Sang Souillé

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Aus der Reihe: Les Liens Du Sang #7
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Faucon-de-Nuit caressa sa joue satinée du dos de sa main, là où Nile l’avait frappée et y avait laissé un hématome foncé. Craven avait dit que la caresse d’un amant pouvait la guérir. Fallait-il avoir une âme pour aimer ? Il le supposait, puisqu’il n’avait éprouvé aucune émotion depuis sa véritable mort des décennies plus tôt. Très fréquemment, il lui fallait se concentrer très intensément pour ne serait-ce que ressentir la moindre parcelle d’émotion, par-delà son âpre insensibilité.

L’abaissant doucement sur l’oreiller, Faucon-de-Nuit se redressa de toute sa taille et regarda par-dessus son épaule l’âme qui le hantait depuis son retour à la maison.

« Tu lui appartiens… n’est-ce-pas ?

Carley fit un bond de surprise : elle n'avait pas réalisé que l’Indien avait décelé sa présence dès le début. Elle posa sur lui un regard méfiant. Il l’avait tout simplement ignorée pendant qu’elle hurlait et fulminait contre lui... quel enfoiré. Son expression s’adoucit… elle avait cessé de crier après cela, en proie à une confusion grandissante en l'observant s'occuper de Tiara avec tant de délicatesse.

Cessant de flotter auprès de Tiara, elle se baissa lentement pour paraître s’asseoir sur le bord du matelas. Il n’y avait aucune raison de se cacher de lui… ce n’était pas comme s’il pouvait la blesser, quand bien même l’envie lui en prendrait… ce dont elle doutait.

— On pourrait présumer que je lui appartiens… mais ce n’est pas le cas, répondit Carley avec honnêteté alors qu’elle tendait une main pour toucher les longs cheveux propres de Tiara, et imaginait leur texture comme si elle était encore vivante pour la sentir.

Elle n’était pas morte depuis assez longtemps pour avoir oublié la sensation du toucher.

— Alors pourquoi l’as-tu suivie ? demanda-t-il.

Carley leva les yeux et le menton d'un air de défi.

— C’est mon amie… je veux savoir si elle va bien.

Faucon-de-Nuit acquiesça, respectant cette réponse.

— Et la magie de Craven ne te touche pas, même si tu te trouves entre ses murs ?

Cela semblait être une question importante pour l’Indien, alors Carley secoua la tête et baissa les yeux sur son amie.

— Grâce à Tiara, la nécromancie ne peut plus m’affecter ou me contrôler. Je l’aime pour cela, alors par pitié, ne lui faites pas de mal.

Faucon-de-Nuit sentit son cœur se gonfler d’espoir. Cette émotion s’envola aussitôt mais suffit à lui donner l'envie d’en éprouver davantage. C’est tout ce qu’il avait jamais désiré… ne plus jamais être invoqué par un démon.

— Nous n’avons aucune intention de lui faire du mal. C’est elle qui souhaitait venir avec nous et nous avons honoré cette requête. Si tu ne me crois pas, alors tu es libre de rester jusqu’à son réveil pour lui poser toi-même la question.

Il ne faisait que dire la vérité… la sincérité, seul trait de caractère qu'il ait conservé de son vivant.

— Alors, qui lui fait du mal ? demanda Carley en sachant que ce n’était pas l’homme qui se tenait à côté d’elle, mais les bleus guérissant rapidement sur le corps de Tiara, qui illustraient de bien mauvaises intentions.

— Le démon qu’elle affrontait dans le cimetière en est à l'origine, répondit Faucon-de-Nuit en allant s’asseoir sur la fenêtre, là où le soleil pouvait le toucher.

C'était l'une des seules pièces de la maison où les fenêtres n'avaient pas été repeintes en noir. Faucon-de-Nuit tenta de se souvenir s'il avait un jour aimé la lumière du soleil ou non... il le supposait.

Le visage de Carley s'assombrit quand il tourna la tête vers la fenêtre comme pour les ignorer, elle et leur conversation.

