’âge d’Amy, avec un visage anguleux. Ses cheveux, qui se trouvaient être bruns, étaient relevés en un chignon désordonné. Mackenzie faillit demander qui c’était mais sentit que si elle le faisait, elle pourrait perdre l’attention qu’elle était parvenue à obtenir d’Amy.

« Comment avez-vous entendu parler du meurtre ? demanda Mackenzie.

– Par la police. Ils sont venus et ont demandé exactement la même chose que vous ce matin.

– Et vous leur avez répondu exactement comme à moi ?

– Oui. Franchement, je n’ai rien vu. Rien entendu. J’aurais voulu vous aider juste parce que c’est si horrible… sauf que je dormais. »

Ce fut avec cette dernière phrase que Mackenzie détecta une certaine émotion. Amy était soit triste soit désespérée à propos de quelque chose – ce qui était logique, étant donné ce qui s’était passé dans sa rue deux nuits auparavant. Cependant, elle se conduisait de façon beaucoup plus bizarre que n’importe laquelle des autres personnes à qui Mackenzie avait parlé. Celle-ci fouilla dans la poche de son manteau et en sortit une de ses cartes de visite. Quand elle la tendit à Amy, la jeune femme s’en saisit rapidement.

« Je vous en prie, téléphonez-moi si vous ou l’une de vos colocataires se souvient de quelque chose – ou même si vous entendez l’un de vos voisins mentionner quelque chose d’inhabituel. Vous pourrez faire ça ?

– Oui. Bonne chance, agent White. »

Amy Campbell referma rapidement la porte, laissant Mackenzie se tenir debout toute seule sur le porche sale. Elle redescendit lentement les marches tout en réfléchissant à tout cela.

Une jeune femme de vingt ans qui loue une maison dans un quartier comme celui-ci…c’est plutôt bizarre. Mais si elle a des colocataires, alors il se peut qu’elles soient étudiantes dans une université de Salt Lake City. Peut-être que c’est moins cher et plus agréable que de vivre dans une résidence sur le campus.

Même si toute cette situation semblait quelque peu étrange, elle devait se rappeler qu’un meurtre brutal s’était déroulé dans cette rue. Les gens allaient y réagir différemment – surtout des filles de l’âge d’être étudiantes, et qui savaient que la victime était environ du même âge que le leur.

Mackenzie réfléchit à tout cela dans sa tête tandis qu’elle regagnait la rue. Ce faisant, elle passa à côté des deux voitures qui étaient garées sur la petite plaque de béton qui constituait l’allée de chez Amy Campbell. Elles étaient toutes deux plutôt vieilles, l’une étant une Pontiac 2005 qui avait l’air de d’être prête à tomber en morceaux la prochaine fois qu’elle buterait sur un nid-de-poule.

Avant de redescendre plus bas dans la rue, Mackenzie sortit son téléphone. Elle y tapa le nom et l’adresse d’Amy pour s’y référer plus tard. Ce n’était qu’une intuition mais le plus souvent, les intuitions de Mackenzie s’avéraient payantes au final.

Elle remit son téléphone dans sa poche et continua d’avancer le long de la rue pour aller frapper à d’autres portes.

CHAPITRE HUIT

Huit minutes et trois maisons plus tard, le périple de Mackenzie dans le quartier de Plainsview fut interrompu par un appel téléphonique. Le Sheriff Burke était au bout du fil, sa voix d’une certaine façon plus épaisse à travers le combiné. Il avait l’une de ces voix dénuées d’expression, qui faisait qu’il était quasiment impossible de savoir de quelle humeur il était.

« Je viens de recevoir un appel du labo. Ils n’ont trouvé aucune sorte de signature cachée avec les rayons ultraviolets. Mais ils ont découvert une empreinte de pouce incomplète qui n’appartient pas à la fille.

– Vous avez trouvé quelque chose à partir de ça ?

– Oui, je viens de tomber dessus. L’empreinte appartient à un gars nommé Todd Thompson. J’ai demandé à un agent de faire une vérification à son sujet.

– Donc aucune signature… ce qui signifie qu’il y a de fortes chances pour que le permis soit authentique.

– Ca n’a toujours aucun sens. Le nom sur le permis ne correspond à rien dans nos dossiers. Ni les empreintes. Si la photo sur le permis ne lui ressemble pas exactement, alors je dirais qu’elle l’a volé quelque part.

– Je suppose que nous pourrions lancer une recherche sur les femmes qui ont reporté avoir perdu leurs sacs ou leurs permis au cours du mois dernier.

– C’est déjà ce que nous avons fait le premier jour. Nous avons eu quelques perches mais il n’en est rien sorti. Nous avons aussi essayé de… attendez, j’ai là un agent avec les résultats sur Todd Thompson. Je vais mettre le haut-parleur pour vous, Agent White. »

On entendit des bruits étouffés, un cliquetis et puis une autre voix. Celle d’une femme, tout aussi austère que celle de Burke mais avec plus d’émotion. Il y avait un ton d’excitation dans sa voix alors qu’elle était en train de se dire que ce qu’elle allait raconter pouvait peut-être les amener à résoudre l’enquête.

