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Mémoires touchant la vie et les écrits de Marie de Rabutin-Chantal, Vol. 6

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C'est sans doute à un temps voisin du mariage du Dauphin qu'il faut placer cette sorte de ligue formée par Louvois et le prince de Marsillac, de concert avec madame de Montespan, pour perdre madame de Maintenon dans l'esprit du roi, ligue dont parle seulement madame de Caylus. Mêlant ensemble leurs intérêts et leurs passions, ils voulurent, dit-elle819, dégoûter le roi, «mais ils s'y prirent trop tard; l'estime et l'amitié qu'il avoit pour elle avoient déjà pris de trop fortes racines. Sa conduite étoit d'ailleurs trop bonne et ses sentiments trop purs pour donner le moindre prétexte à l'envie et à la calomnie. J'ignore les détails de cette cabale, dont madame de Maintenon ne m'a parlé que très-légèrement, et seulement en personne qui sait oublier les injures, mais qui ne les ignore pas820

Voulant distinguer, même au déclin de son amour, dans madame de Montespan, la mère des enfants qu'il se proposait de reconnaître, Louis XIV lui avait donné, quelque temps auparavant, la grande place de Surintendante de la maison de la reine, dont la comtesse de Soissons avait été forcée de se démettre. Par une sorte de balance égale entre la femme qu'il ménageait encore avant de l'abandonner, et celle qu'il estimait de plus en plus, il désira que madame de Maintenon trouvât, dans la maison de la Dauphine, un état indépendant, car jusque là elle n'avait eu à la cour d'autre position que celle de gouvernante des enfants du roi et de madame de Montespan. Elle eût pu prétendre à la première place, celle de dame d'honneur; elle aima mieux y faire nommer une ancienne amie, la duchesse de Richelieu, alors dame d'honneur de la reine. Le même emploi auprès de l'épouse jeune et inexpérimentée de l'héritier de la couronne, était d'une importance supérieure à cause de l'influence qui devait s'y attacher.

La veuve de Scarron, et ce lui fut un honneur dans sa mauvaise fortune, avait été fort bien accueillie à l'hôtel Richelieu, sorte de doublure et d'héritier de l'hôtel Rambouillet, dont l'abbé Testu était le Voiture, où elle avait rencontré madame de Sévigné, et où brillait madame de Coulanges, ce qui fut l'origine de leur intimité821. «Sans bien, sans beauté, sans jeunesse, et même sans beaucoup d'esprit, madame de Richelieu avait épousé par son savoir-faire, au grand étonnement de toute la Cour et de la reine-mère, qui s'y opposa, l'héritier du cardinal de Richelieu, un homme revêtu des plus grandes dignités de l'État, parfaitement bien fait, et qui, par son âge, auroit pu être son fils; mais il étoit aisé de s'emparer de M. de Richelieu: avec de la douceur, et des louanges sur sa figure, son esprit et son caractère, il n'y avoit rien qu'on ne pût obtenir de lui822.» Le duc de Richelieu fut fait chevalier d'honneur de la Dauphine en même temps que sa femme était mise à la tête de la maison de la nouvelle princesse. La bonne renommée de la duchesse de Richelieu fut aussi l'une des raisons de l'appui de madame de Maintenon, comme la vertu reconnue de la marquise de Montchevreuil, une autre amie, fut cause qu'elle la fit nommer gouvernante des filles d'honneur formant la Chambre de la Dauphine, bien aise de se parer devant la Cour de ses honorables et anciennes amitiés823. Les filles de la reine furent mesdemoiselles de Laval, depuis duchesse de Roquelaure; de Biron et de Gontaud, deux sœurs, mariées, la première au marquis de Nogaret, et la seconde au marquis d'Urfé; de Tonnerre, devenue madame de Musy; de Rambure, qui épousa M. de Polignac, et mademoiselle de Jarnac, morte jeune sans être mariée: «Toutes de grande naissance et sans nulle beauté extraordinaire,» dit madame de Sévigné824; Louis XIV n'avait pas voulu mettre à côté de son fils les séductions qui avaient entraîné sa jeunesse.

La marquise de Sévigné entretient sa fille de tout un épisode se rattachant à la formation de la maison de la Dauphine et relatif à la duchesse de Soubise. Ce nom semble venir là pour compléter le nombre des femmes, des sultanes qui se disputaient la faveur du maître. Avide d'honneur et surtout d'argent, l'ambition rangée de madame de Soubise avait prétendu à la place de dame d'honneur de la reine, laissée vacante par la duchesse de Richelieu. Mais Louis XIV, désireux sans doute de rompre tous ses anciens liens, n'avait pas voulu donner les mains à un arrangement qui eût placé chaque jour devant ses yeux, avec tous les priviléges et les facilités de l'intimité, madame de Soubise. Celle-ci jouissait depuis longtemps de la confiance de la reine, qui, dans sa simplicité et sa crédulité, insistait vivement afin de l'avoir pour dame d'honneur: mademoiselle de Montpensier dit «qu'elle la préféroit à tout le monde825.» Le roi fut inflexible. Madame de Soubise se plaignit; MADEMOISELLE ajoute même qu'elle écrivit à Louis XIV une lettre «fort emportée,» ce qui lui valut un exil momentané dans ses terres. Naturellement la duchesse évincée dut s'en prendre à celle dont l'influence avait fait préférer madame de Richelieu, et que les courtisans commençaient à appeler madame de Maintenant, et peut-être est-ce à elle qu'elle en avait dans cette lettre qui la fit éloigner de la Cour, où elle ne reparut plus dans cet état de faveur demi-voilée qui servait à la fois ses intérêts et sa réputation826.

FIN DU TOME SIXIÈME
819Souvenirs de madame de Caylus. (Coll. Michaud, t. XXXIII, p. 487.)
820Id., p. 490.
821MADAME DE CAYLUS, p. 492.
822MADAME DE CAYLUS, p. 492.
823Id., p. 494.
824MADAME DE SÉVIGNÉ, Lettres (2 février 1680), t. VI, p. 147. MADAME DE CAYLUS, Mémoires, p. 495.
825Mémoires. (Coll. Michaud, t. XXXIII.)
826Sur cet épisode de la duchesse de Soubise, conf. SÉVIGNÉ, Lettres des 29 décembre 1679, 3, 5, 10, 17, 19 et 28 janvier, et 2 février 1680, t. VI, p. 82, 88, 94, 99, 108, 117, 130 et 145.