— Et Craven serait ce démon qui t'accompagnait ? Serait-ce ce même homme qui a fait encercler la maison par tous ces monstres ? Honnêtement, je ne pense pas que Tiara approuverait.

Elle tendit le bras et posa sa main sur celle de Tiara, malgré le fait que l'une traversait complètement l'autre.

— Et pourquoi nous abandonnerait-elle… nous, ses amis, pour partir suivre un démon ?

— Elle et Craven sont parents. On peut dire que Craven est son oncle. Mais dans l'esprit de Craven, l'enfant de son frère est comme son propre enfant. C'est pourquoi il ne la menacera en rien. Elle n'est pas une prisonnière en ces lieux et on ne la forcera pas à rester. Une fois guérie... si elle décide de partir, je partirais avec elle en tant que son protecteur.

— Pourquoi ferais-tu cela ? interrogea Carley.

C'était Craven, le parent de la jeune nécromancienne… et non l'Indien. Elle continua de l'interroger :

— Craven te l'a-t-il ordonné ?

— Non, j'échappe entièrement au contrôle de Craven à ce jour, répondit-il sans se retourner pour la regarder. Je suis un Rôdeur de l'Ombre et elle est la seule à pouvoir me rendre mon âme.

Carley en fut bouche bée... un Rôdeur de l'Ombre ? Voilà qui demandait une bien puissante magie. Elle repensa aux mythes et légendes qu'elle avait étudiés par le passé, et même ces anciens écrits les mentionnaient rarement.

D'après ses souvenirs, un Rôdeur de l'Ombre naissait à la place d'un mortel qui avait possédé des pouvoirs mystiques au cours de sa vie humaine, et se voyait réveillé d'entre les morts par un puissant sorcier comme s'il était un zombie. Mais ce n'était que la première étape à franchir pour devenir un Rôdeur accompli.

Contrairement à la plupart des zombies, ils pouvaient utiliser leur propre pouvoir pour retrouver leur esprit et leur cœur. On disait qu'ils n'avaient pas d'âme, mais elle ne se rappelait pas quels pouvoirs un Rôdeur de l'Ombre possédait, ou s'il existait même une limite à ces pouvoirs.

Elle se renfrogna en ne se rappelant pas avoir lu la moindre ligne parlant d'un Rôdeur de l'Ombre qui aurait récupéré son âme. Cela était-il seulement possible ?

— Ton âme ne se trouve-t-elle pas dans l'autre monde ? Carley avec curiosité.

— Non, elle est prisonnière au fond de ma tombe », répondit Faucon-de-Nuit, avant de disparaître dans le monde des esprits.

Carley s'assit dans un silence étonné. Prisonnière au fond de sa tombe ? Elle frissonna à l'idée d'être coincée sous terre au lieu d'aller et venir librement comme elle le faisait à l'heure actuelle. Baissant les yeux sur le sol, elle réalisa que Faucon-de-Nuit avait beau avoir disparu de sa vue, elle pouvait encore sentir sa présence dans la pièce.

En regardant de nouveau Tiara, Carley décida de ne pas insister sur le sujet avec cette conversation... lui accordant ainsi l'intimité qu'il lui demandait tacitement.

Chapitre 2

Au beau milieu de la pagaille créée au Cimetière d'Hollywood, Michael baissa les yeux sur l'Arach mort à ses pieds et essuya ses mains poussiéreuses sur son manteau.

« C'était divertissant, grommela-t-il entre ses dents.

Il leva les yeux juste à temps pour voir Kane décapiter un autre démon et lancer la tête arrachée de celui-ci par-dessus son épaule. Michael s'écarta maladroitement pour esquiver la tête volante et fusilla du regard le dos que Kane tournait vers lui.

— Tu permets ? demanda Michael. Je suis arrivé jusqu'ici sans me salir... et j'aimerais bien continuer comme ça.

Kane lui lança un sourire ironique par-dessus son épaule.