« Une simple recherche dans les registre de l’Etat montre que Todd Thompson est natif de Salt Lake City. Il a cinquante trois ans et – tenez-vous bien – travaille au service d’immatriculation des véhicules. »

Le lien avec ce dernier jetait certainement un nouvel éclairage sur cet étrange permis de conduire. Mackenzie put presque entendre s’enclencher les rouages de son cerveau alors que tout se mettait en place.

« Vous avez son adresse ?

– Je l’ai. Je peux scanner le rapport et vous l’envoyez dès que nous aurons raccroché.

– C’est parfait. »

Ils mirent fin à l’appel et Mackenzie regarda en bas de la rue, par là d’où elle était venue. L’emplacement de l’accident était à présent hors de vue, environ six maisons plus bas et dans un pâté de maison complètement différent. Elle regarda plus loin et vit qu’Ellington se trouvait une maison après elle. Il était en train de discuter avec un vieux monsieur à travers sa porte ouverte. Elle était presque sûre qu’il serait plus qu’heureux de mettre fin à ce porte-à-porte.

***

D’après le rapport fourni par Burke et son agent, Todd Thompson avait quelques casseroles dans son casier judiciaire. Deux contraventions de stationnement impayées (ce que Mackenzie trouva amusant, vu son métier), une inculpation pour complicité dans un cambriolage et infraction qui datait d’il y a trente ans. En dehors de ça, Todd Thompson paraissait irréprochable. Si ce n’est le fait que l’empreinte de son pouce avait été légèrement apposé sur le présumé faux permis de conduire de la femme apparemment dénuée d’identité.

 

Mackenzie informa Ellington de tout cela tandis qu’il conduisait pour les ramener en ville. Elle lui raconta également sa drôle de rencontre avec Amy Campbell. Il s’avéra qu’il s’agissait de la visite la plus intéressante parmi les dix-neuf qu’ils avaient effectuées. Ellington fut d’accord pour dire que l’humeur d’Amy pouvait simplement s’expliquer par le fait qu’une femme de son âge avait été tuée à moins de trois cent mètres du pas de sa porte.

Mais au moment où ils parvinrent en ville et se dirigèrent vers la maison de Todd Thompson, ils sentirent tous deux qu’il allait peut-être s’agir de la visite qui allait clore l’enquête. Mackenzie n’avait rien dit à ce sujet à voix haute mais elle était anxieuse de retourner à la maison. Le seul coup de fil de sa mère l’avait davantage bouleversée qu’elle n’était prête à l’admettre et elle se sentait brusquement stupide d’avoir cru que sa mère serait capable de garder un enfant sans en faire tout un plat.

La nuit commençait juste à tomber quand Ellington gara la voiture devant l’immeuble où se trouvait l’appartement de Thompson. Il habitait dans l’un des quartiers les plus agréables de la ville, la résidence étant située dans un coin donnant sur un petit parc et un square, où apparemment s’établissaient un marché fermier et d’artisanat le week-end. Tandis qu’ils entraient, quelques vendeurs finissaient juste de remballer pour la journée.

Lorsque Mackenzie frappa à la porte de l’appartement au second étage, elle se demanda à combien de portes elle avait toqué aujourd’hui. Onze ? Douze ? Elle n’en était pas sûre.

« Une minute, dit la voix enjoué d’un homme de l’autre côté. Lorsque la porte s’ouvrit enfin, ils furent accueillis non seulement par un homme d’âge moyen, d’origine afro-américaine, mais également par les senteurs de cuisine thaï.

« Etes-vous M. Todd Thompson ? demanda Ellington.

– C’est moi » dit-il. Il parut d’abord confus mais lorsqu’il vit les deux agents sortir leurs badges, un air de compréhension passa sur son visage. En voyant cette expression, Mackenzie réalisa que cela faisait longtemps que M. Thompson s’attendait à cette visite.

« Nous sommes du FBI, dit Mackenzie. Nous enquêtons sur le meurtre d’une jeune femme qui s’est passé à environ trente kilomètres au nord d’ici. Etant donné que vos empreintes ont été retrouvées sur son permis de conduire, j’apprécierais que vous nous receviez à l’intérieur. »

Thompson acquiesça, s’écartant d’un pas pour les laisser entrer. A présent, plus que jamais, Mackenzie était certaine qu’il savait que ce jour allait venir. Etrangement, il ne semblait pas du tout effrayé. Cela se confirma davantage quand, sitôt après avoir fermé la porte, il se dirigea vers une petite table dans la cuisine et s’y assit, attablé devant son plat à emporter thaï.

« Pardonnez-moi de dire ceci, continua Mackenzie, mais vous ne semblez pas perturbé que le FBI vienne frapper à votre porte.

– Avec la preuve que vous avez manipulé le  permis de conduire d’une femme à présent décédée, qui plus est, ajouta Ellington.

– Quand a-t-elle été tuée ? » demanda Thompson. Il paraissait triste et ses yeux se firent peu à peu plus vagues tandis qu’il mangeait son dîner.

« Vous ne savez honnêtement pas de quoi nous sommes en train de parler ?