— Tu es assez rapide pour éviter un projectile.

Tabatha poussa un soupir, ayant vu assez de sang pour toute la durée de sa vie. Il semblait à présent que les garçons s'en amusaient comme d'un jeu.

— Si je ne connaissais pas Kane, j'aurais juré que vous prenez un peu trop de plaisir à tuer ces bestioles.

— Eh bien, je n'ai jamais entendu… il s'interrompit pour réfléchir un moment avant de regarder autour de lui les démons qui gisaient sans vie, puis reposa les yeux sur Tabatha. Tu as raison, je m'amuse, avoua-t-il en haussant les épaules, sans la moindre compassion.

— Tu te rappelles quand tu m'as demandé si on pouvait utiliser une caméra ? demanda timidement Tabatha.

Kane laissa retomber le démon sans tête sur le sol, son regard glissant de manière suggestive sur le corps de sa compagne.

— Ouais… je m'en souviens.

— Pas de caméra, décréta Tabatha en s'éloignant.

Michael se mit à rire devant l'expression abattue de Kane, juste avant que le vampire blond platine se décide à courir après sa compagne.

— Attends, l'appela Kane. Je retire ce que je viens de dire… je ne m'amuse pas du tout. Il s'arrêta assez longtemps pour plonger sa main à travers le corps d'un Faucheur qui passait près de lui à toute allure. Ils m'ennuient… tu vois ? ajouta-t-il.

Angelica haussa discrètement un sourcil, prise d'une envie de rire. Elle se retint, avant de lever les yeux vers Syn avec curiosité.

— Tes fils sont… intéressants.

— Il leur faut encore sortir de l'adolescence, fit observer Syn d'un air impassible. Et de plus… ils ont besoin de leur mère.

Michael braqua sur Syn un regard indigné, ayant surpris la remarque.

— Je suis tout à fait sorti de mon adolescence, merci beaucoup.

Sur ces paroles, il tapa du pied par terre comme un enfant qui piquerait une crise de colère, tout en grommelant dans sa barbe. Au passage, Michael donna un coup de pied dans la tête que Kane lui avait lancée comme un ballon de foot, et elle fendit les airs. Avant d'atterrir dans une rangée d'arbres et d'être suivie d'une forte exclamation.

 

— Qui est l'enfoiré qui lance des têtes de démon partout ? retentit soudain la voix de Jason.

Michael se figea un moment avec une grimace, puis décida de ne pas s'attarder.

— Je vais voir comment va Kane, déclara Michael en passant devant Syn et Angelica en courant, dans la direction opposée à celle de Jason.

— J'ai tout dit », conclut Syn d'un air de conspirateur, et Angelica détourna les yeux pour cacher son sourire amusé.

*****

« Tu as vu ça ? s'éleva la voix de Nick de derrière une crypte. Je viens de voir passer une tête volante par ici.

À ce moment-là, un Faucheur arriva en vue d'une démarche trébuchante, en pleine tentative de fuite devant sa mort imminente. Il y avait quelque chose de drôle à lire une telle frayeur sur le visage d'un monstre.

— Oui Nick, je l'ai vue, répondit Kriss en devenant visible à son tour.

Nick tira dans les pattes du Faucheur, avec une expression presque sadique.

— Allez. Montre-nous que tu sais danser.

— Nick, arrête de faire joujou avec cette saleté, grogna Steven, avant de lever les yeux au ciel en réalisant qu'il défendait un monstre.

Jewel s'avança vers le Faucheur et lui arracha la tête d'un coup de feu avant d'adresser un sourire charmant à Nick.

— Ton partenaire de danse vient de claquer.

— E-Eh ! gémit Nick. C’était ma cible.

— En fait, c’était la mienne, rétorqua Kriss, les bras croisés. Qui crois-tu qu’il était en train de fuir ?

— Trop de chasseurs et plus assez de proies, lança Dean en sortant de l’ombre projetée par un arbre voisin.

— Au moins Nick s’est débarrassé de ce bras, grommela Steven, avant de faire mine d'avoir des spasmes en ajoutant : Beuurrk.

Kriss grimaça.

— Ne mentionne plus JAMAIS... ce bras.

— Pourquoi ? interrogea Jewel, sans comprendre la plaisanterie.

Nick afficha un large sourire.

— Eh bien, je…

Kriss se tourna vers lui et grogna :

— Encore un mot et je te ferais moi-même effectuer un aller simple à Saint-Peter.

Dean sourit d’un air ironique.

— Ne le teste pas, petit chat… il semble assez cinglé pour tenir parole.

Kriss se tourna vers Dean et ouvrit des yeux ronds en lisant le désir sous-jacent qui brillait dans les yeux de ce dernier. Il ne pouvait s'en empêcher... son regard glissa sur le corps de Dean et il rougit un peu, avant de détourner les yeux.

Jewel sourit, ayant saisi ce à quoi les deux hommes pensaient. Contrairement à Steven et Nick, qui ne comprenaient rien du tout.

Le regard de Dean se fit ténébreux et séducteur devant la réaction qu'il provoquait chez Kriss. S'arrêtant derrière l'autre Déchu, Dean lui enlaça la taille d'un bras et approcha sa bouche de son oreille sensible.

— Je crois que vous pouvez prendre le relais, les gars, dit-il.

Il sourit lorsque Kriss frissonna légèrement sous son souffle chaud.

Les trois spectateurs de la scène clignèrent des yeux hallucinés devant la disparition subite des deux Déchus.

— Comment font-ils ça ? interrogea Steven tout bas.

— Je ne sais pas, répondit Nick, qui tentait d'effacer de son esprit l'image de Dean et de Kriss si étroitement enlacés.

Des bruits de pas sur le côté leur firent tourner la tête au moment où Quinn et Kat arrivaient en vue et sortaient de derrière la crypte.

— Eh bien, voilà presque tout le monde, déclara Nick. Je suis prêt à laisser le reste de cette pagaille à l’EEP.

— Ne manquent plus qu’Envy et Devon, maintenant, fit observer Steven.

Jewel regarda autour d'elle.

— Je me demande où ils sont ?

— La dernière fois que je les ai vus, ils étaient avec le frère d'Envy et notre nounours flingueur préféré. Je suis sûr qu'ils peuvent partir avec lui, déclara Nick. Alors si vous venez avec moi, le train part tout de suite.

— Tu es prête ? demanda Quinn à Kat, en l'attrapant par la taille.

— Depuis environ une heure, répliqua Kat en levant vers lui un visage souriant.

Ils avaient formé une excellente équipe cette nuit, mais tous ces combats avaient disposés Kat à faire autre chose.

Steven passa son bras sur l’épaule de Jewel et la guida vers l'entrée du cimetière.

Nick leva les yeux au ciel. Il commençait à avoir la sensation de tenir la chandelle. Dans un autre coin du cimetière, leurs quatre amis patrouillaient à travers le cimetière en abattant les démons un par un. Trevor avait son portable à l'oreille, occupé à donner des ordres aux personnes qu'il avait postées dans l'arrondissement.

— Ouais, on va avoir besoin de deux barrages routiers pour tenir les humains à distance du Cimetière d'Hollywood. Assurez-vous que toutes les routes soient couvertes.

Trevor se tut une minute en écoutant la réponse de l'officier au bout du fil.

— Faites le nécessaire dès que possible, enchaîna Trevor. Il va bientôt être neuf heures… il faut que tout soit prêt dans les dix à quinze prochaines minutes. Des badauds sont déjà en train de débarquer, mais heureusement, j'ai envoyé du monde à l'extérieur pour les empêcher d'approcher. Le truc, c'est que ce ne sont pas des policiers, et ça fait des histoires. Nous n'avons pas besoin que quelqu'un se mette à souiller la scène de crime… si tu vois ce que je veux dire… vandalismes et incendies criminels… environ trois jours…. Non, si quoi que ce soit tente de sortir, je ne pense pas que cela empruntera les routes.