– Non. Mais je suis au courant pour les permis de conduire.

– Au pluriel ? » demanda Mackenzie.

Thompson prit une dernière bouchée puis laissa tomber sa fourchette en plastique dans le plat qu’il écarta de lui. Il soupira profondément et regarda les deux agents d’un air accablé. « Oui, dit-il. Il y en a probablement quelques uns qui circulent.

– Tout ceci n’a pas de sens, M. Thompson, dit Mackenzie. Pourquoi ne nous dites-vous pas pourquoi l’empreinte de votre pouce s’est retrouvé sur le faux permis de la femme décédée ?

– Parce que c’est moi qui l’ai fabriqué. Même si j’ai utilisé une poudre en le faisant qui était censée ne pas y laisser mes empreintes. Vous utilisez des rayons ultraviolets ?

– En effet.

– Merde. Eh bien, oui… j’ai fabriqué ce permis.

– Au service d’immatriculation des véhicules, je suppose ? demanda Mackenzie.

– C’est ça.

– La jeune femme vous a-t-elle payé pour ça ? Le nom sur le permis était Marjorie Hikkum.

– Non. C’est toujours la même femme qui paie à leur place. »

Mackenzie commençait à être agacée par la manière désinvolte avec laquelle Thompson expliquait les choses. Elle savait rien qu’en regardant la mâchoire crispée d’Ellington qu’il commençait aussi à être énervé.

« M. Thompson, s’il vous plaît, expliquez-nous donc de quoi vous parlez.

– Ca fait trois ans environ que je fais ça. Cette femme vient, prétend avoir un problème quelconque et me file l’argent. Cinq cent dollars par pièce d’identité. Une semaine plus tard, je lui donne ce qu’elle a demandé.

– Vous comprenez à quel point c’est illégal, n’est-ce pas ? demanda Ellington.

– En effet. Mais cette femme… elle essaie aussi de faire une bonne action. Elle veut ces pièces d’identité parce qu’elle essaie de venir en aide à ces filles.

– Quelles filles ? » demanda Ellington, aboyant presque la question.

Thompson les regarda, confus. Cela lui prit un moment pour comprendre ce qu’il se passait et puis il leur lança à tous deux un regard désolé. « Bon sang. Je suis navré. Puisque vous êtes venus en posant des questions sur les pièces d’identité et la femme décédée, j’ai cru que vous étiez déjà au courant. Les papiers que je fabrique sont pour des femmes qui sont parvenues à s’échapper de cette cinglée de ferme de l’autre côté de Fellsburg.

– Quelle cinglée de ferme ? » demanda Mackenzie.

Cette question parut sincèrement inquiéter Thompson pour la première fois depuis qu’ils étaient venus frapper à sa porte. Il esquissa une légère grimace et secoua doucement la tête. « Je ne me sens pas d’en parler. Trop de gens importants sont impliqués, vous voyez ?

– Non, nous ne voyons pas. » Même si elle se rappelait que McGrath avait raconté qu’une sorte de communauté religieuse se trouvait dans la région et que c’était l’une des raisons pour laquelle les agents locaux hésitaient face à l’enquête.

« Eh bien, M. Thompson, je déteste devoir le dire de cette façon, dit Ellington, mais vous avez déjà avoué avoir fabriqué les fausses pièces d’identité. Si nous le voulions, nous pourrions vous arrêter pour cela et faire en sorte que vous passiez au moins les six prochains mois en prison. En fonction de ceux à qui vous les avez vendus, ce pourrait être encore pire que ça. Cependant, si vous nous apprenez qui étaient ces femmes à qui vous avez fourni ces papiers et que cela nous aide dans notre enquête, alors nous pourrions en quelque sorte passer sur tout cela. Nous insisterions pour que vous cessiez de fabriquer de fausses pièces d’identité en vous servant d’un établissement publique comme le service des immatriculations, mais ça s’arrêterait là. »

Thompson parut légèrement embarrassé d’être tombé dans un tel piège. L’expression gênée sur son visage se transforma en un sourire de défaite. « C’est possible de laisser mon nom en dehors de ça ?

– A moins qu’il n’y ait des circonstances atténuantes, je ne vois pas comment, dit Mackenzie. Avez-vous peur que quelqu’un ne cherche à se venger ?

– Avec ces gens-là, je ne sais tout simplement pas. » Lorsqu’il vit que les deux agents n’avaient toujours aucune idée claire de ce dont il parlait, il soupira de nouveau et poursuivit. « Cette femme vient et achète les documents. Elle les obtient pour des femmes qui tentent d’échapper à la Communauté. Elles s’en servent afin de se rétablir – juste quelques petites choses qu’elles peuvent posséder et qui les aident à démarrer une nouvelle vie. Une vie normale.

– Qu’est-ce que c’est cette Communauté ? demanda Ellington.

– Une communauté religieuse à environ vingt-cinq kilomètres de là, de l’autre côté de Fellsburg – c’est à peu près à quarante minutes d’ici. Beaucoup de gens connaissent son existence mais personne n’en parle vraiment. Quand ça arrive, c’est soit en plaisantant soit en parlant à voix basse d’un air effrayé.

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