Trevor se massa la tempe de sa main libre.

— Écoute, si tu vois quelque chose que tu n'as jamais vu auparavant... contente-toi de lui tirer dessus. »

Il raccrocha et poussa un lourd soupir.

« Je déteste avoir à tout épeller.

— Oh tu sais épeller ? demanda Chad en ouvrant comiquement des yeux ronds.

Devon renifla d'un air moqueur et Envy esquissa un petit sourire sarcastique.

— Non, s'empressa de répondre Envy qui se sentait d'humeur un peu légère. Mais il arrive à s'en approcher en étudiant les mots.

— Laisse-moi deviner, l'interrompit Chad. Il épelle “le” phonétiquement ?

Envy hocha la tête.

— Ouais, l… e… u… h.

Chad faillit s'écrouler de rire à côté d'un Trevor vexé.

— Vous allez arrêter, tous les deux ? s'impatienta Trevor.

— Arrêter quoi ? rétorquèrent simultanément Envy et Chad, ce qui eut le mérite de déclencher un choeur de gloussements chez le frère et la sœur .

Envy sourit à son frère, se souvenant de toutes ces occasions dans leur jeunesse où ils avaient eu des ennuis parce qu'ils attrapaient un fou rire et ne voulaient pas se calmer. À bien y repenser, cela se produisait souvent lorsqu'ils étaient censés aller dormir. Elle regarda son frère de plus près. Ouais, ses yeux étaient vitreux.

Devon ne prêtait pas vraiment attention à ces taquineries, à ce instant. Il avait localisé Warren à distance, tout occupé qu'il était à démembrer un démon, et se fit violence pour ne pas se transformer pour courir rejoindre son frère.

Envy surprit l'expression de Devon et y lut un sentiment d'envie à la façon dont ses yeux changèrent de couleur. Elle suivit son regard pour repérer à son tour le jaguar, et comprit que c'était dans sa nature de se métamorphoser. Il y avait de fortes chances pour qu'il reste sous sa forme humaine pour elle seulement, et ce n'était pas très correct de sa part envers lui.

— Pourquoi ne vas-tu pas l'aider ? demanda-t-elle en tendant la main vers lui pour la poser sur son avant-bras. Ça ira pour moi.

Devon se tourna vers elle.

— Comment vas-tu rentrer ?

— Je vais la ramener chez moi, proposa Chad, qui en vérité aimait bien cette idée. L'appartement n'était plus pareil depuis le départ de sa sœur . Je suis prêt à partir d'ici, de toute façon. Tu peux arrêter et venir la chercher quand tu en auras terminé ici. Il ajouta rapidement : Et prend ton temps, parce que nous serons probablement en train de pioncer, de toute façon.

Devon s'apprêtait à objecter puis il regarda le frère et la sœur , avant de réaliser pour la première fois qu'ils étaient tellement fatigués qu'ils étaient à deux doigts du délire. Il éprouva quelques remords pour ne pas s'en être rendu compte plus tôt. Les humains avaient besoin de deux fois plus de sommeil qu'un métamorphe... si ce n'était pas plus.

— D'accord, concéda Devon avant de gratifier Envy d'un long baiser. Je passerai te ramener... va dormir un peu.

Envy hocha la tête puis regarda Devon se déshabiller avant d'adopter sa forme de jaguar. Il disparut dans le cimetière à la suite de Warren et elle s'émerveilla de cette grâce dont il était pourvu sous toutes ses formes.

— On peut y aller, maintenant ?

La voix de Trevor était sombre, car il n'aimait pas la manière dont Envy regardait Devon.

Envy et Chad acquiescèrent tous les deux.

— Bonne idée, dit Chad. Je détesterais l'idée de représenter une cible facile pour quelque Faucheur chanceux simplement parce que j'ai décidé de m'allonger dans le cimetière et d'y piquer un somme. Je n'ai pas dormi ces deux derniers jours.

Tous trois se rapprochèrent de l'entrée du cimetière, en abattant deux Faucheurs de plus au passage. Lorsqu'ils eurent enfin rejoint la voiture de Trevor, Chad dut s'arrêter pour la contempler un instant, incapable de contrôler le sourire sadique qui lui montait aux lèvres.

— Où est passée ta vieille voiture ? demanda Envy à Trevor, qui s'approchait de la beauté noire toute neuve. Non que celle-ci ne soit pas superbe, parce que c'est le cas.

Trevor se figea soudain en se rappelant de la caractéristique que Ren avait ajoutée à la voiture. Oh merde ! Il éprouva soudain l'urgence de tourner les talons pour s'enfuir à toutes jambes.

— Trevor, lança Evey avec excitation, imitant parfaitement la voix volée à Envy. Je suis contente que tu ailles bien. J'étais occupée à scanner tous ceux qui franchissaient l'entrée et ai déjà déposé l'essentiel de ton rapport dans le système de l'EEP.

Le visage de Trevor devint tout blanc en regardant Envy, et il lut de l'incrédulité sur son visage.

— Trevor, lança Envy en singeant l'inquiétude qu'elle avait perçue dans la voix du véhicule... sa voix. Y a-t-il quelque chose que tu souhaites partager avec le reste de la classe ?

— Oh, qui est-ce ? interrogea Evey. Je ne l'ai jamais vue avant et elle ne figure pas dans la base de données de l'EEP. Dois-je l'y ajouter ?

Si Trevor ne la connaissait pas aussi bien, il aurait juré que la voix d'Evey était un peu trop douce pour être sincère.

— Evey, voici ma sœur Envy, annonça Chad. Elle est humaine et ne fait pas partie de l'EEP. Peux-tu nous conduire à la maison ?

Les portières de la voiture s'ouvrirent aussitôt et ils s'installèrent tous à l'intérieur, Trevor et Chad devant et Envy à l'arrière.

— Quand as-tu appris à parler ? demanda Envy à Evey, en décochant à Trevor un regard noir via le rétroviseur.

Si les regards pouvaient tuer, le chauffeur d'Evey serait déjà un homme mort.

— Tout récemment, répondit laconiquement Evey d'une voix sèche… avant d'ajouter aussitôt : Ne pense même pas à éloigner Trevor de moi.

Chad eut l'air totalement éberlué tout à coup, et se mit à rire si fort que ses côtes lui firent rapidement mal.

— Oh, ne t'inquiète pas à ce sujet, la rassura Envy en adressant un petit sourire presque diabolique à Trevor par rétroviseur interposé. Je n'ai aucunement l'intention de te le piquer. Je crois que vous formez tous les deux le couple parfait.

Evey laissa échapper un petit cri d'excitation et les portières se refermèrent aussitôt.

— Où est-ce que toi et Chad habitez ?

Cette fois, la voix de la voiture était enjouée.

— Je vais conduire, annonça Trevor, en souhaitant que la terre s'ouvre pour en finir une bonne fois pour toute. Toi, vas-y, fais connaissance avec Envy.

 

— Oui, dit Envy tandis que Trevor faisait démarrer la voiture. S'il-te-plaît, raconte-moi tout sur toi et les choses amusantes que vous avez en projet avec Trevor.

Chad était presque complètement ramassé sur le plancher, écroulé de rire, et il ne s'arrêta qu'au moment où ils furent presque arrivés à son appartement. Dès qu'Evey fut garée, Chad sortit en titubant de la voiture, et se précipita dans l'appartement, en sachant très bien qu'Envy prendrait quelques minutes de plus avant de prendre congé. Nom de Dieu, ses joues lui faisaient mal. Le petit détail qui rendait la situation encore plus drôle était que Trevor n'était pas en tort sur ce coup-là, cette fois-ci.

— Evey, demanda doucement Envy, cela t'ennuirait-il si Trevor me raccompagnait jusqu'à ma porte ? J'ai en quelque sorte vu bien trop de monstres pour ce soir pour me sentir en sécurité une fois toute seule… et on dirait bien que mon grand frère m'a laissée tomber.

Trevor grimaça à ces mots, car il savait très bien qu'il allait passer un sale quart d'heure et Evey n'aidait pas à arranger la situation. Ce n'était vraiment pas sa nuit.

— C'est une bonne idée. Trevor, toi tu t'assures que rien de dangereux ne menace ma nouvelle amie. Moi, je finirai de mettre à jour ton rapport à l'EEP à ta place. »

Le tableau de bord s'illumina pour afficher un écran d'ordinateur, tandis qu'Evey effectuait sa mise à jour en fredonnant doucement. Elle avait décidé, puisqu'Envy était la sœur de Chad et qu'elle se battait de toute évidence contre des monstres, qu'elle méritait d'avoir son propre dossier dans la base de données de l'EEP. En secret, elle prit une photo de la jeune femme à l'aide de sa caméra cachée.

Trevor poussa un soupir, s'abandonnant à l'auto-apitoiement, avant de sortir lentement de la voiture. Eh bien, lui qui avait souhaité un moment seul à seul avec Envy, il semblait à présent qu'il allait l'obtenir. Il était tout à fait pour l'idée de tenter de voir le bon côté des choses, mais ce bon côté commençait à lui paraître très maigre.

Ils arrivèrent enfin devant la porte d'entrée et Trevor se retourna pour lancer un coup d'œil à Evey, pour constater qu'un grand arbre dans la cour du devant se dressait maintenant entre eux. Envy choisit ce moment pour se retourner vers lui et le foudroyer du regard, ayant réfléchi à ce moment pendant tout le trajet. Elle lui planta un doigt dans la poitrine avec une telle violence que Trevor crut assurément qu'il y aurait un trou à cet endroit une fois qu'ils en auraient terminé.

« Était-ce censé être une blague, parce que si c'est le cas, ce n'est pas très marrant ? siffla Envy d'une voix étouffée, car elle ne savait pas à quel point le satané micro de la voiture était sensible.

— Oh oui, ça pour une blague, ç'en est une, gronda Trevor en réponse. Mais c'était censé me torturer… pas toi. Honnêtement, j'avais complètement oublié tout ça juqu'à ce que nous soyions retournés à la voiture, expliqua Trevor en se passant une main dans les cheveux. Je suis désolé que tu aies dû voir ça.

Lire dans ses yeux et entendre dans sa voix la sincérité de ces paroles ramena Envy sur terre, la faisant redescendre aussitôt de sa colère. Il disait la vérité... elle l'espérait.

— Pourquoi quelqu'un te ferait un truc pareil ?

Les yeux bleus aux reflets d'acier de Trevor se teintèrent d'une nuance un peu plus sombre en soutenant le regard de son âme sœur .

— Parce que tout le monde sait que je t'aime et que tu me hais. Ils trouvent cela amusant. Pourquoi crois-tu que Chad était en train de rire comme un bossu pendant tout le trajet ?

— Trevor, répondit Envy, qui sentait son cœur se serrer douloureusement à ces paroles. Ce n'est pas vrai, corrigea-t-elle à voix basse. Je ne pourrais jamais te hair.

— Je sais, lui assura-t-il avec un petit sourire, qui s'évanouit bien vite quand une expression soucieuse envahit ses traits. Je suis tout à fait conscient que tu nous aimes tous les deux. Devon le sait aussi.

Envy écarquilla les yeux et recula aussitôt d'un pas. Secouant imperceptiblement la tête, elle chuchota :

— Pourquoi penserais-tu cela ?

— Nous sommes des métamorphes, Envy… nous pouvons le sentir, insista Trevor, en avançant d'un pas pour réduire la distance entre eux. Ne me dis pas que tu n'as pas envie de moi quand je sais que c'est la vérité. Tu m'aimes autant que tu l'aimes lui, parce que tu as deux âmes sœur s.

Il déglutit avec difficulté, maintenant qu'il l'avait dit à voix haute.

Envy resta silencieuse, puis leva des yeux de biche vers les siens, avec le sentiment d'avoir été prise dans les phares de sa voiture. Elle ne savait pas comment répondre à cela parce qu'en vérité... Trevor pouvait encore la faire changer d'avis. Elle s'était même fait violence pour réprimer cette attirance qu'elle ressentait pour lui, parce qu'elle avait choisi Devon.

— Dis-moi que tu ne m'aimes pas, murmura Trevor, qui se pencha un peu plus vers elle jusqu'à ce que leurs lèvres se touchent presque.

Cette fois, ce fut Envy qui déglutit péniblement. Elle se forçait à nier ce que lui disait Trevor parce que des sentiments enfouis ne le lui permettaient pas. Elle détestait qu'on lui mente… donc elle était quasiment incapable de le faire elle-même. Elle l'aimait encore... mais c'était mal d'être amoureuse de deux hommes en même temps.

— J'aime Devon, souffla-t-elle tout contre ses lèvres, tout en se maudissant intérieurement de lui faire encore du mal.

— Bonne tactique… l'esquive, contra Trevor suite à un moment de silence, avant de se reculer juste un peu pour transpercer son regard du sien. Parce que si tu me mens... je serais capable de le sentir sur toi.

Envy recula d'un pas tandis que Trevor se tenait au-dessus d'elle, bloquant tout le reste de sa vue, bien qu'il se fût écarté. Passant une main dans son dos, Envy tâtonna pour trouver la poignée de porte. Elle ne voulait pas y penser... cela lui brisait le cœur.

Enfin, ses doigts effleurèrent la poignée et elle la tourna, ouvrant ainsi la porte. Elle se faufila à l'intérieur et allait pour la refermer quand la main de Trevor surgit et l'empêcha de le faire.

— Tu sais que j'ai raison, chuchota Trevor. Tu éprouves la même chose. »

Envy sentit qu'elle commençait à avoir des papillons dans le ventre et claqua aussitôt la porte au nez de Trevor. Tournant le verrou, elle pivota et s'appuya dos à la porte, attendant d'entendre le son de la voiture de Trevor en train de démarrer et de s'éloigner. Pour une raison obscure, elle avait l'impression qu'il se tenait toujours derrière elle, à attendre de franchir la porte pour la serrer dans ses bras.

Trevor posa les mains à plat contre le chambranle, sentant qu'elle s'attardait juste derrière la porte... adossée au bois qui les séparait, de l'autre côté. Il pouvait entendre son cœur battre la chamade à travers le bois épais et inspira profondément pour se calmer. Son instinct lui hurlait de briser cette porte et de reprendre ce qui était à lui... mais il serait maudit plutôt que de lui donner une raison de cesser de l'aimer.

Il fronça les sourcils un moment quand il ne l'entendit pas s'écarter de la porte d'entrée. Se penchant plus près de cette barrière entre eux, il posa son front contre la fraîcheur du bois et soupira.

« Envy, chuchota-t-il. Je t'aime. »

Ce fut à ce moment-là qu'il entendit de l'autre côté la jeune femme s'élancer pour se réfugier dans sa chambre.

*****

Jason s'assit sur un banc en pierre placé devant l'une des plus grandes cryptes pour reprendre haleine. Il n'avait pas été se cogner à quoi ou qui que ce soit depuis trois minutes et c'était un record pour cette nuit, jusqu'ici.

Tapotant l'anneau, il espéra que la chose voudrait bien d'une façon ou d'une autre se rallumer. Son ventre était noué d'inquiétude, car il ne savait pas où Tiara était et si elle allait vraiment bien. Baissant légèrement la tête, il se sermonna intérieurement de ne pas avoir été capable de la sortir du mausolée. Quel protecteur il faisait. Elle avait même dû demander de l'aide à un démon.